Le Professeur

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Retrouve-moi dans la salle de tutorat, on doit parler.

Vu.

Nathan a osé me laisser un putain de vu après avoir publié ses photos alors qu'il m'avait promis de ne pas le faire.

Quel traître. En plus de ça, il n'a même pas l'audace d'assumer les conséquences de ses actes.

Je contracte ma mâchoire quand mon regard se pose sur les aiguilles de ma montre, qui défilent d'une lenteur sans précédent. Je poireaute depuis vingt minutes dans cette putain de salle et l'ennui commence à se faire sentir. De toute façon, en raison de ma récente popularité qui est montée en flèche, aucun autre choix que de m'isoler s'offre à moi.

Dans d'autres circonstances j'aurais pu envisager la situation sous un autre angle et être sûrement flattée bien qu'embêtée. Pour ainsi dire, je suis passée d'inconnue totale pour la plupart des étudiants à la personne la plus mentionnée dans les conversations du campus. En fait, je ne serais pas surprise que cette histoire ne soit pas déjà parvenue jusqu'aux oreilles des étudiants des facs voisines. Bientôt, je serai la risée de la ville entière, celle qui a acheté son diplôme en échange de son corps et cette image est loin d'être gratifiante.

C'est à peine si je peux aligner trois pas sans que tous les regards ne soient rivés sur moi, que des dizaines de doigts ne me pointent sans se soucier d'une quelconque discrétion ou que les murmures à mon sujet ne se font plus bruyants qu'une explosion de dynamite. J'ai l'impression de faire partie intégrante de leur discussion dans laquelle je suis qualifiée par les pires adjectifs possibles et imaginables. Ça ne semble pas les déranger, en fait, je crois que leur but est justement que je les entende. J'ai mis des écouteurs avec le volume de la musique à fond mais c'était inutile. Je savais qu'ils étaient là et, comme si j'avais développé des facultés de télépathie, je devinais aisément le son de leur voix et les mots plus horrifiants les uns que les autres qui franchissaient la barrière de leur bouche.

L'intervention de Liam n'a pas eu l'air d'arranger les choses. Bien qu'elle partait d'une bonne intention, elle a plutôt eu pour effet d'empirer la situation en alimentant le désir d'événement dramatique des étudiants. Quoique, elle a eu pour mérite de ne pas m'être faite huer dans les couloirs ou balancer des tomates pourries sur la tête. J'avoue que je ne souhaitais pas tenter l'expérience après l'avoir vu à la télé, même si je ne vois pas comment des étudiants auraient pu se procurer des fruits, dont la saison est largement passée, en plein milieu d'un campus universitaire. Je n'écarte cependant pas la possibilité d'être humiliée de la sorte car je ne doute pas de l'inventivité et des ressources que fait preuve une personne qui se veut sous les projecteurs, rien qu'une seconde, même si ce n'est pas très éthique.

Mon téléphone se met à vibrer. Je me jette dessus en espérant que ce soit une réponse de la part de Nathan, histoire que je puisse m'évader d'ici dès que possible.

Hélas, ce n'est que ma mère.Je ne suis pas vraiment d'humeur à lui parler, surtout que je sais que notre conversation va se terminer par une dispute. Alors je laisse le téléphone sonner.

Cependant, c'est sans surprise qu'elle essaie de me joindre à nouveau. Je soupire, tel que je connais ma mère, quand elle a une idée en tête, elle ne lâche pas l'affaire. J'éteins donc mon téléphone pour gagner un peu de tranquillité.

Décidément, aujourd'hui est le moment où la vie a décidé de s'acharner contre moi. A se demander ce que j'ai bien pu faire pour mériter un karma pareil.

Je donnerai n'importe quoi pour que cette journée se termine enfin, regagner mon lit et ne plus jamais quitter le réconfort qu'il pourrait m'apporter en ces temps difficiles. Je ne voudrais pas donner un quelconque sentiment de satisfaction à ceux qui s'amusent à propager les rumeurs comme une traînée de poussière en affichant un moindre signe de faiblesse mais si leur intention est de me blesser, et bien, ils n'auraient pas pu mieux réussir car mon coeur se déchire rien que de penser à l'idée de remettre un pied dans l'enceinte de la fac.