BLINDLY [Sous contrat d'édition chez &H]

𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟏𝟗

Vancouver, Canada

Miller

— Arrête de m'appeler, c'est la dernière fois que je te le dis.

Mon téléphone en main, le visage crispé, je continue de me diriger vers l'établissement Rivera. Mes nerfs ont été soumis à rude épreuve durant cet échange, cependant, je me dois de rester calme. Lorsque l'on se laisse submerger par les émotions, on a tendance à dire des choses blessantes qu'on ne pense pas.

« C'est à cause de toi que je suis coincée ici, tu as gâché ma vie. »

Certaines blessures ne se referment jamais, on apprend juste à vivre avec.

Pourtant, son insistance commence à dépasser mes limites. Bientôt, je vais dire des mots tranchants. Depuis plusieurs semaines maintenant, elle me harcèle et mon seuil de tolérance commence à atteindre des sommets.

— Miller, tu ne peux pas m'abandonner comme ça, déclare-t-elle en pleurant à chaudes larmes. Pas après tout ce qu'on a vécu ensemble. Ne me laisse pas, s'il te plait.

Je déteste quand elle fait ça. Elle veut jouer avec mes sentiments et elle est très douée dans ce domaine. Une manipulatrice qui cache bien son jeu, voilà ce qu'elle est, ni plus ni moins. Les poings serrés, je prends une grande inspiration afin de m'éclaircir l'esprit. C'est le bazar dans ma tête. Un tourbillon de pensées contradictoires gravite et se bouscule.

Un moment de répit. C'est tout ce que je demande.

— Elise c'est fini, craché-je plein de rancœur. Arrête de forcer les choses. Je ne veux plus jamais te parler.

— Mais Miller, tu ne peux pas...

Je raccroche sans lui laisser le temps d'en rajouter. Je n'ai plus de temps à perdre. Des erreurs, j'en ai fait en deux ans, mais je n'aurai jamais pensé qu'Elise serait l'une d'entre elles. Se méfier de tout et tout le monde prend sens.

— Salut Louis, euh enfin je veux dire Miller. On peut savoir à qui tu parles comme ça ? Une petite amie secrète ? Dis-moi tout !

Alice. Je suis sûre qu'elle a fait exprès de se tromper sur mon prénom. Lucas et elle n'approuvent pas trop mon projet de double identité. D'après eux, je risque gros. Mais, ça, je le sais déjà. J'aimerais leur expliquer que je suis vraiment Miller en ce moment, mais il ne comprendrait pas.

— Rien qui ne te concerne ma chère Alice, lancé-je paniqué à l'idée qu'elle ait entendu ma conversation téléphonique.

— Oh, je vois, des secrets, toujours plus de secrets... Mais n'oublie pas qu'il n'y a rien de plus dangereux que ça, mon cher Miller, lance-t-elle d'un ton railleur, en appuyant sur mon prénom.

Des secrets, on en a tous, même si certains sont plus dangereux que d'autres. Ses yeux me scrutent de haut en bas avec un air moqueur. Deux billes noires capablent de voler votre âme si vous ne faites pas assez attention. Elle est toujours aussi magnifique, avec ses cheveux noirs bouclés et ses fausses taches de rousseurs.

Son sourire laisse place à une moue perplexe, avant qu'elle ne regarde au loin derrière moi et son sourire éclatant réapparaît comme par magie.

— Lucas Rivera, dépêchez-vous voyons ! déclame-t-elle d'un air soutenu pour imiter les professeurs. Vous êtes en retard et en plus vous avez toute l'oisiveté de marcher à la vitesse d'un escargot.

A mon tour, je me retourne pour croiser le regard joueur de Lucas, qui semble toujours aussi sûre de lui.

— Excusez mon impolitesse mademoiselle, mais ne suis-je pas le fils de la femme qui dirige ce prestigieux établissement ? Par conséquent, cela ne devrait-il pas m'octroyer certains privilèges ? Ne vous donnez pas la peine de répondre, c'est une question rhétorique, rétorque-t-il à son tour avec un clin d'œil charmeur.