Un îlot aux Enfers

Chapitre 13

Nous passâmes plusieurs rues avant de tomber sur un magasin qui nous a intéressé. Pour être honnête, le premier magasin qui m'intéressais moi. Karma avait déjà été satisfait avec une bonne dizaine de boutique.

    Mais je voulais trouver un endroit qui proposait un choix presque illimité. Quand je poussais la porte du magasin La grenouille du Temple, une petite clochette sonna et une veille dame sortit sa tête de derrière le comptoir. Karma, en la voyant, se retint in extremis de me lancer une pique. Je souris, ravi d'avoir pu le couper dans son élan.

- Bonjour !

Nous lui répondîmes.

- Vous êtes ici pour les kimonos je présume, demanda la madame avec un sourire espiègle en remarquant que nous n'étions pas d'ici.

- Oui.

Elle désigna le fond de sa boutique, d'abord le couloir de gauche, puis le couloir de droite.

- Pour vous, ma fille, ce sera à gauche. Pour le jeune homme se sera à droite.

Je rougis. Ce n'était pas du tout la première fois que ça m'arrivait dans ma vie mais avec Karma...

Un rire explosa près de mon oreille, à moitié étouffé par la main du roux. Bien sûr. Je soupirais et cachai mon visage dans mes mains. Bon sang, c'était gênant. Pourtant c'était évident qu'un malentendu pareil m'arriverait tôt ou tard. La vielle dame regardait Karma avec un petit sourire confus. Elle se demandait sûrement ce qui avait causé son fou rire.

Je marmonnais :

- Excusez-moi, je suis un homme...

Les yeux de la dame s'arrondirent un peu et elle rit aussi, en s'excusant de son erreur. Elle nous indiqua donc la droite en nous disant de prendre notre temps. Elle avait bien raison de le dire.

Quand je vis le fond du magasin, je restai bouche bée. J'avais l'impression de me retrouver dans un océan fait de tissus et de couleurs. Je fis un grand sourire à Karma qui cessa brusquement de rigoler.

- Non.

- Si.

- Tu n'oserais pas...

- Bien sûr que si !

Et je me jetais dans les tenues avec excitation. Ma tâche du jour était de trouver le kimono le plus coloré, le plus flamboyant, le plus rocambolesque du magasin. Et s'il pouvait avoir les motifs les plus bizarres, c'était encore mieux.

    Ainsi passèrent trois heures. Je tendais des piles et des piles de vêtements que Karma essayait avec une larme dans les yeux, râlant et boudant comme un enfant qu'essayait d'habiller sa méchante matrone. Je riais à chaque nouvelle apparition. Un tissu bleu avec des oursons sur les manches qui fit rougir Karma. Un kimono à l'haori vert pomme à fanfreluches qui souleva des protestations outrés.

Au fil des tenues, Akabane se prit au jeu, finalement plus amusé qu'inquiet. Lunettes pailletées sur le nez, moustache à la manière des années 80 européennes, je finis par prendre le rôle d'un manager qui commentait le tenue, le physique et la démarche du top-modèle du jour.

Je riais à en avoir mal au ventre.

A la fin, mon choix s'arrêta sur un kimono rose bonbon qui était décoré de pompons violets à l'obi. Sur le bas du vêtement et autour des coutures, des quenouilles avaient été tissé en plus de quelques crapauds cornus. Pour être tout à fait sincère, la tenue rendait plutôt bien sur Karma. Elle rehaussai son teint de pêche et marquai la couleur de cheveux. En plus de montrer la grande taille du roux, elle précisait ses épaules robustes, tout en faisant ressortir les traits coupés de son visage.