Chapitre 8 : Embrasement.

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Chapitre 8.1 : Embrasement.

                 Elise et Marie réorganisaient la chambre de Monsieur Charles depuis quelques minutes déjà. Depuis la veille, Elise Dupuis était à fleur de peau. Une émotion mêlée de colère et de tristesse la tourmentait. Elle avait accompagné la famille De Villiers à Paris pour la saison mondaine, se forgeant de nombreuses attentes. Durant quelque temps, Henri et elle s'étaient rapprochés, et elle en avait éprouvé une véritable joie. Cependant, avec l'arrivée de Julia Leclaircie, porteuse d'un goût prononcé pour le changement, Elise avait décidé de prendre ses distances avec Henri : plus de conversations nocturnes dans la cour, plus de regards prolongés à table. Son stratagème avait fonctionné à merveille. Elle avait observé la confusion dans les yeux d'Henri, une pointe de regret, et cela l'avait comblée. C'était lui qui, subtilement, avait cherché à renouer le contact, l'invitant à discuter dehors ou trouvant des prétextes pour solliciter son aide.

Cependant, cette situation, ignorer Henri, avait duré plusieurs mois, ce qui n'avait pas été aisé. Par ailleurs, elle avait particulièrement apprécié le fait de voir Henri et Mademoiselle Leclaircie se disputer sans relâche. La loyauté de ses amies envers Elise avait mis la gouvernante en position délicate, bien que cette dernière déployât d'excellentes idées et réalisât un travail irréprochable. Malgré tout, Elise savourait secrètement les embûches que Julia rencontrait indirectement à cause d'elle. Elle haïssait cette femme, alors, ses amies la haïssait aussi, par solidarité. Peut-être cela la pousserait il à quitter Chantilly ?

Par ailleurs, la période éloignée d'Henri avait été difficile pour Elise, craignant qu'il ne se rapproche de Julia Leclaircie. Malgré leurs désaccords apparents, Henri semblait différent aux yeux de tous, comme si quelque chose en lui avait changé. Ses yeux pétillaient d'une lueur particulière lorsqu'il regardait la jeune femme, une attitude bien différente de ce qu'ils connaissaient de lui.

Ainsi, lorsqu'Elise était partie à Paris, espérant que son absence manquerait à Henri, elle avait été déçue. Il ne montrait aucun signe d'intérêt à son égard, semblant même complètement distrait. Elle avait tenté plusieurs fois de l'aborder, mais en vain.

— Bon, oh ! Elise ! s'écria soudainement Marie, ramenant la jeune femme à la réalité. Qu'est-ce qu'il t'a fait, ce pauvre drap ?

Soufflant d'exaspération, Elise lâcha le drap du lit sur lequel elle déversait inconsciemment ses nerfs.

— Excuse moi, Marie...

— Je sais ce qui t'arrive. Et tu ne devrais pas t'en faire autant.

— Facile à dire ! soupira Elise en reprenant le drap pour le remettre en place. Tu sais, je ne comprends pas Henri... Un jour il est charmant, et l'autre, complètement ailleurs.

— Elise... ça tourne à l'obsession. Vraiment. Il faut que tu passes à autre chose. Monsieur Deveau n'est pas un homme pour toi. Déjà, c'est un majordome, et puis...

— Et alors ?! coupa Elise avec véhémence, les sourcils froncés, se redressant de toute sa hauteur, chacune des femmes d'un côté du lit.

— Et puis ! insista Marie, comme si elle n'avait pas été interrompue. Il est trop coincé, trop strict. Il fait le mystérieux, et toutes les femmes semblent trouver ça attirant, mais tu ne le connais pas ! Est-ce que s'il n'était pas beau tu l'aurais remarqué ? Elles sont toutes folles de lui, mais il ne s'est jamais intéressé à personne. Il faut que tu arrêtes, Elise...

Entendre ces paroles était pire que de les penser soi-même. Mais en plus, dans la bouche de sa meilleure amie, c'était difficile à encaisser. Son cœur se serrait douloureusement.

Révérences et Révoltes [Terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant