Chapitre 7

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Le soir tant attendu était arrivé. Les résultats du premier tour des législatives allaient être annoncé. Le bureau du Président avait été aménagé pour l'occasion, une table contenant boissons et nourriture se trouvaient au fond de la salle. Deux grands canapés avaient été rapprochés face à la télévision pour que tout le monde soit aux premières loges lorsque les résultats tomberaient.

Un verre de jus d'orange dans les mains, Gabriel était assis sur l'un des canapés, le regard alternant entre la télévision et sa montre. Deux minutes. Dans cent-vingt secondes, il saurait s'il avait réussi sa campagne. La boule de stress niché au creux de l'estomac de Gabriel enflait au fur et à mesure que le compte à rebours défilait. Un silence de mort régnait dans la salle, tous avaient le regard rivé vers l'écran, attendant nerveusement les résultats. Puis le graphique apparut.

Il y eut plusieurs soupirs étonnés, d'autres choqués, mais ce n'était pas cette émotion qui était en train de traverser Gabriel de part en part. C'était la peur. Le Rassemblement National était en tête, les dépassants de douze pourcents. Un chiffre énorme, catastrophique. Il était incapable de détacher les yeux de la télévision, son cerveau était en train de faire un black-out. Il avait perdu sa campagne. Même s'il savait qu'il restait un deuxième tour, l'échec était cuisant et c'était entièrement sa faute. Sans parler du vainqueur.

Il imaginait la joie de Jordan, les acclamations qu'il devait recevoir en ce moment-même et l'immense sourire glorieux qui illuminait son visage. Pourtant, il n'y avait pas de quoi se réjouir. Si le Rassemblement National prenait la tête du pouvoir, la France serait plongée dans un cycle de peur et de chaos.

— Veuillez quitter mon bureau, je vous prie. Tout le monde, sauf Gabriel.

L'ordre du Président était sec et personne ne prononça le moindre mot. En une fraction de seconde, Gabriel se retrouva seul dans ce canapé, Emmanuel Macron assis dans un fauteuil sur sa droite. Il osa poser son regard sur lui et remarqua sa mine sombre, pensive. Il était déjà en train de réfléchir à une issue de secours.

— Je suis désolé, Monsieur, réussit-il à articuler, la voix éraillée par l'émotion. J'ai échoué dans mon rôle de Premier ministre. Prenez les sanctions qui s'imposent.

Les mains jointes devant lui, le Président ne réagit pas à sa phrase et ce n'était pas forcément une bonne chose. L'ambiance était terrible et elle s'accentua lorsque la journaliste de TF1 donna l'antenne au QG du RN. Les hurlements de joie, les cris, résonnèrent dans la pièce jusqu'au moment où Jordan fit son apparition sur scène sous un tonnerre d'applaudissement. La victoire le rendait encore plus magnifique, il était forcé de l'avouer.

— Mes chers compatriotes. Aujourd'hui est un jour où...

Soudainement, l'écran devint noir. Emmanuel Macron venait d'éteindre la télévision. Le souffle court, Gabriel attendait sa sentence. Il méritait de perdre son poste, il en était conscient et si le Président ne le licenciait pas, il écrirait sa lettre de démission dès qu'il serait dans son bureau. La France méritait d'avoir un Premier Ministre se battant pour elle, et il avait échoué.

— Tu restes à mes côtés, le coupa le Président en tournant la tête vers lui.

Face au tutoiement de son interlocuteur, Gabriel fut quelque peu désarçonné, mais il fit en sorte de ne pas le montrer.

— Monsieur, mais...

— La bataille n'est pas encore perdue, et j'ai besoin de toi pour continuer. C'est inconcevable de les laisser gagner.

Les paroles du chef de l'État eurent le mérite de lui envoyer une bouffée d'air frais. Malgré son échec, il ressentait un sentiment de fierté qui lui redonna suffisamment d'énergie et d'espoir pour relever la tête.

Sentiments et Trahison - Bardella x AttalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant