Chapitre 1-2

45 3 9
                                    

À chaque porte qui s'ouvrait devant Aldna, le poids de sa culpabilité envers son frère s'alourdissait. Elle n'avait jamais eu l'intention de lui faire le moindre mal. Elle comprenait qu'elle avait mal agi à son égard, bien que son seul désir était de le voir s'excuser auprès de Hérais. Mais cette fois-ci, c'était à elle de présenter des excuses. Sinon, comment pourrait-elle faire preuve de justice si elle-même n'était pas irréprochable ?

Arrivée à quelques pas de la double porte en bois massif, elle remarqua une faible lueur dorée, exacerbée par les rayons du soleil qui traversaient les carreaux des fenêtres. À mesure que la distance qui la séparait de sa destination diminuait, elle pouvait voir se dessiner devant ses yeux des renards. Le travail de sculpture était si bien réalisé qu'elle avait l'illusion que les multiples queues des animaux dansaient au gré des rayons solaires qui venaient frapper les couches d'or recouvrant leur pelage, faisant ainsi ressortir leur essence divine et légendaire.

Le conseil royal était toujours en session lorsque les deux gardes qui l'avaient escortée dans l'antichambre lui demandèrent de patienter quelques instants avant de quitter la pièce. Désormais seule, elle pouvait entendre les murmures des conversations qui s'étaient tus après une bonne vingtaine de minutes. Ses jambes engourdies d'être restée debout si longtemps, elle laissa échapper un soupir de soulagement. Au son du cliquetis de la poignée, elle se redressa vivement, reprenant une posture royale. Elle hocha légèrement la tête raide comme un piquet pour saluer les ministres qui s'inclinaient respectueusement devant elle, avant de quitter les lieux par une porte attenante. De nouveau seule, son attention se porta sur les deux grandes portes restées entrouvertes.

Alors qu'elle s'apprêtait à pénétrer dans la salle du conseil, son corps se figea de peur en entendant la voix d'ordinaire douce et enjôleuse de son père se faire grave et menaçante. N'étant nullement habituée à cette attitude froide, Aldna sentit une sueur froide couler le long de sa colonne vertébrale. Pourtant, attisée par la curiosité de comprendre ce comportement inhabituel de son père, elle approcha silencieusement son visage de l'ouverture. Ses yeux se posèrent instantanément sur la grande taille et les épaules larges du roi Renmisle.

Chaque fois qu'Aldna posait son regard sur lui, elle ne pouvait s'empêcher d'être impressionnée par son aura de confiance et d'autorité qui se dégageait de sa mâchoire carrée et de ses pommettes saillantes. Son regard d'un bleu profond lui donnait l'impression de capturer l'attention de ceux qui le regardaient. Aldna était réellement fascinée par son père qui, bien qu'autoritaire, était la douceur incarnée. Son charisme et son magnétisme ne laissaient aucune chance aux femmes d'échapper à son charme. Aldna était fière d'être la fille de ce roi aimé de tous et surtout reconnu comme l'un des guerriers les plus puissants du pays.

Pourtant, cette fois-ci, elle vit chaque muscle de son visage tressaillir, en particulier sa mâchoire. Elle ne comprenait pas pourquoi il adoptait une attitude si froide, et surtout à qui celle-ci était destinée.

Son attention se déporta aussitôt vers une silhouette mince et élancée qui se tenait en face de lui. Ses yeux s'arrondirent de surprise lorsqu'elle reconnut son frère aîné, Dallenan. Sa présence ne l'étonna guère, en tant qu'héritier de la couronne, mais c'était la douleur qui se reflétait dans son regard habituellement éclatant d'un bleu clair qui la saisit. Un pincement au cœur étreignit Aldna quand elle réalisa que les traits délicats de son frère et son expression captivante semblaient ternes et effacés.

Que ce passait-il donc dans cette pièce pour que l'on y reccente une atmosphère glaciale ? Cherchant à comprendre la situation, Aldna décida de rester silencieuse et de les écouter. Elle savait que ce n'était pas digne d'une princesse royale, mais sa curiosité était la plus forte. Elle posa donc délicatement sa main sur le battant de la porte, élargissant ainsi l'ouverture pour mieux percevoir leur conversation.

Heiress's HeartOù les histoires vivent. Découvrez maintenant