Half Moon Pack - 1. L'éveil d'une Oméga

Chapitre 16

J’ignorais ce que j’attendais vraiment de ce rendez-vous avec mes parents, mais visiblement, j’en attendais de trop. Mon regard était porté sur cette tasse de latte, magnifique et une véritable œuvre d’art. L’atmosphère était assez tendue, et je n’étais pas très à l’aise. Mes prunelles se relevèrent avec une petite hésitation sur le visage de ma mère. Cette dernière affichait un sourire crispé, se forçant sûrement à me paraître agréable. Elle s’inquiétait certainement de me faire bonne impression, comme j’étais la compagne de l’Alpha. Ce qui était en soi ridicule. Je ne comptais pas mettre Karhon dans l’équation de la relation que j’avais avec mes parents.

— Nous avons appris la nouvelle… tu ne comptais pas nous l’annoncer ? questionna mon père, sans prendre de gants.

Je restais silencieuse face à cette question. Je n’avais effectivement aucune intention d’annoncer quoi que ce soit. J’étais heureuse d’être en couple avec Karhon, mais il n’était pas un trophée qu’on exhibait. D’autant plus que mes fréquentations ne les regardait plus, depuis que j’avais quitté la maison familiale. Ils avaient décidé de couper tous les ponts avec moi.

— Ne vas-tu donc pas nous parler ? grogna-t-il, face à mon mutisme.
— Pour dire quoi ? articulai-je lentement.
— Tu es la compagne de l’Alpha, même si tu es une… moins que rien… tu as une place importante au sein de la meute.

Mon père allait continuer, mais le regard de ma mère brilla d’une sorte d’illumination. Même si j’étais persuadée qu’elle serait à côté de la plaque. Ma mère était une angoissée de la vie, s’imaginant toujours le pire, surtout depuis qu’ils avaient eu la confirmation que j’étais une sineulla. Je pouvais voir la panique la prendre.

— Il n’est pas au courant, c’est ça ? Il ne sait pas que tu es dépourvue de capacité ! s’exclama-t-elle, horrifiée que je puisse jouer un tel tour à l’Alpha.

Mon père prit tout de suite la mouche, et me lança un regard noir de colère. Tromper l’Alpha revenait à être passible à une peine de mort ou à être banni, et la réputation de la famille en prenait un sacré coup. J’avais très envie de rire jaune face à ce fait. Il pensait toujours à eux, plutôt qu’à moi. Finalement, ce que je cherchais, je l’avais obtenu. La réponse à cet espoir qui était niché au fond de moi. Est-ce que je comptais pour eux ? La réponse était non. Je n’avais plus compté pour eux, en tant que personne. Je n’étais plus qu’une tâche honteuse sur leur tableau familial. Une enfant qui n’aurait pas dû voir le jour. Elerys Evelon n’était qu’un parasite pour eux et leur famille.

Mes doigts se serrèrent autour de ma tasse. Tristesse et colère se mêlaient en moi, mais je restais calme, comme si cela ne m’affectait pas. Peut-être à cause de la chaleur que je ressentais dans le fond de mon cœur. J’avais l’impression de le percevoir, ce lien chaleureux qui me reliait à Karhon. Il semblait encore fragile, mais il était vivace. Il était mon compagnon, et malgré toutes mes faiblesses et tout ce qu’ils considéraient comme « parasite », Karhon lui l’acceptait à bras ouverts. Même si je le prévenais avec force ce que cela impliquait probablement. Il me démontrait toujours le contraire.

— Je t’arrête tout de suite, dis-je doucement, pour le couper dans son début de tirade.

Je n’avais pas haussé le ton. C’était d’une voix douce, mais ferme que j’avais parlé, les incitant à arrêter de parler et de m’écouter attentivement. C’était étrange. Je n’avais pas spécialement une aura dominante et je n’avais pas non plus de louve pour grogner contre eux. C’était juste moi, la petite sineulla qui n’avait rien pour elle, sauf son être, ses forces et ses faiblesses.

— Karhon est parfaitement au courant que je suis une sineulla, et contrairement à vous qui m’avez tourné le dos quand j’en avais le plus besoin. Il m’a pris dans ses bras et a affirmé qu’il s’en fichait pas mal que je l’étais. Malgré mes moult avertissements, il s’est avancé vers moi, m’a tendu la main et m’a clairement dit qu’il prendrait ce chemin avec moi, peu importe ce que je suis et serai.