Nélio ou Linéo

Chapitre 21 : Nélio

Mercredi 17 octobre

Je sors du collège le plus rapidement possible. Je cours jusque chez moi.

J'entre et mon frère me saute dans les bras en criant mon prénom. Je le porte jusqu'au salon et l'installe sur le canapé.

Puis je monte dans ma chambre en espérant avoir le temps de m'enfermer avant qu'il revienne à la charge.

Heureusement pour moi, j'ai été assez rapide et quand il arrive, je suis déjà barricadé.

Je m'installe en tailleur sur mon lit et sors Titus de ma poche.

-Enfin, j'étouffais ! râle-t-il en prenant une grande bouffée d'air.

Je le pose sur mon oreiller. Il s'installe confortablement.

-Ton père est donc un chumain. Il a la faculté de passer d'une forme féline à humaine et inversement quand bon lui semble. Et comme c'est un gène héréditaire, il y a de fortes chances que tu le puisses aussi.

-Mais pourquoi m'a-t-il menti et est parti ? demandé-je.

-Il a été nommé chef de la forêt à la mort de son prédécesseur. L'Union Dorée l'a choisi et il voulait assumer pleinement ses nouvelles fonctions. Il est alors parti de cette maison pour s'installer dans la forêt, explique Titus.

-L'Union Dorée ?

-Une Union de chats dans la forêt de ton village. Un peu comme une famille qui se soutient.

-Il a donc choisi cette famille plutôt que la sienne ? Il aurait pu revenir de temps en temps !

-Il saura mieux te répondre que moi là-dessus.

-Il va revenir ?

-Non, mais j'ai pour 2ème mission de te ramener avec moi pour le voir, continue le petit être.

-Il se cachait à quelques mètres de chez nous en nous faisant croire qu'il était à l'autre bout de la planète ce qui l'empêchait de pouvoir nous voir. Et c'est moi qui doit me déplacer ! m'emporté-je.

Il écarquille les yeux et se redresse, comme bouleversé. J'ai dit quelque chose de choquant ?

-Si je m'attendais à ça, finit par dire Titus.

-Qu'est-ce qu'il y a ? Ça t'étonne que j'ai de la répartie ? Je te rassure, moi aussi.

Il rigole.

-Tu n'es pas qu'un simple chumain, ton regard le prouve. Tu es quelqu'un de très important dans le monde félin, annonce-t-il.

-C'est-à-dire ?

-Il faut que tu viennes avec moi, ton père t'expliquera tout. Tu dois te transformer en chat.

-Mais je n'ai jamais fait ça ! Et comment tu peux être sûr que je suis un chumain d'ailleurs ? protesté-je.

-Je te l'ai dit, ton regard. Il est animé par des flammes dorées quand tu as un surplus d'émotions, qu'elles soient positives ou négatives.

-Je ne comprends pas

-Ce n'est pas grave, pour l'instant. Il faut que tu te concentres beaucoup sur le physique d'un chat jusqu'à ressentir des picotements dans ton corps. Ça risque de te faire mal à la tête mais tu dois rester concentré sinon il faudra recommencer, explique Titus.

-Et si ça ne marche pas ?

-Comme c'est ta première transformation, je vais te transmettre un peu de mon pouvoir, ça diminuera les maux de tête. Et puis tu as un pouvoir plus élevé que les autres chumains, ça devrait le faire plutôt facilement. Tu permets que je monte sur ta tête ?

-Euh d'accord, je te fais confiance, concédé-je.

Il monte le long de mon bras puis s'agrippe à mes boucles rousses comme à des cordes et se hisse sur mon crâne.

Il prend quelques cheveux dans ses petites mains.

-Tu es prêt ? demande le petit être.

-J'imagine, dis-je.

Il rigole.

-Vas-y, concentre-toi au maximum. Ferme les yeux, c'est plus simple, me conseille Titus.

-D'accord.

Je ferme les paupières et focalise mon esprit sur un chat. Je le détaille de la pointe des griffes jusqu'au bout de ses moustaches.

Je sens un frisson naître petit à petit à l'extrémité de mon pied droit.

Puis d'un seul coup, il se répand dans tout mon corps comme une flamme devient brasier en l'espace d'une seconde.

Je sursaute.

-Reste concentré, me murmure Titus.

Je sens se pointer un mal de crâne. Ma tête commence à tourner affreusement.

Les picotements sont très forts et recouvrent toute la surface de mon corps.

Et d'un coup, tout s'arrête.

-Bravo ! Du premier coup, c'est rare ! Ton pouvoir est vraiment exceptionnel ! s'exclame le petit être.

Je ne sens plus mon corps comme avant. J'ouvre doucement les yeux.

Je n'ai plus autant de différence de taille avec Titus, c'est perturbant.

Je me tourne vers mon miroir et reste immobile devant.

J'ai des oreilles que je peux pivoter dans tous les sens ! Mes yeux ne sont que deux petites fentes noires entourées de belles flammes dorées.

Mon pelage est roux clair comme mes cheveux.

Le faisceau de lumière venant de la fenêtre s'abat sur mes poils et les fait briller. Ils ondulent et j'ai l'impression d'avoir un pelage de flammes.

Derrière moi, ma queue fouette l'air.

Titus se tient fièrement sur mon crâne.

-Allez viens on y va, dit-il. Il ne faut pas que ton frère te voit comme ça.

-Comment on sort sans qu'il nous voit ? En plus, ça m'étonnerait que je puisse pousser la chaise qui bloque la poignée avec ce corps.

-On passe par la fenêtre.

-Mais on est au premier étage ! m'exclamé-je.

-Effectivement, mais il y a un arbre collé à ta fenêtre. Tu es un chat, descendre un arbre ne devrait pas te poser trop de problèmes, je te rappelle.

-Si tu le dis.

Rien qu'ouvrir la fenêtre nous prend 5min. Je monte sur le rebord.

-Regarde, il y a une branche qui est reliée au bord, me montre Titus.

Peu confiant, je monte dessus et entame la descente. Au fur et à mesure que j'avance, je prends de l'aisance.

J'arrive en bas, fier de moi.

Suivant les indications de mon guide, je sors dans la rue. Une chatte blanche nous attend visiblement.

-Salut Linéo ! Enchantée, moi c'est Blanche.

-Linéo ? m'étonné-je.

-Ton nom de chat, dit Titus.

Le petit être saute dans le pelage de Blanche et s'y enfouit.

-Allez viens, lance la chatte en s'engageant sur la route pour traverser.

-Où est-ce qu'on va ? demandé-je en lui emboîtant le pas.

-Bah.. Voir ton père, rigole-t-elle.

Blanche se met à courir et je peine à la suivre. Nous longeons les trottoirs.

Elle tourne un coin de rue. Je la rattrape 30 secondes plus tard. Elle m'attend.

Mon attention est attirée par quelque chose à ma droite.

Je tourne la tête et mon regard se retrouve plongé dans celui d'Ayden, assis sur un banc avec sa soeur.

Il écarquille les yeux. Mon cœur s'affole.

Sait-il qui je suis ?