Eve princesse révolutionnaire S2

Épisode 11 : Amitiés naissantes

Eve décida de rajouter au contrat une clause de confidentialité concernant sa véritable identité. Cela n'apporterait rien de bon si les gens apprenaient qu'une insignifiante chanteuse des rues avait attiré l'attention d'un membre de la famille impériale. Eve savait que cela finirait par se savoir, mais elle pensait que le plus tard, serait le mieux. Sans compter qu'elle se méfiait comme de la peste de ses frères et sœurs, qui étaient constamment à la recherche d'un moyen de la déstabiliser, et risquaient de prendre Rimona pour cible. Et puis la chanteuse se sentirait sans doute sous pression à l'idée d'avoir un tel sponsor.

« Je pensais être le seul à avoir le privilège de te tutoyer, observa Mikael alors qu'ils rentraient en fiacre. Mais je vois que la liste d'exceptions s'allonge.

— Tu as raison. Et tout aussi étonnant que ça puisse paraître, ça ne m'a pas déplu. C'est sûrement grâce à toi que je m'y suis habituée.

— Ou peut-être que tu es douée pour sympathiser avec les simples citoyens.

— Sympathiser ? s'étonna Eve en inclinant la tête sur le côté les sourcils froncés.

— Ne viens-tu pas de te faire une amie, aujourd'hui ?

— Oh... ! » s'exclama Eve que l'idée n'avait pas effleurée.

Depuis son plus jeune âge, elle avait été cataloguée d'incurable fauteuse de troubles et n'avait par conséquent jamais pu se faire d'amis. La remarque de son chevalier attitré lui fit réaliser qu'elle avait sans doute une raison plus personnelle de ne pas vouloir révéler son identité à Rimona dont elle avait été une fidèle admiratrice dans le passé : l'idée qu'elle la considère comme son amie ne lui déplaisait point. Elle espérait même, au contraire, que la chanteuse continuerait à se sentir aussi à l'aise avec elle, la prochaine fois qu'elles se rencontreraient.

La réalisation de cette évidence la fit rougir et la curiosité l'envahit soudain :

« Et toi, Mikael, tu as des amis ?

— Eh bien... » commença son chevalier ses paupières baissées dissimulant son regard améthyste.

Il avait l'air perdu dans ses pensées et Eve attendit patiemment qu'il rassemble ses idées, mais il n'eut pas le temps de formuler une réponse car le fiacre venait de s'arrêter devant le palais. Mikael raccompagna Eve jusqu'à ses appartements et s'inclina.

« Repose-toi bien, ma Princesse.

— Merci. Toi aussi, Mikael. À demain. »

Mikael s'en retourna à ses quartiers. En tant que chevalier attitré il avait droit à un traitement particulier et contrairement aux autres chevaliers de la garde impériale, il ne partageait sa chambre qu'avec Sylvestian. Celui-ci ne l'avait d'ailleurs rejoint que récemment, après avoir été promu, lui aussi, chevalier attitré.

En poussant la porte qui grinça sur ses gonds, Mikael sentit aussitôt une présence dans la pièce.

« Tiens... Tu es déjà là, camarade ?

— Ah... Mikaelis. »

Son compagnon de chambre était allongé sur son lit, un bras recouvrant ses yeux. Il n'avait pas encore quitté son uniforme et semblait exténué. Mikael consulta l'horloge.

« Tu as réussi à rentrer avant minuit, cette fois-ci.

— Techniquement, même si je rentre le matin, c'est toujours avant minuit de la journée suivante... Mais c'est vrai qu'hier je n'ai pas pu rentrer de la nuit. »

Il avait donc dormi ailleurs. Et à part lors de déplacements en dehors du palais, comme c'était le cas aujourd'hui pour Mikael, il n'y avait qu'une seule autre raison pour laquelle un chevalier attitré rentrait si tard dans ses quartiers.