Saya et Arabell
Saya et Arabell étaient comme ça.
Aussi loin qu'ils puissent se rappeler, la population les avait toujours vus ainsi. En compétition depuis leur plus jeune âge, chacun s'était habitué à les voir se mettre au défi, tous les y avait encouragés.
Car Saya et Arabell étaient les enfants de la destinée. L'un ou l'autre serait porté aux nues, deviendrait un jour le digne représentait du grand dieu Râ, dieu du soleil. Très vite, l'un d'entre eux aurait l'honneur d'être désigné son messager.
Ainsi, depuis leur toute petite enfance, leur famille les faisait se concurrencer. D'abord simple compétition, ce fut bientôt devenu un jeu pour les deux jeunes égyptiens. Et si chacun dans ce petit village au bord du nil avait sa préférence pour le futur messager, au fond, ils savaient que les deux étaient à la hauteur de la mission divine.
La chaleur au bord du fleuve était forte, en ce jour d'été. Peu de personnes traînaient dehors. Pourtant, Saya et Arabell, après s'être couru après pendant près d'une demi-heure, se défiaient : celui qui ferait le plus de pompe sur le côté aurait gagné. Arabell abandonna le premier, la chaleur eut raison de lui. Saya triompha, intérieurement très heureuse d'enfin pouvoir s'arrêter tant la température était insupportable.
Personne ne savait jamais qui de Saya ou Arabell gagnerait le prochain défi. De force et d'intelligence égale, tout dépendait de leur fatigue, humeur et désir de jouer. Pourtant, à bientôt dix-neuf saisons des pluies, l'un comme l'autre savait que le jour du choix approchait à grands pas. Bientôt, l'un d'entre eux deviendrait le messager de Râ. Bientôt, l'un d'entre eux récolterait tout les honneurs. Bientôt, l'un d'entre eux serait trop occupé pour continuer de jouer avec l'autre. Bientôt, les deux regretteront leur enfance passée trop vite, bien qu'ils ne se l'admettront jamais en face, trop fiers pour s'avouer avoir apprécié ces années de complicité.
Saya et Arabell étaient comme ça.
À à peine quelques centimètres l'un de l'autre, la respiration forte, la sueur leur dégoulinant sur la peau sans qu'ils n'y prêtent attention, les gouttes salées tombant sur leurs lèvres, desséchant la peau fragile sans qu'ils ne s'en aperçoivent, trop concentrés sur les pupilles dilatées de l'autre alors que le soleil se couchait derrière les pyramides. Moment hors du temps, durée inestimable. Moment hors du temps, vite oublié dès les chemins séparés.
Saya et Arabell étaient comme ça.
écrit il y a longtemps après un rêve, terminé le 3 janvier 2024
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Je fais collection de stylo-plumes [RECUEIL]
AcakJe fais collection de stylo-plumes. J'en ai de toutes les sortes, de toutes les tailles. Et quand j'en ai besoin, j'en attrape un et j'écris, gratte le papier. La feuille se remplit, se remplit de mes mots. Grisée, j'écris de plus en plus vite, de p...