Sachant que dans cette partie je combine des chapitres anciennement séparés, je les délimiterai par ces petites étoiles : ***.
Faire son coming-out, c'est compliqué, c'est stressant, mais ça peut aussi être libérateur.
Quand j'ai fait mon coming-out en tant que lesbienne à ma mère, j'étais terrifié, alors même que je savais qu'elle réagirait bien. J'ai eu le droit au « t'es trop jeune, tu peux pas être sûre », mais c'est tout. Je pense que pour toutes les personnes cis et hétéro, l'orientation sexuelle est déjà un sujet mieux maîtrisé et connu que tout ce qui va entrer dans la transidentité. Je savais qu'elle comprendrait, et qu'elle ne me rejetterait pas. Malgré tout, j'ai beaucoup stressé. Je ne vais pas renter dans les détails de ce côté-là, mais malgré ma confiance en elle sur ce côté-là, je stressais un peu à cause de sa religion. Pas forcément le fait que le principe que je sois lesbienne lui pause un problème à elle en soit, mais plutôt le fait que ça la mette en conflit avec ses croyances et une partie de ma famille. Au final, c'était une peur totalement infondée.
Et maintenant, comment dire. Je sais très bien que la transidentité est un sujet un peu tabou, et encore plus la non-binarité. Quand on regarde une série avec mon frère et que ce sujet est mentionné, ils font de leur mieux pour parler en même temps, l'empêchant donc d'entendre ce qui est dit, pour ne pas avoir à lui expliquer le sujet. Ça me met toujours en rogne. Tu m'étonnes que j'ai du tout apprendre par moi-même sur internet.
En plus, je crois qu'ils ne comprennent pas du tout le principe de non-binarité. Une fois, avant de comprendre tout ça, je cherchais un livre, mais je ne me souvenais plus si la personne l'ayant écrit était une femme ou une personne non-binaire. Sachant pertinemment que ce n'était pas un mot que je pouvais me permettre d'utiliser, j'ai dit « je ne me souviens plus si c'est une femme, un homme, ou aucun des deux » ce à quoi ma mère a répondu « on est forcément un homme ou une femme, c'est pas possible autrement ». Pas forcément cette phrase mot pour mot, mais vous voyez l'idée. A ce moment-là, j'ai senti quelque chose se briser en moi, même si je ne comprenais pas encore pourquoi.
Je ne considère pas mon coming-out lesbienne comme un « vrai » coming-out, dans le sens où, si on oublie mes parents, c'est quelque chose qui s'est fait naturellement, parfois même sur le ton de la rigolade. Mais parler de ma non-binarité, ça c'est un « vrai » coming-out. Et c'est terriblement flippant. J'en ai parlé à plusieurs amies, et je compte en parler à une autre. Seulement elles pour l'instant. N'empêche, chaque fois je suis pas loin de la crise d'angoisse.
Puis il y a le reste de ma famille aussi. C'est certainement pas le genre de chose que je peux leur dire, je pense qu'iels comprendraient encore moins.
Bref, plus qu'à attendre d'avoir dix-huit ans. Sauf si les choses évoluent. (SPOIL : elles ont évolué.)
***
J'ai donc déjà dit que ce coming-out non-binaire que je voulais (j'allais écrire devais mais je ne dois rien à personne donc euh non en fait) faire à certaines personnes, je le voyais pour une fois comme un "vrai" coming-out (dans le sens où je stresse vraiment). Or, je crois que ça commence à devenir plus simple de le faire. Jusque-là je l'avais fait à des gens qui comptaient pour moi, mais aussi à qui je faisais confiance sur ce point de vue-là. Dans le sens que même s'ils n'avaient pas forcément compris la non-binarité (ce qui est arrivé pour certains) ils auraient essayé de comprendre, et m'auraient demandé si besoin. Et puis je savais que certaines s'y connaissaient, et certaines avaient même déjà des potes non-binaires donc c'était assez safe quand même. Sauf qu'hier, je l'ai fait à une amie, en qui, j'ai bien sûr confiance, et qui est importante pour moi, mais sans savoir son niveau de connaissance dans ce domaine. Elle m'avait déjà dit qu'elle pensait être pan, mais c'était un peu à ça qu'on s'était arrêté. On avait pas développé le sujet. Donc quand je lui ai envoyé mon gros pavé de coming-out, j'avoue que c'était stressant. Mais moins qu'au début, alors même que je ne l'ai fait qu'à des gens que je pensais totalement compréhensifs là-dessus.
Au final elle l'a très bien pris, et ma demandé mon nouveau prénom.
***
En ce moment, j'envisage de plus en plus de faire mon coming-out à mes parents. Je suis encore certain.e que ce serait un sujet compliqué - dans le sens où ils ne s'y connaissent pas - pour eux, mais je ne suis pas si sûr.e qu'ils le prennent si mal que ça. J'aurai sûrement le droit aux "T'es pas sûre", "t'es trop jeune", mais ça je l'avais déjà eu à mon coming-out en tant que lesbienne. Et c'est relou, mais largement supportable. Après, je me dis qu'avec ma santé mentale actuelle, il n'est pas certain que je supporte le fait de devoir tout expliquer à mes parents - sûrement plusieurs fois - ou leur adaptation à tout ça. Je ne sais pas. Je voudrais vraiment qu'ils sachent, que le monde entier sache. Mais ce serait simple pour personne. Par exemple, une fois qu'ils sont au courant, on fait quoi après ? On en parle comment à la famille ? Je veux pas gâcher la relation de mes parents avec leur famille. Même si je supporterais mal le fait qu'ils restent en contact avec des gens qui me rejettent pour qui je suis. Par exemple, j'ai une grand-tante qui m'a l'air un peu homophobe. Je ne sais pas comment elle réagirait à un coming-out lesbienne. Alors un coming-out non-binaire ? Mais elle me vire de la maison. (Maison = appart de ma mamie où on fête Noël.) Enfin bref. En vrai je pense que j'ai quand même la chance d'avoir des parents plutôt ouverts, mais ça reste terrifiant. En plus, récemment, ma mère a megenré un personnage d'une série. En gros, dans la série, il est dit très clairement que ce personnage est non-binaire. Parce qu'iel est megenré.e par quelqu'un, qui se fait corriger - même si ce quelqu'un ne pensait pas à mal. Et ma mère a utilisé "elle" pour ce personnage. Parfois j'ai l'impression que tout ça ne la dérange pas, qu'elle serait même prête à en parler comme on discuterait du temps qu'il fait. Mais parfois, j'ai de nouveau l'impression que tout ça reste tabou. Et c'est terrifiant. Parce que je veux avoir l'impression d'avoir ma place dans ce monde. Pas me sentir plus rejeté.e.
(Update : mes parents ont tous les deux correctement genré ce personnage au final. Je ne sais plus quoi penser je suis perdu.e.)
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Le Journal de Natt.
Документальная прозаBonjour, moi c'est Natt, et je suis non-binaire. Cette histoire n'est pas un journal à proprement parlé, mais je raconte quand même ma vie dedans, donc je pense qu'on peut l'appeler comme ça. Dedans, je parle de mon parcours en tant que personne n...