Le monde des pirates - T2 [MxM]

Chapitre 19

Thomas se réveilla avec la mâchoire douloureuse, bien que son père lui en avait collé de bonnes par le passé, il ne s'était jamais pris de gifle aussi violente que celle de Jonathan. L'homme avait les mains robustes. Il remarqua son absence et le retrouva dehors quand il se leva. Lorsqu'il le salua, Jonathan lui jeta un regard impassible qui le fit frissonner jusqu'aux os. N'allait-il pas s'excuser pour les traces de ses doigts qu'il pouvait encore sentir sur sa joue ? Thomas s'offusqua, mais le soupir fatigué de l'homme l'inquiéta légèrement. Il ne connaissait pas le passé de Jonathan, mais il se doutait bien qu'il avait vécu un enfer dans cette maudite grotte.

— Vous allez bien ? s'enquit-il.

Jonathan massa sa nuque raide. Il n'avait pas dormi, tourmenté par les cris de sa famille auxquels s'étaient ajoutés ceux d'Oliver. Des hurlements qu'il ne souhaitait pas entendre une seconde fois. Une vision qu'il ne voulait jamais revoir... Son regard se posa sur Thomas et le bandeau attaché dans ses cheveux.

— N'entraînez pas votre frère dans votre infamie, souffla-t-il, dépité et mentalement exténué.

Thomas inspira profondément afin de garder son calme. Il savait que Jonathan haïssait les pirates, mais, quoique ceux-ci aient pu faire, Thomas n'était pas comme eux.

— Je vous l'ai déjà dit, il fait ses propres choix, soupira-t-il.

— Croyez-vous qu'il serait en pleine mer si vous n'y étiez pas ? ironisa Jonathan d'un souffle moqueur.

— Il serait n'importe où, pourvu qu'il soit loin de votre sœur, répondit sèchement Thomas.

Jonathan se tourna vers lui avec un regard étroit et une mâchoire serrée, trahissant sa colère. Thomas soutint son regard fièrement. La tension devint subitement palpable, mais le reste du groupe les retrouva, mettant fin à leur discussion.

Edward zieuta Jonathan avec insistance comme pour l'avertir de ne pas oser toucher Thomas une fois de plus au risque d'y perdre un membre. Un rictus agacé se forma sur les lèvres de l'homme avant qu'ils ne se mettent en route pour rejoindre les quais. La descente fut moins contraignante. Ils gagnèrent le village puis retrouvèrent le premier fermier qui accepta de les emmener jusqu'au port avec sa charrette à bœufs. Un trajet tout aussi inconfortable que leur deux nuits sur des lits de paille à même le sol.

La première chose que fit Thomas fut de s'affaler sur le lit de la cabine lorsqu'ils retrouvèrent leur navire pendant que Richard demandait l'autorisation à Edward pour se servir dans leur réserve de rhum et remplir sa gourde ; il sautilla de joie lorsque celui-ci accepta. Edward lança un regard haineux envers Samuel qu'il aperçut se balader librement sur le pont. Il déglutit péniblement lorsque son cœur se serra en se souvenant de son cauchemar. Il devait trouver un moyen pour se débarrasser de lui pour de bon.

Oliver attendait Jonathan sur l'Inflexible. Après leur aventure, il ne souhaitait pas laisser l'homme seul tant qu'il n'était pas sûr qu'il ne se servirait pas de son fusil pour mettre fin à ses jours. Il pencha la tête sur le côté, curieux, quand David et James sortirent de la cale. Pourquoi le jeune homme blond n'était pas sur le Revenge ? Il haussa les épaules, David le surveillait encore, c'était une bonne chose.

Jonathan interrogea Oliver du regard quand il monta, mais ne posa pas de question quant à sa présence sur son bateau. Il était simplement soulagé que le jeune homme ait décidé de voyager sur l'Inflexible plutôt que sur ce navire pirate. Il monta sur le gaillard d'arrière, suivi par Oliver, et tata machinalement son manteau à la recherche de son carnet. Il fronça les sourcils avant de poser son regard sur le jeune homme qui portait sa redingote. Il s'avança vers lui, mais préféra demander respectueusement :

— Voulez-vous bien me donner mon carnet ?

Oliver se fouilla et sortit l'objet, et, lorsqu'il lui tendit, le crayon, qui était calé à l'intérieur, tomba. Il s'excusa en le ramassant.