Chapitre 18 - Vincent

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Vous croyez aux contes de fées? Moi pas! Pourtant j'en vis un depuis plusieurs semaines. Notre semaine de vacances à la montagne nous a indéniablement tous rapprochés. Pourtant depuis notre retour j'ai cette sensation étrange que quelque chose va tout briser. C'est trop beau pour être vrai. Chaque matin je les regarde attendri avant d'aller travailler. Béné dépose Léo à la crèche un peu plus tard, lui permettant de se reposer et le récupère en début d'après midi. Elle et Marcus calent leurs plannings pour garder mon fils à tour de rôle. Je fais une économie non négligeable grâce à eux et Léo semble plus serein, plus épanoui. Il a ces attaches qu'il n'avait pas à la crèche où le personnel change sans cesse. Ici, il a ses repères et cela l'apaise considérablement.

Ce soir, c'est Béné qui confirme mon malaise naissant. Nous sommes dans son lit enlacés lorsqu'elle me demande si j'ai eue des nouvelles de Jessica. Je me renfrogne lorsqu'elle prononce son nom, je ne veux plus ni parler ni penser à elle. 

- J'ai la sensation qu'on m'épie depuis qu'on est rentré de la montagne, m'avoue t elle.

- C'est parce que les derniers jours d'appel de Jessica approchent, tu as inconsciemment peur qu'elle demande sa garde, je tente de la rassurer. Personne ne nous le prendra, je te le promets.

J'embrasse son front et la serre un peu plus fort me voulant réconfortant. Pourtant je ne pense pas à un mot de ce que je viens de dire. Moi aussi, j'ai un mauvais pressentiment. Je ne me sens pas épié mais j'ai cette sensation au fond des entrailles qu'on va tout m'arracher d'une minute à l'autre. Je dois agir pour que ça cesse et vite.

Le mois suivant passe à une vitesse folle. Je rentre un peu plus tard tous les soirs dans l'espoir de rasséréner ses craintes, les cartons s'accumulent dans chacun de nos appartements puis le grand jour arrive. Fin février, nous emménageons tous les 4 dans NOTRE maison. La cohabitation qui s'ensuit est dangereusement calme et apaisante. La date limite d'appel de Jessica est passée depuis longtemps pourtant je me sens toujours pris au piège. Quelque chose m'échappe mais je n'arrive pas à mettre le doigt dessus. Quant à Béné, elle semble moins inquiète, elle ne me parle plus jamais de Jessica. 

Fin Mars nous fêtons les un an de Léo. Toute la famille est réunie pour l'occasion, et comme à chaque fois c'est un moment merveilleux, tendre et bien trop doux. Pourquoi je n'arrive pas à me détendre complétement? J'appréhende toujours la suite, tout est beaucoup trop beau, beaucoup trop simple. La maison pu le bonheur et l'amour, Léo dit quelques mots et fait ses premiers pas. Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Mais la vie n'est pas un long fleuve tranquille, n'est ce pas? La vie est faite d'embûches et ce jour là c'est un tsunami qui nous submerge.

Marcus entre dans la cuisine alors que nous déjeunons tranquillement. Béné face à moi fronce les sourcils en voyant la tension apparente émanent de son ami. Léo joue avec ses petits pois dans sa chaise haute. Marcus s'éclaircit la gorge avant de nous demander :

- Hmm, euh, est ce que je peux faire venir quelqu'un ici?

- Tu es chez toi, ici, Amor, roucoule Béné. Tant que tu ne transformes pas le salon en baisodrome, tu as le droit de ramener qui tu veux, enfin!

Je n'ai jamais vu le surfeur si gêné, il pose ses yeux d'un bleu profond sur moi attendant mon aval également. Je souris en coin, il est amoureux! Je ne vois que ça, ce n'est pas un plan cul qu'il veut ramener! 

- Tu nous le présente quand? je lui demande nonchalant.

Il rougit, j'en reste coi. Béné ouvre de grands yeux en arrivant à la même conclusion que moi avant de sauter en l'air comme une folle. La sonnette retentit et tout le monde se figent.

- C'est lui, souffle Marcus, un sourire étirant ses lèvres.

Il quitte la cuisine pour aller accueillir son petit ami. Béné est aussi excitée que le soir de Noël.

- Il ne m'a jamais présenté personne, me confie t elle les yeux brillants. Sois gentil, hein?

- Pourquoi je serais méchant? je râle vexé.

- Parce que tu es Vinçaigri, se marre t elle en embrassant ma joue avant de débarrasser la table.

- Maman.

Béné se fige et j'ouvre de grand yeux. Léo a ses yeux rivés sur elle et lui tends son assiette. C'est la première fois qu'il prononce ce mot correctement. Elle est "mama néné" depuis des mois. Des brides de conversations nous parviennent de l'entrée, pourtant toute notre attention se porte sur mon petit bonhomme. Mon cœur se gonfle un peu plus de bonheur et ça me terrorise, il va finir par exploser avec eux tous. 

Marcus entre dans la cuisine et nous regarde intrigué.

- Maman, répète Léo en agitant les bras.

- Oh bah merde, lâche Marcus. Euh... je vous laisserais bien savourer votre bonheur mais ... j'aimerais vous présenter Dylan.

Il se décale pour nous laisser découvrir son ami. Je me lève et vais me présenter. J'ai réussi à garder mon expression de surprise pour moi. Dylan est l'exact opposé de Marcus, petit, mince, brun avec des lunettes. Béné se contrôle moins et garde la bouche bée un moment avant de se décider à bouger et le saluer. 

- Heureusement pour vous, j'ai préparé des tiramisus pour un régiment, déclare Béné détendant l'atmosphère.

Les garçons s'installent autour de la table et nous mangeons le dessert tous les 5. Ils nous racontent alors comment ils se sont rencontrés à l'hôpital lors d'une intervention de Marcus.

- On a ramené les blessés aux urgences et c'est Dylan, le nouveau médecin urgentiste, qui était de garde ce soir là. 

- Hannn, trop chou, s'extasie Béné alors que je ricane.

- C'est d'un niais, je me moque.

- Tu peux parler toi, rappelles nous voir comment tu as rencontré Poussinette?, contre attaque Marcus.

Je grimace avant d'avouer :

- Elle est venue m'engueuler parce que mon fils l'empêchait de dormir et m'a demandé d'aller prendre une douche parce que je sentais le fennec. Ok, vous avez gagné celui là, je concède.

- Elle est belle votre histoire, nous dit Dylan. Vous avez beaucoup de chance de vous être trouvé. 

L'après midi s'étire autour des deux hommes. Dylan est sympathique, un peu timide et encore sur la réserve mais c'est un mec bien et Marcus est complètement accroc. Léo n'a pas dormi de l'après midi ce qui ne lui ressemble pas et bien sûr il commence à être grognon.

- Tu sais quoi? On va aller se promener tous les deux mon petit monstre. Pendant ce temps les trois zigotos ici présent auront la bonne idée de préparer le dîner, dit elle à Léo en nous lançant un regard lourd de sous entendu.

Marcus opte pour un risotto, Dylan et moi l'aidons, tels ces commis de cuisine. Le surfeur me regarde en coin, jaugeant de mes réactions face à son intello à lunette.

- Vous vous êtes bien trouvé, je lui lance avec un clin d'œil.

Le sourire sincère qu'il m'offre m'attendrit. Je regarde ma montre, bientôt 19h. Béné et Léo sont partis depuis 2 heures déjà, je fronce les sourcils et regarde mon téléphone mais rien, pas de message ni d'appel. J'interpelle Marcus qui vérifie mais rien non plus alors je décide l'appeler. Je tombe sur sa boîte vocale, une fois, deux fois, trois fois. Et là je comprends. Je vois l'onde océanique provoquant un raz de marée se diriger vers moi. Je suis enseveli et je suffoque. L'eau s'infiltre dans mes poumons me noyant à petit feu. Ca brûle, c'est douloureux mais ce n'est rien comparé à ce qui m'attend.

UNE FAMILLE OU RIENOù les histoires vivent. Découvrez maintenant