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Noé m'avait envoyé un message le vendredi pour me donner rendez-vous et m'informer sur le programme de la journée. Lorsque j'ai découvert son message, j'ai littéralement hurlé de joie et me suis trémoussée dans tout mon appartement en sautant comme une chèvre enragée. Si vous vous posiez la question, non je n'ai pas mis de rideau, oui j'ai beaucoup de vis-à-vis, mais cela faisait bien longtemps que j'avais renoncé à toute forme de dignité auprès de mes voisins. Il faut dire que quand on finit sur son balcon topless, avec juste ses mains pour couvrir sa pudeur, on relativise. Conseil d'ami, ne portez jamais de bustier noué les jours de grand vent.
Le message indiquait que nous devions nous rejoindre à seize heures pour aller au vernissage de son oncle, puis après nous irions dans un petit restaurant libanais qu'il connaissait, nommé de manière très originale le « Liban'est ». Si ça, ce n'était pas un rendez-vous galant, je me fais none. Et peu importe si j'exècre le libanais. Je mangerai des pois chiches jusqu'à ce que mon estomac explose sans me plaindre une seule fois.
Le matin, pour la conscience, je suis retournée courir avec Bianca. C'était un peu moins dur que la semaine dernière, même si cela restait assez rageant de voir que pour elle, c'est une promenade de santé, alors que moi je mettais trois ou quatre heures à dérougir. Ensuite nous sommes allez faire les magasins et j'ai dégoté un jean noire moulant qui avait l'air de remonter ce qu'il fallait remonter et d'affiner ce qui avait besoin de l'être.
Une fois n'est pas coutume, je suis arrivée en avance. En l'attendant j'ai regretté de ne pas avoir mis d'écharpe car mon manteau et mon chemisier (transparent), laissait ma gorge à nu. J'espère que Noé saurait apprécier ce sacrifice à sa juste valeur.
Lorsqu'il est arrivé, mon cœur a manqué un battement. Malgré mon hypocondrie chronique (une autre de mes nombreuses qualités) je ne me suis pas préoccupée de l'infarctus qui me guettait. On aurait dit qu'il n'y avait plus que lui dans la rue, tellement les autres passants paraissaient insignifiants à côté de lui. Avec sa haute taille, sa silhouette sculptée (oui, ça se devinait même sous sa doudoune) et ses yeux d'un bleu perçant, ça en était presque douloureux de le regarder. Presque.
─ Salut Margaux, tu es vraiment magnifique aujourd'hui, m'a-t-il salué en m'adressant son demi sourire à tomber par terre.
Ok. Finalement je crois qu'il va falloir me mettre un pacemaker de toute urgence.
─ Salut, tu n'es pas mal non plus, ai-je minaudé en m'approchant pour lui faire la bise, en m'attardant quelques secondes de trop contre sa joue fraichement rasée.
Quelle audace.
Le vernissage de son oncle se trouvait dans une petite galerie miteuse et déserte. Nous avons très vite fait le tour des quelques photos de renards, blaireaux et sangliers floues et certainement prises avec un iphone quatre en bout de course. La seule qui pouvait peut-être éveiller un soupçon d'intérêt, était celle d'un cerf en train de copuler sauvagement avec une biche. Et encore, le manque de netteté de la photo pouvait laisser entendre d'autres scénarios bien plus effrayants.
─ Tu te rends compte, m'a soufflé Noé en me montrant le cliché d'un lièvre en train de manger un gland, mon oncle a dû attendre plus de six heures, caché dans les fourrés pour pouvoir saisir ce moment.
Je pense que l'oncle de Noé ne devrait pas se donner autant de mal et simplement trouver un passetemps dans lequel il sera un peu moins nul.
─ C'est fou d'être capable d'autant de patience ! me suis-je exclamée.
J'ai pris des cours de théâtre en CE1, et je n'étais pas la plus mauvaise du groupe.
─ Après, quand on voit le résultat, c'est clair que ça en valait la peine. Mais je ne te raconte pas le nombre de week-ends qu'il a dû sacrifier à arpenter les forêts.

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Journal sans titre.
ComédieMargaux, jeune enseignante dans la vingtaine, raconte ses déboires amoureux, familiaux et amicaux avec une bonne dose de second degré. Ce roman est largement infusé d'une ambiance à la Bridget Jones !