𝐈

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« Je ne crois pas aux coïncidences mais des fois, ça semble tellement irréel que je m'efforce de faire l'inverse... »





Petite Etoile


À l'époque, mon père était un gros buveur, et mes années de collège et de lycée furent les pires de toute ma vie. Il rentrait tard après être allé boire des verres, puis s'allongeait sur le canapé en attendant que je fasse tout à sa place. Cependant, je dois m'estimer heureuse d'une chose, bien qu'il ait été toxique et dépourvu de toute pitié, mon géniteur n'a encore jamais levé la main sur moi.

Ma main moite attrape mon sac, l'anxiété qui me prend en vue de ma rentrée me perturbe. Je n'aime pas perdre mes moyens mais les niveaux de stress que j'endure ont toujours été une catastrophe.

—  Cassie, la voiture t'attend ! hurle mon père du bas des escaliers.

En voiture, il faut compter jusqu'à 20 minutes de trajet. L'envie de prendre le bus pour mon premier jour ne m'a pas enjouée alors Bethy a bien voulu m'emmener ce matin. Elle est du genre joyeuse, et souriante comme impassible mais ses yeux sont remplis d'un profond chagrin. Un mystère.

— Je suis là, à ce soir papa ! je lui lance avant qu'il ne m'embrasse la joue, me forçant à lui sourire bêtement.

— Bonne journée Cassie, je t'aime.

Le bruit de la porte d'entrée étouffe ses derniers mots, or je n'ai eu aucun mal à comprendre ce qu'il venait de me dire.

Tiens, c'est nouveau.

J'ouvre la porte côté passager de la voiture, m'y installe, et dépose mon sac à mes genoux. Bethy a toujours ce même sourire ridicule flanqué sur la figure, elle a tendance à m'agacer pour rien. Sûrement aurai-je pu la remercier d'avoir rendu papa plus agréable, mais j'aurais préferé qu'il change de lui-même plutôt que pour une femme aussi étrange qu'elle. Alors, je lui affiche mon plus beau sourire et la remercie d'un simple hochement de tête pour ce trajet.

Elle démarre la voiture, mes yeux sont collés à la vitre, mais au reflet je peux constater qu'elle me lance de multiples œillades. Décidément elle a vraiment le don de m'agacer.

— Que se passe-t-il ?
Lorsqu'elle se retrouve prise en flagrant délit, elle se contente de reporter son attention sur la route.

— Rien, ne t'en fais pas. J'adore tes cheveux ! rétorque-t-elle sans une once de sincérité.

Alors, je ne m'attendais pas à ça...

Merci, je suppose...

Son sourire revient à la charge en guise de réponse. Mon regard se tourne vers le paysage lorsque mes pensées se perdent. Vais-je faire de nouvelles rencontres ? Généralement, nous sommes à un âge où tout le monde mûrit. Ou du moins presque. La licence de biologie n'est pas accessible à n'importe qui. De bonnes notes ne suffisent pas, nous devons nous faire remarquer au risque de passer inaperçu.

Bethy finit par se garer à quelques rues du bâtiment, pour, encore une fois, une raison qui m'échappe.

J'attrape mon sac à la volée, puis j'ouvre la portière avant de lancer un dernier sourire en guise de cache-misère. Assez hypocrite pour dissimuler ma vraie pensée, celle-ci même qui ne l'intéresse certainement pas.

—  Je rentre en car ou tu viendras me chercher ?

—  Avec le boulot je ne pourrais pas, objecte-t-elle. Je suis désolée mais il va falloir t'habituer au car dès ce soir Cassiopé.

CassiopéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant