chapitre 5

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Rick

Si ça me dérange pas... En temps normal je dirais que oui ça me dérange, et non j'ai pas envie.
Mais après ce que m'a raconté Alex sur sa propre vie, je me sens vraiment pas de me taire.

Ce mec a mis sa vie entre mes mains, faisant confiance à un inconnu pour ne pas le trahir.

Je pense que je lui dois bien un peu de franchise...

- Bon je te préviens de suite, t'attends pas à garder une super image de moi. Je suis loin du prince charmant ou du chevalier blanc.
- Mince, je me voyais déjà dans le rôle de la princesse à sauver... Tant pis. Allez je suis sûr que tu exagères.
- Je suis pas forcément de ton avis mais je te laisse juger.
Bon comme tu le sais j'ai grandi ici, mais ado j'étais un petit con ingrat qui ne voyait pas plus loin que le bout de son nez.
Je détestais devoir faire une heure de route le matin pour me rendre au lycée, ne voyant pas ce que ça générait à ma mère, qui faisait deux allers retours par jour, soit quatre heures au total.
Du coup, je détestais ne pas pouvoir rester trainer avec mes potes à la fin des cours, ou le week-end.
Je détestais le silence ambiant.
Bref je ne revais que de me barrer le plus loin d'ici.
Donc, à dix-huit ans, je me suis dit que le meilleur moyen de partir d'ici c'était l'armée, donc je me suis engagé chez les Marines.
Au début, c'était parfait. Ayant appris à tirer pour chasser étant enfant, je me suis vite fait remarquer et on m'a formé pour être sniper.
Je me suis fait plein de potes avec qui sortir alors des permissions pour draguer tout ce qui passait.
Soyons clairs, lorsqu'un troupeau d'uniforme se pointe quelque part, les culottes ont tendance à rapidement s'envoler.
Pendant des mois, j'ai cumulé les expériences, en ne me tapant jamais deux fois la même fille. Un vrai connard.
Et puis un jour, j'ai rencontré une fille qui contrairement aux autres, ne m'a pas sauté dessus, a refusé mes avance et ça a réveillé mes instincts de chasseur.
Elle m'a fait courir pendant trois mois avant d'accepter un rencard.
J'ai galéré de fou, parce que les rencards je connaissais pas, au lycée j'en avais pas l'occasion, et lors de mes précédentes expériences, j'en avais pas eu besoin. Un simple regard et les filles étaient déjà penchées devant ma queue...
Du coup, lorsqu'elle a accepté j'étais comme un dingue, complètement ferré.
Emmy, puisque c'est son nom, a fait tout ce qu'elle voulait de moi. Obtenu une relation exclusive, nous mettant officiellement en couple, même si je devais vivre à la caserne et partais en mission 9 mois par an. Ça signifie que je payais une partie de son loyer et de ses frais. La couvrait de cadeaux pour compenser mes absences. Obéissait à toutes ses demandes lorsque nous étions ensemble.
Bref j'avais un boulot génial et la petite amie de rêve.
Enfin ça c'était mon avis parce que mes potes pouvaient pas la blairer, et c'était réciproque.
Elle estimait que mes trois mois de présence sur le sol américain lui étaient dévolus, et eux estimaient que ses exigences étaient déraisonnées.
Celui qui avait le plus de mal, c'était Sam, mettez les deux dans la même pièce et c'était le clash assuré.
Mais moi ça me convenait, j'avais tout ce que j'avais toujours voulu, donc je l'ai épousée.
Les années ont passé. Lors de ma cinquième année, on m'a annoncé le décès de mes parents dans un incendie qui a rasé toutes les infrastructures de la propriété. Il ne restait rien, que le terrain.
Les voisins s'étaient chargés de l'inhumation de mes parents, puisque j'étais en mission en Syrie à ce moment là, sans possibilité de retour.
J'ai su après qu'Emmy avait été informée et conviée à la cérémonie, mais ne s'était pas déplacée. Elle m'avait dit ne pas avoir été mise au courant.
Lors de ma dixième année, lors d'un déplacement de troupes, mon équipe a été prise dans une embuscade. La moitié de mon équipe est morte, j'ai pris deux balles. Une dans l'épaule et l'autre dans la cuisse.
C'est Sam qui m'a mis à couvert ce jour là sans quoi j'y serai passé aussi. Lui avait été touché au bras légèrement.
Une autre équipe qui suivait pas loin derrière nous est rapidement intervenue, et ils nous ont permis de pouvoir être envoyés à l'hôpital pour nous faire soigner.
J'ai passé un mois en Allemagne, le temps de me remettre des opérations. Sam, était moins gravement blessé, mais souffrait de troubles post-traumatiques, légers, mais handicapants.
Mes blessures avaient laissé peu de séquelles, mais suffisantes pour m'empêcher de tenir un rôle de sniper dont l'essentiel du boulot est d'attendre allongé en position statique le temps d'avoir la garantie de toucher la cible.
On nous a également expliqué que vu notre âge avancé, 28 ans bien sûr c'est énorme, nous ne pourrions pas continuer notre carrière sur les mêmes bases.
On nous a donc laissé à tous les deux deux choix : soit intégrer les services de recrutement pour convaincre des petits jeunes en mal d'aventure de s'engager, soit retourner à la vie civile.
Dégoûtés, on a encaissé la prime de départ et on a quitté les Marines.
Je me suis dit, au moins il me reste une femme, j'ai de l'argent, je vais m'en sortir.
Bon, je crois que j'avais pas vraiment eu le nez creux dans cette histoire.
Quand j'ai dit à Emmy qu'on allait vivre ensemble à plein temps car j'avais quitté l'armée, elle a pété un câble. C'était pas sur cette base qu'avait été construit notre mariage et elle n'avait pas du tout envie de m'avoir dans les pattes en permanence.
En plus ma pension était loin d'égaler mon ancien salaire, et ne lui permettrait pas de conserver son niveau de vie, et ça elle n'en voulait pas.
48h plus tard elle me présentait un dossier de divorce.
J'étais écoeuré. Heureusement le logement qu'elle occupait n'était que loué. J'ai pris mes cliques et mes claques et je suis parti.
Je ne voulais plus voir personne, et je suis donc revenu ici.
Dégouté des Marines qui m'avaient jeté après que je leur ai tout donné, dégouté des femmes en général grâce aux bons soins de la mienne.
J'ai décidé de tout reconstruire grâce à la prime de départ que je n'avais perçue qu'après mon divorce et qu'Emmy n'a donc pas pu récupérer. Et je suis resté.
Sam est la seule personne de mon ancienne vie avec qui j'ai encore des contacts.
- Euh... J'ai le droit de traiter ta femme de salope ?
- Ouais si tu veux, je m'en suis pas privé moi-même.
- Non mais sans déconner, je comprends pas cette nana.
Sans vouloir te flatter, tu es beau, gentil, dévoué, elle veut quoi de plus ?
- Le fric et la liberté d'en profiter sans devoir rendre compte de quoi que ce soit à la personne qui le lui donne.
Je suis pas sûr qu'elle m'ai aimé un jour, et du coup je me demande si moi je l'ai vraiment aimée.
- Comment ça ?
- J'ai aimé l'image d'elle, qui au final était fausse, et j'ai aimé l'image qu'elle donnait de la réussite de ma vie.
En gros, j'ai aimé du vent...
- Hmm oui je vois... Mais bon tu n'as que trente ans, tu es sexy, tu as encore le temps de fonder un foyer avec une personne qui te convienne. Si tu te décidais à sortir un peu, je suis sûr que tu rencontrerais quelqu'un à ton goût pour partager ta vie.
- Pour l'instant, c'est pas dans les projets.
Le projet immédiat, c'est de te garder en vie, et de te faire découvrir la vie en pleine nature.
D'ailleurs il est temps de s'y mettre, les animaux attendent.
- Ok, quel est le programme ?
- Traite des chèvres, nourrissage des cochons, et libération des poules.
Ensuite coupe de bois, et on devrait avoir atteint l'heure de la pause déjeuner.
- Je suis vraiment entré dans un autre monde...
Traire des chèvres, tu es sûr que je vais réussir à faire ça ?
- Au vue de tes activités antérieures, je suis sûr que ça va te poser aucun problème.
- Mes activités... Ohhh ! Non tu déconnes.
- Non même pas. La gestuelle est pas exactement la même, mais y'a de l'idée.
- Et bien il me tarde de voir ça.
- Moi aussi !

Oh oui ! Il me tarde de le voir en action. Ça risque d'être drôle.

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