★ Chapitre 4★

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Des personnes encapuchonnées m'encerclent et se rapprochent de moi, ombres mouvantes dans une forêt que je ne reconnais pas. La lune, disque sanglant, trône dans le ciel comme pour donner le ton de la soirée. Une odeur de cadavre imbibe l'air poisseux. Et puis, l'une d'elles se positionne face à moi et enlève sa capuche d'un mouvement fluide. Je tente de réprimer un sursaut : c'est Tanaquill sans être tout à fait elle. Du sang coule de sa bouche et je vois quand elle me sourit méchamment que ses dents en sont également imprégnées.

– Regarde, me dit-elle, sa voix pareille au sifflement des serpents. Regarde ce que tu as fait.

 Elle tend le bras et me montre les autres silhouettes qui se décapuchonnent et part. Dans un même ensemble elles se tournent vers moi et je découvre avec horreur mes amis et toutes les personnes pour qui j'éprouve de la sympathie, qui révèlent leurs orbites vides d'où s'échappent serpents, scorpions, larves, et autres bêtes toutes plus répugnantes les unes que les autres. Les silhouettes se rapprochent et m'agrippent tandis qu'ils sont aspirés par d'obscurs trous sans fond. Leurs voix, brisées, m'implorent de les sauver.
Je me débats et leur donne des coups de pied pour les empêcher de m'entraîner à leur suite. Tanaquill revient et me dit avant que son corps n'explose en des bandeaux de fumée noire.

– Tu n'as même pas tenté de les sauver ? Ce monde est dangereux. Tu es dangereuse. 

Je me réveille en sursaut, hagarde, un filet de sueur dans le dos. Ce rêve était si... réaliste. Je me lève et regarde par la fenêtre. Les rayons du soleil commencent à poindre, je n'ai pas envie de me recoucher pour deux malheureuses petites heures, surtout si cela implique le risque de refaire ce rêve. Je m'habille en vitesse et m'attache les cheveux avec une brindille tout en m'efforçant de chasser une phalène qui semble vouloir nouer amitié avec moi. Je me dirige vers le nid commun et prends une poire mûre et du lait de scao, une sorte de vache. Je m'installe sur une natte et commence à manger. Forcément, mon oncle choisit ce moment pour entrer en baillant.

– Tu es déjà levée Leïra ?
– Bah... Oui. Ça t'étonne tant que ça ?

Apparemment oui. Il me fixe, bouche bée.

Je grogne :
– Qu'est-ce que tu as à me fixer comme ça ?
– Leïra, depuis quand as-tu tes meilankass ?
– Quoi ? Je ne peux pas avoir de meilankass, je n'ai pas encore fait mon Éveil.
– Leïra, je te jure que si.

Il va dans son nid et en ressort, une petite plaque dans les mains. Il me la tend. Je touche la surface, lisse et froide au toucher, et me regarde dedans.

– Un miroir, dit-il. Des... reliques du monde des humains. Il appartenait à ton père. Tu peux le prendre, il est à toi.

Mon reflet dans le... miroir me renvoie des lignes d'un rouge comme le sang coagulé qui ornent mon front de motifs géométriques.

Il reprends :
– Est-ce que tu as fait un rêve réaliste cette nuit ?
Je hoche silencieusement la tête.
– Raconte-le moi.

Je lui raconte tout. Cela dure longtemps car à chaque fois que je dis quelque chose, il me pose une question, de l'herbe à la couleur du ciel en passant par tous ce que j'ai fait ce matin et ce qui m'a paru inhabituel. Quand j'ai – enfin – fini, il reste pensif un long moment avant de déclarer :

– On va voir la reine Ralenèa.

Peace ★ 583 mots

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