Le temps s'écoule et bientôt près d'une semaine passe dans le calme et parfois le rush du Sweet Epiphany. Je discute régulièrement par message avec Taehyung, entre deux tasses et deux shootings, jonglant entre mes horaires chargées et les siennes farfelues. Un beau matin, il m'a dit profiter des premières lueurs du soleil pour un de ses projets ; dois-je préciser qu'un soleil d'été se lève à des heures indécentes ? Un petit peu comme ma réponse, la moitié du visage mangée par les draps, réveillé en sursaut par la sonnerie.
Depuis je reste sur vibreur.
Je ne l'ai pas revu depuis; ni lui, ni ses deux acolytes. Je me laisse porter par la routine, resserre mon tablier aux hanches et aide Jin aux fourneaux. Une poche à douille entre les doigts, ma langue glisse entre mes dents par concentration tandis que mon mentor m'apprend à manier le dressage comme un maître. Soyons francs, il y a encore du chemin à faire. La crème s'étale un peu partout, mes mains sont tachées et ma joue droite colle. Jin tente de rester optimiste.
« —Namjoon devrait passer demain avec des amis, » me prévient-il alors que je jette l'éponge.
Il prend la relève et rattrape mon massacre chocolaté d'un geste d'expert.
« —Cool. Par contre, il reste loin des étagères. On vient à peine de recevoir nos nouvelles tasses. »
Néanmoins, j'ai hâte de le voir. C'est toujours un plaisir de discuter avec le cadet Kim. J'aime me perdre dans nos débats et dans son esprit intelligent. J'aime un peu moins ramasser ses bêtises ; mais je fracasserais volontiers des dizaines de tasses si cela me permettait d'être son ami. Jin rit et me laisse retourner en salle les bras chargés de douceurs. Je passe la porte d'un coup de hanche et la clochette de l'entrée tinte dans mon dos. Mince, ils ne me laissent même pas le temps de tout déposer en vitrine. Je lève la tête et tombe nez à nez avec une agréable surprise. Une touffe rose se penche au dessus du comptoir, vêtue aujourd'hui d'un large tee-shirt blanc et d'un jean déchiré. Nos regards se croisent à travers de jolies lunettes rondes perchées sur le bout de son nez et l'étonnement est réciproque. Je me sens sourire à son rictus :
« —Bonjour, » nous nous saluons d'une même voix. Est-ce une manie d'être synchronisé ? Notre amusement est partagé.
« —Que puis-je te servir ?
—Un cappuccino s'il te plait. Et peut-être un petit truc à grignoter, j'hésite encore.
—Je te conseille notre tiramisu avant qu'il ne soit dévoré ; il est très populaire. »
Ses yeux brillent, bien tentés, mais son sourire se fait fade. Il se mord la joue et désigne plutôt la corbeille de fruit posée au-dessus de la vitrine réfrigérée :
« —Je vais me porter sur une pêche.
—Très bien, je t'apporte ça. »
Il me remercie et s'en va s'installer à une table libre. Je suis à la fois peu surpris et peu rassuré. Jimin est mannequin ; c'est un métier souvent contraignant et au régime alimentaire très strict. L'envie évidente de cette pâtisserie qu'il a douloureusement refoulée me pince le cœur. J'espère qu'il ne fait pas ça trop souvent. Discrètement, je cale une part entre sa pêche et sa tasse et dépose le tout sur la table en faisant mine de l'ignorer lorsqu'il m'appelle pour signaler mon "erreur". J'essuie la vaisselle, sentant ses yeux épier le moindre de mes gestes. De temps en temps, je cherche son regard dans la salle et il tourne brusquement la tête, comme pris sur le fait, les joues aussi roses que ses mèches. Je ne peux pas m'empêcher de pouffer. Jin passe au même moment, me juge du regard en attrapant un torchon et s'enfuit dans la cuisine nettoyer ses bricoles. Lorsque Jimin s'en va, m'adressant un au revoir de la main, je m'empresse de débarrasser sa table pour laisser place à la folie de l'heure de pointe. Je suis content de récupérer l'assiette de son tiramisu vide, certain qu'il a aimé la cuisine de Seokjin. Posant sa vaisselle dans l'évier, je lui jette un dernier regard, le sourire en coin, pas peu fier de mon coup.
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Born Singer [YoonMin]
FanfictionIl y a des jours où je me demande : qui suis-je ? Quel est le sens de ma vie ? Seul dans l'obscurité angoissante, admirant mon plafond comme s'il était le reflet transcendant de la Voie lactée, j'y pense et repense sans jamais y trouver de réponse. ...