★ Chapitre 10 ★

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Je m'étire en tendant les bras vers le ciel et ouvre la porte de mon nid. Mes bras retombent brusquement sous l'effet de la la surprise.

- Tanaquill ? Que fais-tu ici ?

Je m'assois sur mon lit. De toutes les personnes qui auraient pu se présenter, je ne m'attendais certainement pas à elle. Elle ne me répond pas tout de suite et me tourne à demi le dos. Elle effleure lentement le bord du miroir qui appartenait à mon père.

- Tu y es allée...
- De quoi parles-tu ?
- Du monde des humains ! (Elle fait volte face et je vois les larmes qui dévalent le long de ses joues.) Je t'en supplie, n'y retourne plus ! Je ne veux pas te perdre...
- Nous avons déjà eu cette conversation. C'est ma vie et j'en fais ce que je veux. Maintenant, si c'est tout ce que tu avais à me dire, tu peux partir.

Je me lève, furieuse et tends le bras en direction de la porte. Elle soupire et me rends l'objet en partant. Je me laisse tomber, dévastée par ce que j'ai dit. Cette fois c'est vraiment fini. Comment ais-je pu être si méchante envers elle ? 

Je laisse mon doigt courir sur le dos du miroir et sa surface polie par le temps. Une inscription à moitié effacée attire mon attention. Je la rapproche de mes yeux et la déchiffre non sans mal. L'important n'est pas la taille du caillou que l'on jette dans le lac mais l'ondulation qu'il provoquera. Je ferme les paupières et entrevoit un monde où les elfes vivraient avec les humains et où Akos me sourit. Tout cela est impossible. Peut importe ce que je ferai, ce monde n'existera jamais.
Je jette rageusement le miroir sur un mur où il se brise. Je regrette aussitôt mon geste et me roule en position fœtale pour sangloter à mon aise. 

J'ai détruit la dernière chose qu'il me restait de mes parents.

★ 

On me secoue l'épaule et je flanque un coup de coude à la personne qui a osé faire ça. Un gémissement m'arrache un maigre sourire : j'ai du viser juste.

- Leïra, c'est moi Reihn. Pourrais-tu te lever et éviter de me redonner de coups dans le ventre ?

Je peine à ouvrir mes paupières gonflées par mes larmes. Le ciel dehors s'est teinté de la couleur du soleil couchant.

- Qu'est-ce qu'il y a ?
- Rien en particulier... (Il ramasse sans faire de commentaires les morceaux du miroir cassés ce qui en dit long sur son soi-disant "rien".)
- Faux. Qu'est-ce qu'il y a ?
-  Maintenant que tu as ton don, tu sauras te défendre dans le monde des humains.

Son ton a presque l'air interrogatif. Je le laisse poursuivre.

- Quand tu seras prête, nous irons voir la maison de tes parents.
- Vraiment ?

Il acquiesce silencieusement et se lève. Je sais combien cela doit lui couter de retourner là bas et je lui en suis d'autant plus reconnaissante. Il a presque franchit la porte quand je murmure :

- Merci.

Ma voix est à peine audible pourtant il se retourne et me sourit tristement.

★ 

Nous partons peu après l'aube. La route s'étend devant nous, tel un serpent sinuant à travers les arbres. Les feuilles bruissent, soulevées par un vent invisible. Je peine à suivre le rythme de Reihn qui marche vite, comme pressé d'en finir. Il quitte le sentier et écarte un pan de lierre entre deux arbres. Il me laisse passer et je découvre une minuscule clairière ou des pierres sont disposées en cercle autour d'une dalle plate où est peint le symbole des Portes. Je tends la main et mon oncle la saisit.
Nous franchissons la porte, ensemble.

Les rues sont encore vides même si quelques habitants déambulent et se retournent sur notre passage en dévisageant les oreilles de Reihn. Nous arrivons enfin devant une petite maison, entourée d'un minuscule jardin en proie aux herbes folles et aux mauvaises herbes, signe de l'abandon qui règne en ces lieux. Reihn tente d'ouvrir la porte qui résiste. Il grommelle quelques jurons avant d'enfoncer la porte qui cède dans un crissement aigu.

Le seuil est poussiéreux et l'atmosphère lourde. Je pénètre, intimidée, dans ce qui aurait dû être ma maison. Mes pas laissent des empreintes sur le sol tandis que nous explorons chaque pièce avec précaution, comme si nous ne voulions pas les déranger. Les objets poussiéreux et couverts de toiles d'araignées semblent comme figés dans le temps.

J'entre dans ce qui devait être la chambre de mes parents. Le lit est défait et les vêtements éparpillés. Tout semble avoir été laissé en l'état, comme s'ils n'étaient partis que pour un court instant et qu'ils pouvaient revenir à tout moment. Je m'approche de la commode et saisit la boite à bijoux qui devait appartenir à ma mère. Je souffle dessus pour chasser la poussière et l'ouvre. Un creux dans le couvercle en forme de rond de la taille de ma paume me fait penser au miroir de mon père. Il devait se ranger là.  Je prends entre mes doigts tremblants une fine chaine en or au bout duquel pend une améthyste.  Reihn me rejoint et pose une main réconfortante sur mon épaule. S'il n'était pas là, je ne sais pas si j'aurais la force de continuer. Cela fait trop d'émotions en un si court instant. Je peux presque sentir leur présence. Bien que je n'ai jamais eu la chance de les connaitre, ils me manquent. Comment est-ce possible que des personnes dont on ne se souvient pas peuvent par leur absence autant vous manquer ? Je peux presque m'imaginer que ce n'est pas la main de Reihn sur mon épaule, mais celle de mon père.

- J'aurais tant aimé les connaitre, murmuré-je dans un souffle.
- Ils auraient été fiers de toi. Et ils étaient heureux d'avoir donné naissance à quelqu'un comme toi. Mais je suis là pour toi maintenant, nous sommes là pour toi, répond-il doucement.

Je sais que je ne suis pas seule. Reihn a toujours été là pour moi, depuis le jour fatidique où je suis devenu orpheline. Il a été mon guide même si ces derniers temps ont tendus notre relation et le dernier membre de ma famille.
Nous restons un moment dans le silence, nous imprégnant de la présence de mes parents à travers leurs effets personnels. J'essaye, à travers chaque objet, chaque détail, d'imaginer leur vie et comment ils devaient être. Je me lève, emplie de détresse et en même temps de colère. Comment ont-ils pu oser faire ça ? Pourquoi tant de violence envers les elfes ? J'aurai aimé, même si c'est égoïste, que mon père s'enfuie dans l'Eikano avec moi. Mais je sais que la culpabilité d'avoir abandonné ma mère l'aurait rendu fou ou tué.

Je serre un peu plus fort la main de Reihn qui grimace et nous ressortons de la maison. 

Peace ★ 1127 mots

Désolé, ça fait longtemps que je n'ai pas publié car je n'ai pas le temps et que je n'y arrive pas, non pas parce que je n'ai plus d'idées, mais ça coince. Le résultat est ... je n'arrive pas à le décrire non plus mais je vais tout réécrire quand je l'aurais fini. Normalement, il devrait y avoir encore deux chapitres à peu près.

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