Épisode 1 : Des avances déplacées

57 4 0
                                    

Un peu plus tôt...

Alors qu'Eve était dans l'alcôve, en train de discuter avec Anaïs, Mikael montait la garde, debout dans le couloir, sans qu'on pût remarquer le moindre tressaillement dans sa posture. Son immobilité était si parfaite et sa tenue si raffinée qu'il était difficile de le distinguer d'une œuvre qu'aurait sculpté un artiste génial. Il aurait d'ailleurs pu maintenir indéfiniment son attitude inébranlable et pleine de distinction si un fâcheux contretemps n'était venu la troubler.

« Sir Agnito ?

— Oh... Je vous salue à nouveau, Votre Altesse. »

Cette fille à l'air inoffensif aurait dû se trouver au centre des festivités et non dans cet endroit sombre et retiré. Sans compter qu'elle n'aurait, en aucun cas, dû s'y aventurer seule.

Voilà qui est suspect.

Alors que le chevalier cherchait une explication logique à sa présence en ces lieux, elle s'avança vers lui à pas menus et il fronça aussitôt les sourcils. Bien sûr, derrière son bandeau de dentelle et dans ce couloir peu éclairé, personne n'aurait pu s'en apercevoir. Cette réaction viscérale l'avait malgré tout perturbé. Sans qu'il réussît à comprendre pourquoi, il avait, dès le début, pris Rosenitte en grippe. Cependant, adulée comme elle l'était depuis la naissance, la Rose Blanche de l'Empire aurait de toutes façons été incapable de s'en rendre compte.

« Eve est à l'intérieur ? s'enquit-elle avec de grands yeux candides.

—  Oui, elle se repose.

— Pourquoi n'entrez-vous pas avec elle ? N'êtes-vous pas son chevalier attitré ? »

Malgré le ton innocent de sa question qui semblait partir d'un bon sentiment, elle lui demandait en réalité comment cela se faisait qu'il ne fût pas en train d'accorder ses faveurs à sa maîtresse. Mais la naïveté exagérée avec laquelle elle s'exprimait n'eut pas sur lui l'effet escompté.

Quelle princesse détestable... 

« Et comment ce fait-il que vous ne soyez pas avec Sir Millard, Votre Altesse ? demanda-t-il à son tour, faisant fi du protocole qui interdisait ce genre de comportement.

— Je suis juste sortie un peu pour prendre l'air.

— Une princesse comme vous ne devrait pas se promener toute seule dans les couloirs. C'est dangereux. Vous ne devriez pas vous déplacer sans être escortée par votre chevalier.

— Si vous vous inquiétez pour moi, Sir Agnito, vous pouvez m'escorter vous-même. »

Mikael trouvait la suggestion absurde, mais la contrainte du rituel d'allégeance pesait sur lui. Il lui fallut lutter de toutes ses forces pour exprimer son refus :   

« La septième princesse m'a malheureusement donné l'ordre de monter la garde ici.

— Oh, vraiment ?

— Oui, donc s'il vous plaît...

— Si vous avez besoin de la permission d'Eve, je vais la lui demander. Elle est bien à l'intérieur ? »

Voilà qui devenait ennuyeux. Mikael ne savait plus quoi dire ou faire. Derrière ces rideaux, la discussion secrète de sa princesse avec Anaïs, devait poser les fondations de ses plans futurs. Il n'avait aucun désir d'interrompre ou de dévoiler leur conversation.

« Je... Je vais vous accompagner, Votre Altesse. » lâcha-t-il à contre-cœur.

Il ne voyait pas d'alternative possible et s'approcha d'elle avant de lui présenter son bras gauche. Tout ce à quoi il pouvait penser était à quel point il exécrait le regard rubis que la princesse fixait sur lui d'un air de triomphe, alors que ses doigts graciles agrippaient son bras.

Eve princesse révolutionnaire S2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant