Chapitre 8 - Réveil brutal [Savannah]

32 13 0
                                    

La journée d'hier avait été juste parfaite en oubliant le rendez-vous du matin. En rentrant, Beth nous avait proposé de prendre des pizzas et de nous caler sur le patio pour le diner de ce soir. Quoi de mieux que de manger sous un ciel étoilé et de se plonger dans l'infini éclairé par une pleine lune magnifique. A la fin du repas, Beth nous souhaita une douce nuit et nous laissa Will et moi sur le patio. L'air s'était rafraichi. Je pris le plaid et m'emmitouflai dedans, et du coin de l'œil je pouvais voir que Will tirait sur les manches de son pull.

« Viens t'assoir à mes côtés, le plaid et la balancelle sont assez grands pour nous deux. »

Il me fixa puis, après avoir hésité quelques secondes, se leva et se mit sur la balancelle à côté de moi. Je lui tendis un coin de la couverture pour qu'il puisse se couvrir avec. Nous sommes restés là, sans rien dire, juste à regarder le ciel et à profiter du calme et de la chaleur du feu qui crépitait dans le braséro. Je posai ma tête sur le coussin et me laissai bercer par le bruit que faisait le vent au travers des branches. Sans que je ne m'en rendis compte, je m'endormi. Je flottais dans les airs comme si on me portait, je voulais ouvrir les yeux mais c'était impossible. Puis tout doucement, je sentis qu'on me posait délicatement et qu'une douce chaleur me recouvrit.

Je suis dans un grand loft, d'une décoration très moderne. Le couvert est mis et une femme de dos s'active à la cuisine. Je m'approche tout doucement, avec comme l'impression de connaitre les lieux mais tout reste flou. Je regarde autour de moi, un homme entre à ce moment dans la pièce. Mon père, oui c'est bien lui, passe à côté de moi et me donne un baiser sur le front.

« Aller ma chérie, va te préparer, nos invités vont bientôt arriver. »

Je le sers dans mes bras comme heureuse de faire ce geste, il me rend mon étreinte puis part à la cuisine ou je le vois enlacer la femme, qui elle reste concentrée dans sa tâche. Elle sursaute et se retourne, mes yeux s'écarquillent : ma mère se tient là, à rire avec lui. Je ne comprends plus rien, je ferme les yeux, ce n'est pas possible. Une voix douce et chaleureuse me force à les réouvrir.

« Ma chérie, tout va bien ?

- Euh, oui, je pense. Mais où sommes-nous ? » Tous les deux me regardent avec un air inquiet sur le visage. Mon père prend la parole.

« Je sais que les examens sont pour bientôt mais tu ne devrais pas te surmener pour autant. Je m'inquiète ma princesse, tu es sûre que tout va bien ? Veux-tu que j'appelle le docteur ?

- Non, pardon, j'ai eu un moment d'égarement. Promis, je vais lever le pied sur les révisions. Bon, je vais me préparer. »

Avant de partir, je me dirigeai vers eux et les serrai fort dans mes bras. Tous deux me regardèrent avec tendresse et je leur offris mon plus beau sourire. Je tournai les talons et, comme par automatisme, me dirigeai jusqu'à ma chambre. Je connais bien cette maison, mais comment cela était-il possible. La chambre était immense, des photos décoraient les murs, certains visages étaient flous, tandis que celles avec mes parents étaient parfaitement nettes. J'ouvris une double porte et tombai sur un immense dressing. Ma bouche se décrocha de ma mâchoire – comment pouvait-il y avoir autant de vêtements, tout ça m'appartenait-il ? Je fis le tour et pris une tenue soft et mis une touche de parfum en vue du repas avec des invités. Je ne comprenais toujours rien, mais je voulais juste profiter de cet instant magique. Tout à coup, la sonnette retentie.

Je me réveillai d'un bond. J'étais dans mon lit, le réveil affichait deux heures trente-cinq. Mon cœur palpitait. Que venait-il de se passer ? Était-ce un rêve ou la réalité ? J'avais pourtant comme une impression de déjà-vu, mais peut-être était-ce mon inconscient qui me jouait des tours à la suite du rendez-vous de ce matin et de la culpabilité que j'éprouvais de les avoir oubliés. J'avais la gorge sèche, je décidai d'aller à la cuisine pour me servir un grand verre d'eau, ce qui me fit du bien et calma mes palpitations. En remontant, je fis une petite halte par la salle de bain pour me passer de l'eau sur le visage. Puis je repartis me plonger sous mon épaisse couette pour essayer de finir ma nuit.

Nous passâmes à table. J'étais assise à côté de ma mère et je ne pouvais m'empêcher de la regarder. Je respirais son parfum, qui avait une touche de vanille, de fleurs et d'agrumes, me faisant penser à un beau jour d'été. Mon père était assis en bout de table à côté d'elle, et en face de moi se trouvait l'homme de ce matin, « Brad », qui était accompagné d'une fille de la moitié de son âge. Sa présence me mettait mal à l'aise sans pour autant savoir pourquoi. Le repas se passa très bien, les hommes parlaient affaires et moi j'écoutais ma mère parler avec la miss bimbo. Une fois le repas fini, j'aidai ma mère à débarrasser la table et à faire la vaisselle pendant que miss monde regardait ses ongles et que les deux hommes se posaient au salon pour continuer leur discussion, un verre de digestif à la main. Je rigolais avec ma mère, on parlait de tout et de rien quand d'un coup, le bruit d'un verre que l'on éclate au sol me fis tourner la tête.

« Mais tu es fou. » hurla Brad sur mon père. « Comment peux-tu me faire ça ? Et si moi je ne suis pas d'accord avec ça, que se passera-t-il ?

- Nous en avons parlé longuement avec Hélène et notre décision est prise. Après que Savannah soit diplômée, nous vendrons nos parts ainsi que le loft à Walter, et nous retournerons vivre en France. Même si tu n'es pas d'accord, rien ne change pour toi, tu seras juste associé à une autre personne et ne t'inquiète pas, c'est un mania des affaires, il s'y connaît très bien. » Brad jura sur mon père qu'il ne le laissera pas faire, appela sa potiche et tous deux sortirent en trombe de la maison en claquant la porte.

J'ouvris les yeux, toujours sous le choc de mon cauchemar, et mis du temps à voir Will et Beth qui se tenaient devant moi. Tous les deux avaient un air très inquiet sur le visage. Beth s'assit sur mon lit, me prit la main et me demanda d'une voix douce et calme.

« Ma chérie, tout va bien ? Que se passe-t-il ? Nous t'avons entendu crier d'en bas. »

Mon souffle était rapide et je ne trouvai rien à répondre, je m'étais juste mise à pleurer. Je ramenai mes jambes vers mon buste et me cachai le visage dans le creux de celles-ci.

« Calme toi mon enfant, chut, voilà comme ça, détend toi. » Ma tête reposait sur l'épaule de Beth et elle caressait mes cheveux tendrement. « Si tu as besoin de reprendre tes esprits, nous te laissons un peu tranquille et nous t'attendons en bas pour un bon café. » me dit-elle en me caressant les cheveux. 

Une vie oubliée et sauvéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant