Chapitre 3

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— Règle numéro 2 : rien n'est assez important pour interrompre une séance de travail. Nous n'avons déjà pas assez de temps...

— Rien ? T'es sûre ? Même pas une urgence petit coin ?

— Même pas. Il faudra te retenir.

— Tu n'y vas pas un peu fort, là ?

— Bon ok, une seule allée aux toilettes par séance permise et elle ne doit pas durer plus de cinq minutes.

Jordan entrouvre la bouche et pose une main sous son menton.

— Laisse-moi deviner, la troisième règle est de limiter la quantité d'air que je respire ?

Je lève les yeux au ciel.

— Non. Cependant il y en a bien une troisième.

— Laquelle, Maîtresse ?

– Ne parle plus jamais de mes fesses.

Il s'esclaffe. Pendant qu'il se marre, je consulte son programme annuel de littérature qu'il a mis à ma disposition.

— Évidemment, on a le même, remarqué-je. Dissertation et Poésie pour ce trimestre. Amen !

— Et le reste ?

— Le reste ne me concerne pas car je te le rappelle une fois de plus, je ne te tiendrai que pendant trois semaines, soit huit jours au total. Mon seul but est de te faire cartonner à la prochaine évaluation, après tu pourras continuer à merder si tu veux.

— Dommage, je commençais à m'attacher...

— Ha ha ! très émouvant.

Je saisis un stylo et note quelques derniers détails dans son cahier avant de récupérer ma sacoche sur la table et lui dire au revoir.

— Une seconde, me retient-il. Ton numéro de téléphone.

J'arque un sourcil suspicieux.

— Ne te fais pas d'idées, m'assure-t-il. Tu n'es même pas mon genre de meuf mais juste, on ne sait jamais...

J'entends mon égo se fracasser comme une vitre à l'intérieur. Très étonnant que ce tas de muscles inculte ait réussi à l'atteindre, surtout que lui-même est loin d'être mon style de mec.

— C'est toi qui te fais des idées en croyant que je peux donner ma tête à de telles idioties. Et si tu réfléchissais un peu plus que tu ne parles, tu verrais en jetant un œil à ton cahier que j'y ai déjà inscrit mon numéro.

Il vérifie rapidement et, se rendant compte que j'ai raison, se met à grater sa nuque et à sourire hébété. Il bafouille des excuses mais je ne lui laisse pas le temps de trouver les mots justes. Je tourne mes talons et rentre chez moi.

Ma mère est affalée dans le canapé devant l'écran de la télévision qui diffuse un épisode de 4 mariages pour une lune de miel. Je salue, elle ne répond pas. Je m'approche et constate qu'elle est endormie. Je prends la télécommande dans sa main pour la replacer sur le meuble tv, elle gesticule doucement puis ouvre les yeux vers moi.

— Tu es là, mama... bredouille-t-elle.

— Va te coucher dans ta chambre.

— Hum, non c'est bon, ça doit faire deux heures que je dors. Tu viens d'arriver ?

— Oui.

Aussitôt, je me détourne, comme fuyant une suite de la conversation qui pourrait probablement m'agacer.

— Attends, me retient-elle.

Je fais volte-face et tends l'oreille, un brin curieuse.

— Il y a déjà des doigts de plantains murs sur le régime que j'ai acheté avant-hier, tu veux bien en faire frire quelques uns pour ton pè... pour William, s'il te plaît ?

Le roman de Kelly Où les histoires vivent. Découvrez maintenant