🔵CE TEXTE CONTIENT DES ALLUSIONS / SOUS-ENTENDUS A LA MUTILATION🔵
AMES SENSIBLES, S'ABSTENIR, MERCI :)
Un jour, de printemps ou d'été, un jeune enfant s'est approché de moi dans la cour de l'école. Il a levé ce regard innocent dans ma direction, celui pour lequel, à l'âge adulte, on donnerait beaucoup de nos biens dans l'espoir de le retrouver. Puis il s'est tourné vers mes poignets, marqués par le passé et la douleur. Les petits comme lui ne comprenaient généralement pas ces horribles lignes. Ils étaient innocents, et je voulais à tout prix qu'ils le restent. Mais certains étaient plus cultivés, intéressés, et leur curiosité était parfois difficile à maîtriser. Ce garçonnet, en face de moi, agissait désormais sous le commandement de la curiosité.
Je me rappelle de sa voix intriguée, tendre, loin de la vie difficile et qui ne cherchait que des réponses simples à des questions pourtant compliquées.
Je m'étais abaissée à son niveau pour mieux lui répondre, parce que son interrogation méritait d'être résolue, et sa soif d'apprendre méritait d'être nourrie. Je choisis mes mots, briser une âme aussi frêle et fragile avec une réalité directe, c'était monstrueux.
« Petit, avais-je dit, regarde le ciel. Là-haut, la nuit, les étoiles et la lune brillent dans un fond bleu foncé. La journée, les nuages et le soleil vivent dans un fond bleu clair. Peu importe le temps, parfois, tu apercevras des traînées, des lignes blanches. Sans lui dire que cela venait des avions, je continuais. De là où nous nous trouvons, on pourrait penser qu'il s'agit d'autres moutons blancs, mais non. Ces traces ont étaient faites, causées par quelque chose et quelqu'un, elles ont un passé, une histoire, des raisons. Elles font mal au ciel, ces traces. Elles le polluent, plus ou moins. Néanmoins, cela fait parfois du bien à notre fond bleu d'avoir ces traces. Ça le soulage, il en a l'impression en tous cas. Certaines de ces lignes peuvent s'effacer avec le temps, c'est une sorte de guérison, comme un gros bobo qui disparaît au bout d'un moment. D'autres restent gravées à vie, parce qu'elles sont trop polluantes, grandes, profondes. Elles tachent le ciel, et ce-dernier est obligé de vivre avec.
Pour mes poignets, c'est la même histoire, tout ce qui est différent mon petit, c'est que mes bras ne sont pas des fonds bleus. C'est très moche et mauvais d'avoir ces marques, on peut penser le contraire, mais crois-moi, elles font davantage office de blessures qu'autre chose ! Dis-moi, petit, tu n'es pas un méchant avion ? Lui avais-je demandé avec conviction et humour. »
Il m'avait reprit directement, en riant gentiment « Absolument pas, madame ! » « Alors dans ce cas, ne tâche jamais tes jolis poignets ! Prends en soin, comme de tout ton corps ! »
J'avais conclus ma leçon avec une pichenette sur son nez, avant de l'inciter à retourner profiter des extérieurs. Ce gamin avait des amis, un avenir de roi à créer, à imaginer. Il pouvait nourrir sa curiosité et ses connaissances, même avec des sujets sensibles, à condition que ceux-ci soient détournés, et moins perturbants.
Vingt ans plus tard, j'ai reconnu les profondeurs. J'ai touché les abysses, frôlé le paradis. J'ai vu et broyé le noir, me suis effondrée à multiples reprises. J'étais seule, perdue.
J'ai décidé de prendre un rendez-vous psychologique, le premier de cette terne vie et période que je vivais. Le médecin a qui je fus confiée m'était inconnu, mais on me conta beaucoup de bien sur lui.
En rentrant la première fois dans sa salle que j'avais signé pour voir pendant quelques temps, le personnel médical me fit m'asseoir sur ces chaises en bois fortement semblables à celle de l'école dans laquelle je travaillais.
C'était un homme, grand, souriant, avec une aura chaleureuse, et un regard compréhensif. Après m'avoir posé quelques rapides questions, il avait demandé à inspecter mes poignets. Mes avant-bras couverts d'un autre univers, pleins de dessins géométriques absurdes et ignobles. J'en étais honteuse, aussi timide.
Pourtant, lorsqu'il regarda ce champ de guerre aux multiples tranchées, sa simple réaction fut de me sourire gentiment. Il m'avait prit les mains, m'avait observé de ce regard innocent que je connaissais auprès des enfants, puis il m'avait conseillé :
« Madame, regardez le ciel. »
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"My heart thinks, my brain writes."
PoetryIncapable de tenir une histoire sur le long terme, j'ai décidé de réunir mes œuvres plus courtes dans un bouquin numérique afin, peut-être, de soutenir les discrets dans l'ombre de la timidité ou de la honte, mais encore d'amener un peu de lecture d...