Le changement est effrayant.
C'est naturel pour un humain d'être effrayé par le changement, il est composé de trop de facteurs inconnus, possibles pour que l'on puisse envisager toutes les options.
C'est sûrement pour cette raison que je suis coincée depuis plus d'une heure devant l'écran de mon ordinateur, incapable d'appuyer sur la touche "envoyer". Le fruit d'un travail de presque quatre ans est sur le point de s'achever et j'ignore si je suis prête à affronter la suite.
Mon téléphone me sort de ma paralysie et je le saisis direct sans même regarder l'interlocuteur :
– Oui ?
– Annabeth ? me répond une voix féminine. Je suis l'agent Jareau du département des sciences du comportement, on s'est parlé la semaine dernière pour ta déposition.
J'acquiesce.
– C'est pour te dire qu'on est rentré de mission, si tu veux passer prendre tes affaires dans la journée, tu peux passer.
– Oh euh...
Mon regard dévie vers mon mail toujours en suspens.
– Pourquoi pas, j'ai rien de prévu aujourd'hui.
– Parfait, répond l'agent Jareau. Je t'envoie l'adresse et préviens l'accueil, histoire qu'ils ne te prennent pas pour une terroriste.
Je raccroche et repose mon téléphone, mon regard toujours rivé sur mon écran.
Réfléchis Beth, tu as un diplôme de psychologie, alors pourquoi est-ce que tu n'arrives pas à envoyer ce dossier de thèse ?
La réponse m'apparaît immédiatement : je ne suis pas prête à conclure ce chapitre de ma vie parce que j'ai l'impression qu'il n'est pas terminé. Si je veux envoyer ce dossier, il me faut m'assurer qu'il est terminé.
Je me redresse et récupère la boîte dédiée à ma thèse posée au pied de mon bureau. Je l'ouvre et y range mes trop nombreuses feuilles de brouillons encore étalées autour de moi. J'en fais de même avec les ouvrages dédiés au Cecil Hotel, les brochures de presses et les listes d'articles à consulter.
Quelques minutes plus tard, toutes traces de ma thèse ont disparu, enfin presque...
J'ouvre mon placard et en sort le tableau en liège qui me sert de murder board depuis maintenant plusieurs années.
Au départ, seuls trois noms y apparaissent : ceux de Grace Magro, Roy Thompson et Robert Smith. Les trois premières victimes du Cecil Hotel, trois suicides. Et puis le nom d'Elizabeth Short les a rejoint sur une intuition, et cette intuition m'a guidé jusqu'à Cole Smith qui, suite à un épisode psychotique, a mit fin aux jours d'une femme de 22 ans de la pire manière qu'il soit. Viennent ensuite Helen Gurnee, Julia Frances Moere, George Gianinni et Pauline Otton. Sa liste de victimes se termine avec Goldie Osgood en 1964.
Nom après nom, post-it après post-it, je chasse les preuves de la quête qui m'ont conduit au dernier acte de ma thèse.
La liste de noms rangée dans un coin de la boîte, je réalise qu'il en manque un. Alors je récupère un dernier post-it sur lequel j'inscrit : "Beth Hale, 06/02/2007".
Et je referme la boîte contenant les pires et les meilleures années de ma vie.
Je me demande combien d'autres boites comme celles-ci je vais encore remplir.
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PSYCHO KILLER || Esprits Criminels
FanfictionFévrier 2007. Le Département des sciences du Comportement reçoit une nouvelle affaire : Annabeth Hale, une étudiante modèle en criminologie de l'Université George Washington, a disparu depuis trois jours en plein milieu de la ville de Los Angeles. S...