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Je n’ai pas croisé Liam depuis notre dispute. Sauf en cours, où j’ai daigné me pointer qu’une fois sur trois. 

Mon absence pour le premier cours est expliquée par mon incapacité à prendre le taureau par les cornes au moment propice. Je n’assume pas le comportement que j'ai eu dans le labo de Liam (celui où j'ai presque succombé à ses avances), et je n’assume pas non plus les remords qui m'assaillent à chaque fois que mes pensées dérivent vers mon professeur.

Pour le deuxième, j’ai eu une panne de réveil. Bien que la ponctualité ne soit pas en général mon point fort, je n'ai jamais omis d'activer ma sonnerie durant toute ma scolarité universitaire. Un acte manqué? Probablement. Il faut dire que je n'attendais pas le cours de Liam avec impatience à huit heures tapante.

Pour le cours de ce matin, c'est une toute autre histoire. Alors que j'essayais de négocier les notes d'Ava pour la troisième fois en l'espace d'une semaine, celle-ci m'a traîné dans l'amphithéâtre de force en prétextant que cette situation ne pouvait pas durer éternellement si je voulais réussir l'examen de fin de semestre. Je sais qu'il y a une part de vérité dans cette excuse mais je sais surtout que ça la fait chier d'assister aux cours  toute seule pendant que je me la coule douce à la bibliothèque.

Alors j'ai cédé. 

Je me suis installée au dernier rang et mon nez est resté collé sur l’écran de mon ordinateur pendant l'entièreté des deux heures. Au final, j'ignore ce que je redoutais au point de vouloir sécher tous les cours de Liam car nos regards ne se sont pas croisés un seul instant pendant toute la durée du cours. 

En fait, j'ai l'impression de me retrouver dans la même situation qu'à la rentrée, Liam Moreau agit comme si nous n'avions jamais couché ensemble, comme si il ne m'avait pas donné rendez-vous  en secret dans son labo, comme si on ne s’était presque pas embrassé.

Mon coeur se serre en y repensant. Ça ne devrait pas, puisque c’est moi qui l'ai repoussé et c'est moi qui lui ai demandé de maintenir cette barrière de prof-élève entre nous. 

Mais pour être tout à fait honnête, ce qui me blesse le plus c'est de le voir se comporter ainsi sans le moindre effort.

Je le déteste pour ça. Il n’a aucun mal à oublier ce qu’il s’est passé entre nous, alors que moi, je rêve de ses lèvres sur les miennes, de ses mains sur mon corps, de son cœur tambourinant contre ma poitrine tous les putains de nuits sans rien pouvoir faire.  

Et bien que j'essaie de l'éviter, mon regard revient toujours vers lui comme si il était mon seul point de repère dans cette salle remplie d'étudiants. 

-Alors, t’es prête pour ce premier cours? me demande Ava en me tirant de mes pensées.

Nous sommes jeudi soir, et plus précisément le premier jour du tutorat.  

-Si seulement…

Ava n'ignore pas mon angoisse face à la prise de parole. Pas que, dans ce genre de situation, je frôle le malaise ou la crise de panique mais je me retrouve dans un parfait combo totalement aléatoire avec la nouvelle possession d'une voix chevrotante et d'un cerveau en surchauffe à deux doigts de faire sauter le mécanisme. En gros, je me mets à beaucoup trop réfléchir et à parler pour ne rien dire avec l'impression pour chaque personne en face de moi que je suis en plein sevrage de cocaïne.

-Ne me dis pas que de pauvres petits étudiants de licence te font peur? Me nargue-t-elle.

-Tu rêves, c’est juste que j’ai la flemme, j’ai plein de taffe en rentrant.

Ava me cogne légèrement l'épaule avec la sienne pour me faire comprendre qu'elle ne gobe pas un seul mot de ce que je raconte.

-Allez Léonie, ça va bien se passer. Tu as bien bossé ta présentation et puis tu ne seras pas toute seule, Nathan sera là pour t'épauler aussi.

Le ProfesseurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant