« Il l'abhorrait si fort qu'il l'écrivait »
La précision était le mot d'ordre. Il fallait que tout soit comme il l'imaginait. Que tout soit rangé clairement, purement. La gouache était épaisse sur la palette et le pinceau ne cessait d'y faire des allers-retours. Rien ne devait fauter. Pas maintenant que le final se rapprochait dangereusement. Le rouge rencontrait le vert pour former un brun plutôt chaud. Le bleu se mêlait au rose précédemment réalisé pour faire ressortir un violet somme toute éclatant. Tout était en place. Il allait pouvoir terminer.
Jungkook, écouteurs dans les oreilles comme à son habitude, voulait que son projet se parachève aujourd'hui. La toile était d'une taille modeste, alors il ne doutait pas de sa réussite. Son sujet était parfait, ce n'était pas le moment de tout saccager. D'un geste assuré, il asséna son premier coup de peinture sur la surface griffonnée. Fluide et franche, son arme combattait la blancheur du tissu. Au rythme de la musique tonitruante qu'il écoutait, son œuvre prenait vie sous ses yeux. Dix heures vingt-deux. Il lui restait un peu moins d'une heure et demie : c'était largement suffisant. Ses yeux bougeaient rapidement d'un bout à l'autre de la toile, ils scrutaient vraiment ses moindres faits et gestes, ils examinaient chaque collision que la peinture opérait. Minutie, dextérité, affûtage. Les courbes étaient sublimées, les lignes affirmées et les ombres disposées. Tout prenait forme comme il l'avait souhaité. Rien de plus satisfaisant.
Son sujet apparaissait distinctement maintenant. Encore une femme. Il aurait voulu changer, pour une fois, mais l'étude qu'il suivait ne l'avait pas permis : il était soumis à exécuter son art d'après le modèle qui s'était spécialement déplacé la veille. Son travail était contraint, alors il ne pouvait pas faire ce qu'il voulait. Mais ce n'était pas si grave : Jungkook savait qu'une fois ce travail fini, il pourrait proposer quelque chose qu'il aurait lui-même choisi. Non que son œuvre actuelle ne lui plaisait pas, il avait juste d'autres désirs en ce moment. Il voulait voir de quoi il était capable en prenant un modèle vraiment ancré dans son monde. Pourtant, force était de constater que sa peinture était somptueuse dans ces tons de bruns et de pourpres. Le sujet était magnifié, comme s'il s'agissait d'une nymphe de la mythologie : aussi belle qu'enchanteresse.
Onze heures trente-six sonna la fin de son ouvrage. Jungkook exerça une pression au sol pour propulser son tabouret à roulettes un peu plus loin du chevalet. Ayant gardé ses pinceaux et sa palette en main, il en plaça un en face de lui, l'utilisant comme un instrument de mesure. Il vérifia les perpendiculaires, les parallèles et la cohérence des points de fuite. Un sourire étira ses lèvres lorsqu'il termina sa tâche. Il avait bien travaillé. La musique continuait de résonner dans ses oreilles, très forte. Il se sentit pris d'un sentiment très agréable, à la jonction de la satisfaction et de la détente. Finir une œuvre avait toujours ce goût-là. C'est dans ces moments qu'il se sentait réellement apaisé.
C'est dans cette bonhomie, sympathique quoique passagère, qu'il se mit à ranger son matériel. Toujours installé sur son tabouret, il triait ses pinceaux pour mieux les remettre à leur emplacement dédié, sans oublier de les nettoyer avant. Il avait de la gouache plein les mains, étant de ceux qui n'hésitaient pas à créer des textures à l'aide de ses « outils » naturels, et il avait même réussi à s'en mettre sur le visage, dans les cheveux. Emporté dans son art, il ne faisait pas attention au reste, seule l'œuvre comptait et le résultat devait être au rendez-vous. Des nuances de couleurs plutôt sombres et froides s'étalaient sur ses pommettes et coloraient quelques pointes de ses cheveux. Cheveux qu'il salit d'autant plus en passant sa main tachée entre ses mèches pour dégager sa vue.
Appliqué dans sa tâche, il fut surpris de sentir l'un de ses écouteurs être retiré de son emplacement. Il tourna alors la tête pour apercevoir l'auteur de cet horrible acte : il était plongé dans une musique incroyable, c'était un sacrilège de lui retirer la moitié des vibrations. Néanmoins, il n'eut pas le temps de s'insurger en voyant que ce perturbateur n'était autre que Taehyung. Le brun avait dirigé l'écouteur vers sa propre oreille, intéressé par ce qui pouvait bien maintenir le noiraud dans un tel état de concentration. Parce qu'à ses yeux, Jungkook avait l'air dans un autre monde lorsqu'il peignait. Il en avait oublié toutes les personnes autour de lui. Taehyung le regardait depuis de longues minutes avant de décider de s'approcher pour s'immiscer dans son univers. Il l'avait observé, appuyé sur le large encadrement de la salle d'art plastique, la tête posée contre le bois et les bras croisés. Il le scrutait comme s'il détenait les réponses à toutes ses questions, comme s'il était devenu le seul à pouvoir capter son attention.
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𝑪𝒂𝒑𝒓𝒊𝒄𝒊𝒆𝒖𝒙 | taekook
Fanfiction𝐂𝐚𝐩𝐫𝐢𝐜𝐢𝐞𝐮𝐱, 𝐞𝐮𝐬𝐞, 𝐚𝐝𝐣. Étγmologie et Histoiɾe. [...] « qui a des caprices ; personne à l'imagination riche et étrange » {attesté depuis le XVIe siècle} 𝟏. Qᥙι ᥲgιt ρᥲr ᥴᥲρrιᥴᥱ(s). 𝟐. Qᥙι ᥲ ᥙᥒ ᥴomρortᥱmᥱᥒt ιmρrᥱ́vιsιbᥣ...