Nouvelle numéro 3 : Chapitre d'une nuit

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1 h 47 – Avant de dormir :

Tu es là, en train de dormir. Dans les bras de Morphée, un sourire en coin. Tu aimes ça, dormir. Et tu aimes ça, sourire depuis le premier jour. Pour ma part, je n'arrive pas à trouver le sommeil, perturbé par notre journée. Nous sommes si loin de chez nous. Mon appartement me manquerait presque ; je ne suis pas habitué à ce genre de voyage. J'écris « mon appartement » comme s'il était uniquement le mien, alors que nous partageons 70 m2 depuis près de 8 mois.

Pendant le trajet, ta tête était sur mon épaule. En réfléchissant à cette situation, je ne pourrais pas te dire si j'avais un diable ou un ange bienveillant sur mon épaule. Tu étais si paisible, alors que moi, je réfléchissais à mille choses comme à mon habitude. C'est ce trait de caractère que tu détestes chez moi. Pour moi, c'est celui qui me permet de sécuriser notre situation. Oui, c'est une excuse. Réfléchir me permet d'imaginer des milliers de scénarios possibles. C'est un piège ; à force de me questionner, j'en oublierais même de vivre. Je pourrais même oublier de respirer en réfléchissant trop. Pendant ce trajet, mon regard se perdait dans les paysages qui défilaient à toute vitesse, comme si j'étais sur le char d'Apollon. Mais toi, tu étais là à mes côtés.

Tu m'as pris par la main pour que je te suive dans cette aventure. Mais pour moi, les seules aventures que j'ai vécues sont celles qui marquent à jamais une âme. J'ai créé différentes épopées dans des univers tellement variés. Mais cette fois-ci, c'est mon Odyssée, la nôtre. Et au fond, je pourrais même te détester, car aujourd'hui, toutes les musiques parlent de toi. L'amour me dépasse tellement. C'était la cause de toutes mes déprimes, comme une malédiction d'Aphrodite, alors pourquoi cela changerait-il ? Je parle d'amour sans réellement pouvoir mettre le curseur sur une bonne définition. Je parle de ce sentiment sans savoir réellement l'impact qu'il a dans une vie.

Quand le train s'est arrêté, tu as mis une bonne minute avant de t'extirper de ton rêve. À croire que tu étais dans un autre monde, un monde idéal. Sûrement un endroit qui répond à toutes tes attentes sociales et humaines. Un paradis qui suit à la lettre tes idées les plus profondes. Un monde de perfection, un monde où je n'ai pas ma place. Je t'ai fait croire que moi aussi j'avais eu l'occasion de me reposer. Mais dans ta réaction, j'ai bien compris que tu savais que ce n'était qu'une fausse réponse, comme si tu avais la sagesse d'Athéna. Mais l'un de nous devait veiller sur nous, alors cette fois-ci, c'était mon rôle. Et je te dois bien ça, à toi qui m'as sauvé. Sur le quai d'arrivée, tu t'es dissipée dans cette foule d'individus. Et moi, j'étais là dans ton ombre à contempler la réponse à toutes mes questions. À regarder celle qui a pansé mes maux comme une guérisseuse d'Asclépios.

Quand je regarde le paysage par la fenêtre de notre Airbnb, les architectures célestes, semblables à celles des palais d'Asgard ou des temples de l'Acropole m'apaisent. Un peu comme cette relation. Je me sens vivre ; c'est donc ça la paix intérieure ? Mes cicatrices n'ont plus le goût amer d'autrefois. Ça fait bien longtemps que je n'ai pas pleuré. Je ne regrette pas ce rendez-vous sous le froid polaire. Celui où nos dents claquaient à cause du froid. J'aimerais revenir à ce moment, sans dire un mot, rester là. Je ne voulais pas te rencontrer par peur. Puis moi, je déteste les rencontres, je trouve ça affreux. Elles commencent par de brèves présentations, mais comment pouvais-je me présenter alors que j'étais, pour moi-même, une énigme ? Les rencontres donnent naissance à des relations Les relations, c'est une partie d'échecs. Un échiquier où deux joueurs défient le destin, s'il existe. Si l'accord ne résonne pas, le destin nous place en échec et mat. Alors commence la conclusion. Les conclusions font mal. Je ne voulais pas te rencontrer, influencé par celles qui me murmuraient de ne pas le faire. Car j'ai connu trop d'échecs et mat, à en perdre des bouts de vie.

Tu viens de me dire d'aller me coucher, toujours avec cette voix apaisante. Comment puis-je conclure ce bout de lettre que je ne te donnerais jamais ?


La vie est belle

Au Fil de mon EncreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant