Chapitre 2

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J'eus un sursaut.

Et puis tout mes sens commencèrent à revenir, lentement.

Je sentais que je n'étais plus dans la neige, mais dans une matière soyeuse et chaude. Je sentis une odeur douce à la place de l'odeur de la forêt. J'entendis une respiration à la place des bruits d'animaux.

J'ouvris les yeux lentement.

La première chose que je vis fût du noir. En me concentrant je remarquai que je me trouvais dans une pièce. Ma vison n'était pas encore très nette et j'avais encore les idées embrouillées. Néanmoins, en observant bien la pièce j'en déduis que je me trouvais dans une chambre, et quelle chambre ! Entièrement noire, le sol, les murs, les meubles, le plafond, les décorations et même le lit dans lequel je me trouvais. On y voyait à peine, tout était plongé dans la pénombre, mais j'arrivais à distinguer quelques éléments.

Le sol était un magnifique parquet noir brillant, les murs étaient noirs avec des motifs noirs également qui ressemblaient à des fleurs, mais je ne distinguai pas lesquelles. Les meubles étaient tout aussi sublimes, en bois noir, luxueux, admirablement travaillés, il me rappelaient des meubles des châteaux. Le plafond quand à lui était d'un noir si intense qu'on aurait dit qu'à la place il y avait un trou béant menant tout droit au néant. Cette chambre était à couper le souffle, si luxueuse, si bien décorée, si morbide aussi il fallait bien l'admettre, si noire. On aurait dit une chambre mortuaire.

Noir...Cela me rappela le manoir que j'avais vu.

Mon regard se porta sur le lit dans lequel je me trouvais. C'était un très grand lit à baldaquin, fait du même bois noir que les meubles, et tout aussi luxueux que le reste. Les draps et les oreillers étaient en soie noire, et j'avais sur moi une épaisse couverture de la même couleur, faite en poil d'un animal que je ne reconnu pas.

Stupeur encore, on m'avait enlevé mes vêtements et à la place je portais un pyjama soyeux.

On.

A cette pensée je me relevai et m'assis. Je n'étais pas seule.

Mes pensées s'embrouillèrent encore plus. Pourquoi n'étais je pas morte ?

J'étais si perdue qu'il me fallut un moment pour remarquer une masse sombre affalée à moitié au pied du lit et à moitié sur le sol.

Un monstre ? La panique me gagna. Je poussai un cri, terrifiée.

La masse sombre se mit à bouger et soudain se releva. Je distinguai alors deux yeux verts.

Ça y ai, j'étais bien morte, j'étais aux Enfers, un démon était venu me chercher... J'étais paralysée, incapable de bouger, en attente de mon sort. Cela ne m'étonnais même pas que j'ai fini aux Enfers, mais comment aurais je pu aller au paradis après tout ? Le principe même de s'ôter la vie nous fermait l'accès au paradis, d'après ce que j'avais entendu. De toutes manières, je n'étais pas très croyante. Mais il fallait avouer que cet endroit et cette créature ne ressemblaient pas à quelque chose de nécessairement bon.

« Chut, pardon je ne voulais pas t'effrayer »

Des rideaux noirs s'ouvrirent légèrement et je pus distinguer « le monstre ».

Le premier sentiment qui m'envahit fut le ridicule. Ce n'était absolument pas un monstre. C'était une personne, un humain.

Mais ce sentiment fût tout de suite remplacé par celui de la fascination.

Devant moi se tenait un homme qui devait avoir à peu près mon âge. Assez grand, vêtu d'un pantalon et d'une chemise noire. Je devinais sa minceur sous ses vêtements, mais aussi ses muscles. La peau très pâle, ses cheveux noir de jais et plutôt longs et en bataille m'évoquaient un loup, et ses yeux ... Jamais je n'en avais vu de pareils. Dire qu'ils sont magnifiques serait un euphémisme. Ils avaient la couleur de l'émeraude, ils avaient quelque chose de sublime, de surnaturel, ils paraissaient même trop lumineux pour être réels. En les regardants, je voyais le vert de l'herbe d'une prairie au printemps, le vert d'une grenouille, le vert de l'eau dans les îles, le vert d'un poisson tropical, le vert des nébuleuses de la galaxie ... Ses yeux m'hypnotisaient et m'envoûtaient. Impossible de détacher mon regard, il aurait pu y avoir une attaque nucléaire ou une invasion de zombies, je n'aurais pas bronché. Ses yeux m'inspiraient la confiance, la sécurité, mais aussi la peur.

Soudain, il toussa nerveusement.

Oh, je détournai le regard, gênée, et je me mis à fixer mes mains. Je remarquai que mon bras était entouré d'un bandage. Je ne savais absolument pas quoi faire à ce moment là, je continuais de fixer bêtement mes mains. Trop de nouvelles d'un coup, trop de choses ...Il y avait encore quelques heures je mourrais, et maintenant je me retrouvais dans un manoir, dans une chambre avec cet homme qui m'avait, de toute évidence, sauvé la vie. Mais je désirais simplement mourir ... Pourquoi ne m'avait-il pas simplement laissé, tout aurait été beaucoup mieux et je serais enfin loin.

Je poussai un soupir et me cachai la tête avec mes mains.

« Je sais, je n'aurais pas dû ... Je m'en excuse, mais je ne pouvais pas te laisser là dans la neige. »

Trop d'émotions me submergeaient. C'était si difficile de quitter ce monde ?! Je n'en pouvais plus ...

Submergée par la colère, je me levai du lit et arrachai mon bandage, mais je fus vite rattrapée par l'homme en noir.

« Non, s'il te plaît ... Dit-il tout en m'attrapant par les épaules

-Lâchez moi.

-S'il te plaît écoute moi, quoi qu'il se soit passé, ce n'est pas la solution.

-Ah oui ?! Mais taisez vous, vous ne savez rien ! Pour moi c'est la solution à mes souffrances.

-Non je te l'assure.

-Comment pouvez-vous affirmer cela, vous ne me connaissez même pas ! Vous ne savez pas ce que ça fait ! »

J'arrachai ses mains de mes épaules et courus vers la porte de la chambre. Mais avant que j'eus le temps de l'ouvrir, il me rattrapa et me tira en arrière. Je me retournai mais il me plaqua contre la porte. J'eus le souffle coupé pendant quelques secondes. Il me tenait par les épaules. Je me retrouvai à quelques centimètres de son visage, et ses magnifiques yeux verts plongèrent dans les miens. Je détournai rapidement le regard, cela me mettait mal à l'aise quand des personnes me regardaient dans les yeux, je ne voulais pas qu'elles sachent, je ne voulais pas qu'elles lisent dans mes yeux comme dans un livre ouvert.

Il parla d'une voix très calme mais avec un soupçon de colère :

« Ne dis jamais que je ne sais pas ce que ça fait de vivre ce que tu vis, compris ? »

Je ne savais pas quoi répondre à cela. Était t-il possible que lui aussi ... Ou m'avait-il dit cela juste comme ça afin de me persuader? Il continua de me regarder intensément pendant quelques secondes. J'ouvris la bouche prête à parler, mais je me ravisa, je n'avais rien à dire. Il lâcha enfin mes épaules et recula. Il attrapa mon bras et remis le bandage correctement. Il laissa échapper un soupir et reprit de sa voix calme :

« Tu peux rester ici le temps que tu auras besoin. Tu peux te balader et aller partout où bon te semble dans ce manoir, il y a tout ce dont tu as besoin. »

Il m'écarta de la porte et sortit de la chambre me laissant seule.

Je me dirigeai vers le lit et m'écroulai dessus. J'enfouis ma tête sous un des oreillers noirs.


Trop de choses. Je n'arrivais plus à penser, mon esprit était en chute libre. Mais je gardais en tête mon objectif, je ne devais en aucun cas me laisser détourner de mon but. Cette fois je réussirais, je n'échouerais pas deux fois.

Toutes les plus belles nuances du noirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant