Interlude - PDV Seth

168 18 123
                                    

Je raccroche et range mon téléphone dans ma poche. Alors qu'un sourire de satisfaction se dessine aux coins de mes lèvres, je surprends la grande blonde, accroupis en face de moi, en train de me dévisager. Il est vrai que j'occupe sa petite boutique depuis quelques jours en attendant de me trouver un nouvel appartement. Pourtant, je n'arrive toujours pas à me faire à sa curiosité presque maladive. Tout le temps collée à mes basques, elle observe mes moindres faits et gestes. Je n'aime pas ça...
Je suis un loup solitaire normalement. Je suis l'ombre que l'on ne voit que du coin de l'œil avant qu'elle ne disparaisse. Alors avoir « miss je me mêle de tout » dans les pieds, ça a le don me taper sur les nerfs ! Elle bouscule mes habitudes. Habitudes que je chéris énormément...

— Quoi ? Demandé-je en roulant des yeux.

— Ça t'amuse de faire ça ? Lucy vient d'apprendre que sa mère ne l'est pas et toi, tu préviens Phébus pour qu'il leur tombe dessus ! Elle ne mérite pas tout ça, Seth... Ou devrais-je dire Erys ?

— Je pensais que tu ne l'aimais pas, raillé-je en plongeant mon regard dans le sien. Et pour ce qui concerne mon ancien prénom, je ne m'identifie plus à cette personne. Alors appelle-moi Seth, comme tout le monde, tu seras gentille.

La trentenaire soupire en poursuivant le rangement de sa boutique. Après avoir dépoussiéré ses étagères elle se retourne vers moi le regard emplit de questions.

— Non, mais sérieusement, je t'héberge quand même ! Tu pourrais m'expliquer ton obsession pour cette fille non ?

— Tu es bien plus vieille que moi, pesté-je. Tu devrais savoir que l'amour ça ne s'explique pas.

— Tu n'agis pas vraiment comme un type amoureux, mais plutôt comme une sorte de nuisance planant au-dessus d'elle.

— Abby, je te remercie de me rendre service le temps que je me trouve une nouvelle cachette. Mais n'oublie pas que je pourrais te tuer, si tu continues à me soûler en me donnant ton avis. Un avis que je n'ai d'ailleurs pas demandé, lui rappelé-je en lui adressant un sourire narquois. Si tu veux tant savoir, la seule chose que je peux te dire, c'est que je compte d'abord lui ouvrir les yeux avant de la courtiser. Elle est entourée par le mensonge, il est dans mon devoir de la guider.

— Donc, tu lui as appris que sa mère était Anya, pour son bien ? Répète-t-elle pas très convaincu.

— Elle devait savoir, m'emporté-je. Elle devait savoir que sa mère adoptive la trompait depuis tout ce temps, elle devait savoir que Phébus existait pour qu'elle reste sur ses gardes. Donc, oui, c'était pour son bien.

— D'accord, jusque-là, je peux comprendre, mais pourquoi ? Pourquoi Lucy ?

— Parce que quand je suis revenue en ville, après m'être enfui de chez Phébus, je ne l'ai pas reconnu, mais mon cœur si. Tous mes souvenirs de mon ancienne vie ont été effacés pour je ne sais quelle raison. Ma vie d'être-humain me semble si lointaine, comme à des années-lumières de moi. J'ai perdu mon humanité et mes sentiments à tout jamais, sauf l'amour que je lui porte.

— Alors tu t'accroches à ce dernier sentiment ? Demande-t-elle.

— Oui, c'est mon dernier et seul sentiment, tu peux comprendre à quel point il m'est précieux. Si Lucy disparaît, elle emportera avec elle la lumière de ce monde et il ne me restera plus que la noirceur. Une noirceur, que même un vampire comme moi, redoute comme la peste...

Le regard dans le vide, je me ressaisis et m'éclaircis la voix.

— Mais si Lucy est entourée de mauvaises personnes qui mettent à chaque instant sa vie en danger, je ne pourrais jamais dormir sur mes deux oreilles. C'est pour cela que je veille sur elle et lui apprend ce dont elle a besoin de savoir. Cela, fait-il de moi l'antagoniste de l'histoire ? Oui, non, peut-être ? En réalité, je m'en contre-fiche.

TénèbresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant