Chapitre 29

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Les bras ballants, Sarah est toujours debout devant nous et attentive à notre réaction. Jordan, réalisant que je suis moi-même à l'affût de ce qu'il compte faire, décide de briser le silence :

— Commence par te calmer, on peut discuter.

— Discuter de quoi ? s'offusque Sarah. Qu'est-ce que tu m'expliqueras que je ne sache pas déjà ? J'ai très bien compris la situation, Jordan, et il est évident qu'il se serait passé quelque chose entre vous si je ne vous avais pas interrompus à temps.

Le jeune homme baisse les yeux avant de sniffer en se pinçant le nez. Je jette le regard par la fenêtre, effroyablement gênée et coupable d'être en partie la cause de la souffrance d'une fille aussi tendre et sensible que Sarah.

— Tu vois, poursuit-elle, tu ne peux même pas le nier ! Tu aurais vraiment été capable de me tromper avec Kelly ?

L'air devient subitement lourd. Ma gorge s'assèche et mes poumons s'enflent. Le regard de Jordan croise furtivement le mien avant d'être confronté à celui de sa petite amie.

— Oh non ! s'exclame celle-ci en semblant avoir l'esprit traversé d'une évidence plus que claire mais si sombre à la fois. Vous l'avez déjà fait. J'hallucine ! Depuis quand dure ce manège ? — ses sanglots s'amplifient — Comment ai-je pu être dupe de cette façon, Seigneur ? Sérieusement, à quel point suis-je stupide !

Elle prend la fuite aussitôt, dévorée par le chagrin et la déception. J'observe Jordan planté là.

— Qu'est-ce que tu attends pour la rattraper ?

Il secoue doucement la tête :

— C'est peut-être mieux que je n'essaye pas. Tu sais, je m'en veux de la voir dans cet état, bien sûr; mais il était temps que cette histoire se termine, et je n'aurais jamais eu le courage d'y mettre un terme le premier.

— Qu'entends-tu par là ?

— Sarah, c'est un peu comme mon premier vrai amour. J'ai réellement été très attaché à elle pendant assez longtemps; et ça a été difficile, bien plus que je l'imaginais, de devoir penser à me séparer d'elle, quoique conscient de ne plus éprouver de sentiments pour elle. À ce stade, c'était plus une dette affective qu'autre chose. Même en ayant mes pensées et mes rêves totalement occupés par quelqu'un d'autre, il me semblait toujours que ça devait être elle la fille la plus importante à mes yeux. Je suis donc bien soulagé que finalement, nous soyons libérés de cette situation. Je ne sais pas si tu comprends.

— Étonnamment, oui. Mais il reste une chose que j'ai besoin de savoir.

— Laquelle ?

— Qui est cette autre personne qui occupe totalement tes rêves et tes pensées ?

— Une fille magnifique, dit-il en se rapprochant lentement de moi, intelligente et audacieuse.

— C'est tout ?

Il prend mes mains et les serre contre sa poitrine.

— En terme de qualités, oui, il me semble. Mais pour ce qui est des défauts, j'ai encore toute une liste bien pleine.

Je feins une indignation profonde, ce qui le fait légèrement rire.

— À vrai dire je ne voulais même pas vraiment que tu la suives, avoué-je.

— Mais je sais. N'oublie pas que tu es une piètre menteuse.

— Et toi un piètre acteur !

— Dit la fille « de nature un peu timide » ? Toi, timide ? Ah, j'ai bien failli m'étouffer quand tu as dit ça.

Nous explosons de rire. Ses mains pressent davantage les miennes, puis il m'embrasse sur le front.

— Ça reste très injuste pour Sarah, marmonné-je.

— Pas plus injuste que de continuer à lui mentir. Mais je comprends que tu te sentes mal pour elle, même si tu n'y es pour rien. Enfin, c'est vrai que tu m'as quand même un peu dragué...

— Stop, je m'insurge en fronçant les sourcils.

— Je rigole... Ne t'inquiète pas, je lui parlerai; mais avant, je crois qu'il faut lui laisser un peu de temps pour digérer la situation.

— Tu as raison.

Je regarde les citations littéraires toujours collées au mur de la chambre et distinctement, une en particulier retient mon attention : « Un grand amour rend léger tous les maux qui nous semblent trop lourds à porter seul » de George Sand. Je respire profondément et me blottis contre Jordan qui, pris de surprise, hésite un petit instant avant de nouer ses bras autour de moi. Je ferme les yeux et j'oublie le monde autour, jusqu'à ce que Jordan déclare :

— J'espère malgré tout que tu es prête à être la risée du lycée, car Marine ne laissera certainement pas ta réputation clean après que tu aies brisé le coeur à son amie.

— Merci beaucoup, Jordan, c'est très gentil de me rassurer.

— Avec plaisir.

Je le pousse vers la fenêtre et croise les bras sous ma poitrine. Il ricane. Mon corps réagit instantanément. Impossible de résister au son de son rire, de même qu'à la beauté de son visage détendu. Cet imbécile me fait perdre tous mes moyens.

— Comment tu arrives à m'énerver et à m'attirer autant en même temps ?

— Tout est question d'alchimie, maîtresse.

Je lui tourne le dos et fais quelques pas en direction de la porte, que je verrouille en n'ayant plus qu'une idée en tête.

— Baisse les volets, j'ordonne.

Jordan s'exécute avant même que j'aie terminé ma phrase, puis se tient à quelques centimètres de moi. Il m'observe silencieusement comme s'il se demandait par où commencer, quelle partie de moi il voulait déguster en entrée. Je ne lui laisse pas le temps de se décider. Moi, ça fait longtemps que j'ai fait mon choix. Je me mets sur la pointe des pieds et empoigne sa nuque pour aspirer ses lèvres. C'est comme de boire un verre d'eau fraîche après avoir supporté la soif pendant des heures. La satisfaction est si grande que je laisse échapper un soupir d'assouvissement. Jordan entoure ma taille et me serre bien contre lui, amplifiant ainsi notre baiser. Puis il me soulève et me pose sur son bureau. Ma main atterrit brusquement sur le clavier de son ordinateur. Je me pince les lèvres. Il me sourit et, tout doucement, place mes deux mains sur ses épaules.

— Tu ne les bouges pas de là, OK ?

Je fais timidement oui de la tête, tandis que quelques parties précises de mon corps commencent à brûler d'impatience.
Et alors que de ses multiples baisers et de ses mains expertes il se met à parcourir ma chair, mes mains, elles, ont de plus en plus de mal à rester sages. Jordan les remet en place et me lance un regard coquin. Un qui a l'air de dire « retiens toi encore un peu ». Et il reprend son œuvre envoûtante. Mon désir devient insoutenable, mes doigts s'enfoncent dans la peau de ses épaules. Haletante, je lui susurre :

— Ne me fais plus attendre, s'il te plaît.

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⏰ Dernière mise à jour : Sep 08 ⏰

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Le roman de Kelly Où les histoires vivent. Découvrez maintenant