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Le procès fut une bataille acharnée entre moi et le procureur, un homme redoutable qui s'appelait Antoine Lefèvre. Il était réputé pour être l'un des meilleurs magistrats du pays, ayant remporté de nombreux procès difficiles. Il était impitoyable, habile, charismatique. Il savait captiver la foule, manipuler les jurés, déstabiliser les témoins. Il était mon adversaire le plus coriace, et il ne me faisait aucun cadeau.

Dès le début, il prit l'ascendant sur moi, exposant les faits avec force détails, soulignant la culpabilité évidente de mon client. Il présenta les témoins, les experts, les pièces à conviction, les enregistrements, les photos, les rapports... Tout semblait accabler mon client, qui restait impassible sur son banc.

Le tribunal était bondé de monde, qui suivait le procès avec intérêt. Les journalistes étaient présents en nombre, prêts à relayer le moindre rebondissement. Les proches de la victime étaient assis au premier rang, affichant leur douleur et leur colère. Les amis de mon client étaient dispersés dans la salle, affichant leur soutien et leur confiance. Le juge présidait la séance avec autorité, veillant au respect des règles et des droits. Les jurés écoutaient attentivement les arguments des deux parties, essayant de se faire une opinion.

- Mesdames et messieurs les jurés, dit le procureur d'une voix grave et persuasive, vous avez devant vous un homme qui a commis l'acte le plus odieux qui soit : il a tué sa femme, la personne qu'il était censé aimer et protéger, dans un accès de rage et de jalousie. Il a profité de son absence pour lui asséner un coup fatal avec un trophée qu'il avait reçu pour ses performances professionnelles, symbole de son égoïsme et de son arrogance. Il a ensuite tenté de maquiller son crime en faisant croire qu'il était sorti faire un jogging, alors qu'il avait en réalité rejoint sa maîtresse, une jeune secrétaire qui travaillait pour lui. Il a menti à la police, à la justice, à vous. Il n'a montré aucun remords, aucune compassion, aucune humanité. N'est-il pas évident, mesdames et messieurs les jurés, que cet homme est un assassin, et qu'il mérite la sanction la plus sévère ?

Le procureur ponctua son discours d'un regard accusateur vers mon client, qui ne broncha pas. Il se tourna ensuite vers moi, avec un sourire narquois. Il savait qu'il avait marqué des points, et il me défiait de le contredire.

À mon tour, je pris la parole, essayant de convaincre les jurés que mon client était innocent. Je plaidai avec éloquence, utilisant tous les arguments possibles pour semer le doute dans leur esprit. Je contestai les preuves, je discréditai les témoins, je soulignai les incohérences, je suggérai des pistes alternatives, je jouai sur les émotions... Je fis de mon mieux, mais je savais que c'était peine perdue. Mon client était coupable, et je le savais.

- Mesdames et messieurs les jurés, dit-je d'une voix calme et posée, vous avez devant vous un homme qui a été victime d'une machination, d'un piège, d'une injustice. Il a été accusé à tort du meurtre de sa femme, la personne qu'il aimait et respectait, sans aucune preuve irréfutable. Il a été désigné comme le coupable idéal, par un ennemi jaloux de sa réussite, qui a voulu le faire tomber. Il a été manipulé, trahi, sali. Il a dit la vérité, à la police, à la justice, à vous. Il a montré du courage, de la dignité, de la loyauté. Ne serait-il pas injuste, mesdames et messieurs les jurés, de condamner cet homme, alors qu'il n'a rien fait de mal, et qu'il a tout perdu ?

Je ponctuai mon discours d'un regard confiant vers mon client, qui me fit un signe de tête. Je me tournai ensuite vers le procureur, avec un sourire défi
ant. Je savais que je n'avais pas convaincu les jurés, mais je ne voulais pas lui donner le plaisir de me voir abattu.

Le procès se poursuivit pendant trois jours, durant lesquels le procureur et moi nous affrontâmes sans relâche. Il multiplia les attaques, les coups bas, les provocations. Il essaya de me faire perdre mon sang-froid, de me faire commettre des erreurs, de me faire douter. Il me poussa dans mes retranchements, me mettant à rude épreuve.

Je résistai tant bien que mal, ripostant avec intelligence, finesse, audace. Je cherchai la faille, le point faible, le rebondissement. Je me battis avec acharnement, espérant un miracle, un coup de théâtre, une révélation.

Ma stratégie était simple : semer le doute. Je savais que je ne pouvais pas prouver l'innocence de mon client, mais je pouvais essayer de démontrer que l'accusation n'avait pas de preuve solide. Je m'attaquai donc aux éléments du dossier, un par un, en les remettant en question, en les relativisant, en les interprétant différemment.

L'ADN de mon client sur l'arme du crime ? Il pouvait provenir d'un contact antérieur, ou avoir été déposé volontairement par le véritable meurtrier. Le fait que mon client se soit disputé avec sa femme le soir du meurtre ? Il s'agissait d'une simple querelle sans conséquence, qui n'avait rien à voir avec le crime. L'alibi de mon client, qui affirmait être sorti faire un jogging ? Il était corroboré par plusieurs témoins, qui l'avaient vu passer près du parc. La maîtresse de mon client, qui travaillait pour lui ? Il s'agissait d'une relation sans lendemain, qui n'avait pas de lien avec le meurtre.

Je fis témoigner plusieurs personnes, qui confirmèrent mes dires. Je fis appel à des experts, qui nuancèrent les conclusions de l'accusation. Je fis valoir que mon client n'avait aucun mobile, aucun intérêt, aucune raison de tuer sa femme, qu'il aimait sincèrement. Je fis ressortir que mon client était un homme respectable, un chef d'entreprise reconnu, un citoyen exemplaire. Je fis appel à la compassion, à la raison, à la justice.

Mais le procureur ne se laissa pas faire. Il contre-attaqua avec vigueur, démontant mes arguments, réfutant mes témoins, ridiculisant mes experts. Il fit témoigner plusieurs personnes, qui accablèrent mon client. Il fit appel à des experts, qui confirmèrent les conclusions de l'accusation. Il fit valoir que mon client avait un mobile, un intérêt, une raison de tuer sa femme, qu'il trompait sans scrupule. Il fit ressortir que mon client était un homme violent, un chef d'entreprise sans scrupule, un citoyen indigne. Il fit appel à la colère, à la peur, à la vengeance.

Il fut particulièrement efficace lorsqu'il interrogea la maîtresse de mon client, une jeune femme blonde qui s'appelait Julie.Il la fit pleurer, la fit avouer, la fit accuser. Elle raconta qu'elle avait eu une liaison avec mon client, qui lui avait promis de quitter sa femme. Elle raconta qu'elle avait été témoin de la dispute entre mon client et sa femme, qui avait dégénéré en violence. Elle raconta qu'elle avait reçu un appel de mon client, qui lui avait dit qu'il avait tué sa femme, et qu'il voulait la voir. Elle raconta qu'elle avait eu peur, qu'elle avait prévenu la police, qu'elle avait rompu avec lui.

Le procureur la remercia, la consola, la félicita. Il se tourna vers les jurés, avec un air triomphant. Il leur dit qu'ils avaient entendu le témoignage accablant d'une femme qui avait été manipulé par mon client.

Il m'écrasait, il me pulvérisait en me regardant avec un sourire victorieux. Il avait tous les éléments, tous les témoignages, tous les raisonnements. Il avait le jury, le juge, le public. Il avait tout pour triompher, et moi rien pour me défendre. Il pensait que c'était fini, que j'étais vaincu, que j'allais succomber. Mais il me restait une ultime ressource en main, une ressource à double tranchant et incertaine. Je ne pouvais que miser sur la providence, mais je ne voulais pas renoncer, j'étais déterminé à défier le destin. C'était quitte ou double.

Relation sous contratOù les histoires vivent. Découvrez maintenant