Chapitre 5

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Pour rejoindre sa destination, Maeve a dû prendre deux bus, un train, puis trois avions différents avant de parvenir ne serait-ce que dans le pays où elle comptait se rendre. Elle arrive sur le tarmac de l'aéroport de Malé, aux Maldives, happée dès son premier pas à l'extérieur par la chaleur et l'humidité qui l'entoure. Habillée de son short de camouflage ainsi que d'un t-shirt noir à bretelles fines, son sac en toiles alourdi par les armes sur l'épaule, elle traverse l'aéroport la tête baissée afin qu'aucune caméra de surveillance ne puisse confirmer avec certitude sa présence ; on n'est jamais trop prudents. Elle a beau avoir apporté avec elles toutes sortes d'amulettes et de symboles bloquant sa trace aux yeux des anges et des démons, elle sait qu'il existe au moins deux êtres humains à la détermination de fer, prêts à la rejoindre au moindre signe de vie. Mais elle n'a pas besoin, elle n'a pas envie de se retrouver face à eux pour l'instant. Elle a quelque chose à faire, quelque chose d'important. Et elle compte bien le faire seule.

- Julia Mendez, lui dit un douanier une fois devant la sortie de l'aéroport, soyez la bienvenue à Malé.

- Merci, répond la jeune femme à voix basse, récupérant ses faux papiers.

« Merci Julia Mendez », se dit-elle en penchant la tête.

Elle quitte ensuite les lieux, se dirige vers une file d'attente de dix pieds de longs devant les quelques taxis se présentant ici. Récupérant quelques billets dans le bas de son soutien-gorge, elle se prépare à entrer dans l'un d'eux la tête toujours baissée.

- Le port Maléhia, s'il vous plaît.

Il faut à Maeve encore une heure pour rejoindre le port de pêche de Malé, un lieu bien moins touristique que les autres car ici, en dehors des pêcheurs et de quelques revendeurs d'objets peu licites, il n'y a pas grand-chose à faire. Elle se dirige d'un pas sûr vers une petite bicoque délabrée à quelques centaines de mètres, en marge du reste des commerces, et s'y introduit en silence, le visage fermé. Elle tend au manutentionnaire une grosse liasse de billets et un faux permis bateau, cachée derrière ses lunettes de soleil.

- Je veux louer un bateau pour deux jours, dit-elle simplement.

- Aucun problème, répond l'homme en amassant son généreux pourboire. Raison de l'emprunt ?

- Je vais chasser.

- Ah ah ! Bien, bien, d'accord. Plan de route ?

- Je vous donne ce fric pour ne pas avoir à répondre à vos questions, le stoppe Maeve le ton sec. Alors arrêtez d'en poser.

L'homme, dans un rictus, gratte quelques lettres illisibles sur son carnet d'archives qu'il referme rapidement pour se diriger vers l'arrière-boutique. Il rapporte à Maeve un jeu de clés, puis tend le menton vers un petit électrique qui suffira largement pour ce qu'elle a l'intention de faire.

- Si vous cassez, vous payez. Si vous rendez en retard... vous payez.

- J'avais compris, oui.

Alors, Maeve quitte enfin cette bicoque et rejoint le bateau à moteur garé devant la cabane en vieux bois de palmier. Elle parvient à démarrer après deux ou trois tentatives infructueuses, et peut finalement se mettre en route pour ce qui pourrait être le voyage de sa vie.

Elle doit naviguer durant plus de deux heures et demie, carte et boussole à la main, avant de trouver ce qu'elle a tant recherché. Mais lorsqu'elle voit au loin se dessiner les traits d'une petite île, elle esquisse un sourire. Enfin, elle y est. Elle poursuit donc sa route jusqu'à pouvoir accoster sur l'île minuscule, jonchée de panneaux « NO TRESPASSING » et « DEATH DANGER ». Un fusil dans une main et une machette dans l'autre, elle commence son périple dans la jungle de l'île du Banni.

Il lui faut encore trois heures avant de trouver, enfin, ce qu'elle cherchait tout ce temps. Ça valait le coup, néanmoins. Elle commence par entendre quelques bruits, le grésillement des flammes d'un petit feu de camp et des pas masqués par le sable environnant. Fusil en l'air, elle range son couteau dans sa chaussette droite et continue d'avancer, prête à faire ce qu'il faudra pour obtenir ce qu'elle veut. Et enfin, enfin après tous ces efforts, elle le retrouve.

L'homme fait peine à voir, avec les restes de ce qui devait autrefois être des cheveux sur le haut de la tête, sa peau décrépie et grisée par le temps, et sa posture courbée par la vieillesse et par les sortilèges qu'il a dû se lancer à lui-même pour survivre durant plus de deux mille ans. A peine arrive-t-elle derrière lui que le Sorcier s'arrête, lève les mains en l'air et se tourne dans un sourire conquis.

- Alors te voilà, dit-il d'un bruit qui ressemble plus à un jappement qu'à une voix humaine. Je t'attendais, Nephilim.

La Voie des Anges - Partie Finale (A Supernatural Story)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant