BLINDLY [Sous contrat d'édition chez &H]

𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟏𝟔

Vancouver, Canada

Aylin

Exténuée, épuisée, je suis fatiguée même à l'idée de respirer. Une seule envie s'empare de moi, celle de tout abandonner. Pour autant, je refuse de céder à la facilité. Mon combat n'est pas encore terminé. Ainsi, j'use de toutes mes forces restantes pour me lever de mon lit.

Une fois debout, je me sens lourde, telle une ancre qui coule au fond de la mer. Soudain, on me repousse sur le matelas, quelqu'un s'assoit sur moi et ma volonté s'en va. Pourtant, la peur qui imprègne chacune de mes cellules me donne le courage de pousser un cri de rage.

— Au secou...

Une main se referme sur ma bouche et m'empêche de faire le moindre bruit. Cette main, ce toucher qui m'est si familier.

— Je te retrouverais toujours, Aylin, parce que je te veux.

Pierre.

Non, laisse-moi, s'il te plait. Tu m'as déjà assez fait de mal.

Mon esprit est embrumé, mes membres sont paralysés. Piégé, avant même d'avoir essayé de me libérer, je comprends que personne ne me sauvera jamais. Il commence à se frotter à moi, mais impuissante, je reste à sa merci. Les larmes qui coulent aux coins de mes yeux comme seul témoin de ma souffrance. Aurais-je un jour le droit à la délivrance ?

Puis le cliquetis de sa ceinture qui se détache résonne. Et c'est comme si ce bruit avait signé ma fin. Alors, je prie de tout mon cœur. Pour ne plus avoir peur. Car la mort n'est peut-être pas un si mauvais sort.

« Bats-toi pour tes rêves, toujours. Moi je me battrais sans cesse pour toi, car tu es le mien »

Louis.

Tu n'es plus là et je n'ai plus envie de continuer à me battre sans toi. Alors je clos mes paupières abandonnant toutes prières. L'espoir est un sentiment futile, croire que quelqu'un va venir pour me sauver est puérile. Je suis seule. Seule face à mes démons.

« Grande sœur... tu... tu... fais quoi ? »

Ilyas.

Au non, non, non. Je ne peux pas le laisser ! Réveille-toi, Aylin !

— Aidez-moi ! hurlé-je sans qu'aucun son ne sorte de ma gorge.

Telle une bête sauvage, je me débats pour me libérer. Même si mon corps refuse de m'écouter. Mon cœur pulse de manière si effrénée dans ma poitrine que j'ai l'impression qu'il va exploser.

— Au secours ! crié-je dans un dernier souffle.

Et soudain, je me réveille, haletante. La respiration saccadée par un cauchemar qui semblait bien trop réel. Je ne pensais pas être à ce point traumatisée. Mon corps est inondé par la transpiration, il faut que j'aille prendre une douche.

« Fait de beaux cauchemars Aylin. »

Ne t'inquiète pas Miller, c'est fait. Une semaine que la fête est passée et qu'il m'a raccompagné chez ma grand-mère, pourtant, le souvenir de cette soirée me hante encore. Elle me colle à la peau comme un tatouage, me marquant pour toujours et à jamais.

Cette semaine, je n'ai été que l'ombre de moi-même. J'ai assisté à l'ensemble des cours, mais c'est comme si je n'étais qu'à moitié présente. Mon corps est à un endroit, ma conscience, elle, est à un autre, coincée dans ce lit, qui ne veut pas sortir de mes pensées.

Je me relève, cette fois, pour de vrai. Encore chez ma grand-mère, quand je vais mal, il n'y a qu'ici que je me sens à ma place. Dans le silence le plus complet, j'avance et entre avec prudence dans la salle de bain. Pas stressée le moins du monde, car je suis avantagée ici, je connais bien les lieux. Cependant, le jour où je vais devoir me déplacer dans la maison d'un inconnu, c'est là que ça va se complexifier.