Chapitre 18

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    De retour à l'aéroport après les quelques jours que j'ai passé dans ma famille, je suis heureux que mes sœurs m'aient accompagné. Mes parents étaient plutôt opposés à l'idée, mais autant Ariane que ma grand-mère se sont arrangées pour les convaincre que rater une journée de cours n'était peut-être pas si important pour me porter à l'aéroport. C'est un événement exceptionnel, après tout. Alors que je regarde de quel côté je suis censé me diriger pour passer les frontières, mes sœurs m'enlacent soudainement sans que je n'ai le temps de bouger. Je souris doucement, mais bien que je sois un peu triste à l'idée de les quitter, je ne peux pas m'empêcher d'avoir hâte d'être de retour de l'autre côté de l'Atlantique.

    Il faut d'ailleurs que je réfléchisse à ce que je souhaite faire par la suite. J'ai toujours eu pour projet de ne venir qu'un an à Montréal. Mais je réalise à présent que quelques mois passés ailleurs peuvent parfois remettre en question l'entièreté des projets d'avenir de quelqu'un. C'est compréhensible en un sens : ça bouscule absolument tout ce qu'on connaît, on doit recommencer à zéro dans un environnement inconnu sans personne à nos côtés pour nous épauler. Dans mon cas, c'est de cette façon que cela s'est déroulé. J'ai fait certains choix qui m'ont amené à vivre cette expérience de cette façon.

    Au moment de nous dire au revoir, la plus âgée de mes sœurs me glisse à l'oreille que la prochaine fois, ce sont elles qui viendront me rendre visite. Cette idée me fait sourire. Si je décide de rentrer en France à la fin de mon année, comme prévu initialement, cela risque de ne pas se produire. Mais si je choisis de commencer à construire ma vie ici, c'est une idée qui me ferait très plaisir.

    Le trajet en avion me paraît à la fois durer une éternité et être passé en un clin d'oeil. Je crois que je suis toujours dans un inconfortable flou. J'aurais aimé être capable de passer rapidement à autre chose, mais il semble que cela prendra plus de temps que prévu. Lorsque j'atterris, je n'ai pas besoin d'attendre pour récupérer un bagage alors je ne mets que peu de temps à rejoindre l'extérieur. Perdu entre diverses pensées, je ne regarde rien d'autre que les panneaux autour de moi, cherchant simplement par où rejoindre l'arrêt de bus.

    Je me demande comment vont les filles. Il faudra que je leur envoie un message. Je suppose qu'elles retourneront en cours après le week-end, cela leur laisse quelques jours pour se remettre. Je ne peux m'empêcher d'être inquiet pour elles.

- Harry !

    Je me retourne, surpris et étonné d'entendre une voix qui me semble trop familière. Je ne vois personne en me retournant. Peut-être que ça y est, la fatigue et le trop-plein d'émotions me provoquent des hallucinations. Je reprends ma route vers l'arrêt de bus mais des bras s'enroulent vite au milieu de moi. Je sursaute et me retourne pour découvrir Louis.

    Il s'écarte légèrement de moi pour me regarder, puis passe ses bras autour de ma nuque et me serre contre lui. Je l'enlace à mon tour et les dernières larmes que je retenais se mettent à couler. Je n'aime pas pleurer. On dit que ça fait du bien, mais ça m'épuise plus qu'autre chose et je n'aime pas réellement me montrer vulnérable bien que je répète à qui veut l'entendre que c'est important de se laisser aller de temps en temps.

- Ça va aller. On ira bien.  Ça prendra du temps mais ça ira.

■ □ ■

    Les premiers mois qui ont suivi mon retour après l'enterrement ont moins durs que ce à quoi je m'attendais. Peut-être parce que j'étais bien entouré. Peut-être parce que lorsque j'y pense, je me dis que j'aurais pu ne pas être présent et que cela aurait été pire. Louis commence à aller mieux aussi. Mais il y a un sujet qui reste assez tabou entre nous qui est le fait que je sois censé être ici temporairement. Plongés dans nos cours, nous ignorons volontairement que je suis censé rentrer en France après l'été.

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