Les premiers rapports

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Quand je rejoignis ma chambre après avoir laissé Valmont prendre la route pour explorer les environs, je déballai mes affaires et organisai mon espace. J’étais satisfait de pouvoir enfin abandonner ces satanées valises et malles qui, force d’intempéries, sentaient une désagréable odeur de renfermé mêlé d’humidité, rendant les tissus de mes vêtements rêches et poisseux.

Cependant, je conservais dans une unique mallette scellée mes objets et biens les plus précieux, y compris la clé de mon collier ainsi que mes tablettes de suppresseurs. J’en gardai juste une poignée dans mon pilulier constamment présent dans la poche de mon veston pour pallier tout manque.

J’avais déjà connu des crises phéromonales intenses, je ne voulais pas revivre pareil moment, en particulier aux côtés d’Hippolyte. Je ne connaissais que trop bien cette sensation de picotement au niveau de mes organes génitaux, les battements impétueux du cœur, les bouffées de suée qui donnait l’impression de s’étouffer et les pensées érotiques qui assaillaient mon esprit pour ne me focaliser que sur cette volonté de saillie. Mais le pire était cette horrible sensation de manque, un besoin presque viscéral de se sentir possédé par le premier venu car Dame Nature nous intime de nous accoupler pour porter la vie en notre sein.

Dire que ce réflexe hérité de nos ancêtres Pyana n’avait toujours pas disparu au contact de l’homo sapiens et de ces multiples femmes qui vivent sur ce vaste territoire européen. Que la biologie peut être longue à réagir parfois ! Pourquoi conserver une telle capacité devenue si désuète et encombrante dans cette société moderne ?

Je n’aimais pas l’homme que je devenais en ces instants de crise. Mon père m’avait toujours assuré que c’était ainsi et que je n’avais pas à avoir honte de cette offrande providentielle. Plus facile à dire qu’à faire mais j’aimais le soutien qu’il m’accordait. Il ne m’avait jamais dénigré, ne m’avait jamais perçu autrement que comme son garçon et, à ce titre, m’avait éduqué comme tel. Je n’avais jamais été molesté ou raillé, et ce, par aucun membre de ma famille. Pour eux, j’étais un être normal, certes doté de facultés inconventionnelles, mais normal au demeurant.

Or, qu’en serait-il de mes pulsions si je me trouvais auprès de cet alpha lorsqu’une crise viendrait à surgir ? Je frissonnai à cette idée et mon ventre se contracta. Malgré son caractère et ses manières grossières, Valmont n’en restait pas moins quelqu’un de terriblement attirant. Il avait ce je ne sais quoi de rassurant, cette effronterie et moquerie des convenances qui m’amusait autant qu’elle me consternait. Peut-être disait-il cela dans le but de tester mes limites quant à ma tolérance car il y avait un soupçon de goguenardise dans sa voix.

Je devais avouer qu’en dépit de nos désaccords sur de nombreux points, j’appréciais toutefois sa finesse d’esprit et la façon dont il exposait ses jugements. Dans ces moments-là, ses yeux brillaient d’une étincelle de défi qui me subjuguait autant qu’elle me décontenançait.

Je n’avais jamais connu l’amour, juste une franche camaraderie auprès de certains amis mais rien qui ne me fasse vibrer et accapare mon esprit à longueur de journée. Néanmoins, à force de côtoyer cet alpha, je redoutais d’éprouver pour cet homme un tel sentiment. Cela serait inconvenant. Assurément, ma famille connaissait mes penchants pour la gent masculine. J’étais omégalensis, mes accointances pour un mâle étaient presque aussi innées que mon don de porter la vie. Seul un infime pourcentage s’orientait vers la gent féminine.

En revanche, il n’était pas rare de voir des alphalensis s’amouracher de femmes et Valmont en était un redoutable exemple. Les dualensis étaient polygames. Généralement, les alpha possédaient une femme ainsi qu’un oméga. Leur semence était réputée pour être bien plus fertile que celle de n’importe quel autre individu. La survie de notre peuple avait donc pendant longtemps dépendu de cette pratique. Sans compter que nous, oméga, sommes dépendants d’un alpha, ne serait-ce que pour percer notre glande et nous permettre de vivre sans le joug de ces exécrables chaleurs qui surviennent deux fois par an et peuvent durer plusieurs semaines.

Entre Chien et LoupOù les histoires vivent. Découvrez maintenant