Prologue

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Les tambours de guerre résonnaient à travers la forêt dense, leurs échos semblant réveiller les esprits des arbres millénaires. Le champ de bataille s'étendait à perte de vue, un tapis de chaos où se mêlaient cris de douleur, cliquetis d'armures et hurlements de commandement. Les elfes, gracieux et agiles, se mouvaient avec une fluidité mortelle, leurs arcs tendus crachant des flèches comme une pluie d'acier. Les humains, robustes et déterminés, avançaient en formation serrée, leurs épées brandies, prêts à en découdre avec leurs ennemis ancestraux.

Les cieux étaient obscurcis par la fumée des incendies, les flammes dévorant sans distinction les arbres et les corps. L'odeur âcre du sang et de la chair brûlée imprégnait l'air, rendant chaque respiration lourde et difficile. Des sorts d'une puissance terrifiante éclataient çà et là, créant des explosions de lumière et de ténèbres, renversant des dizaines de combattants à la fois.

Au cœur de ce carnage, une silhouette frêle se distinguait à peine. Une jeune elfe de tout juste dix ans, errait au milieu des combats, les yeux écarquillés par la peur et l'incompréhension. Ses longs cheveux violets étaient en désordre, et sa tunique d'enfant était maculée de boue et de sang. Elle n'était pas encore une guerrière, juste une enfant prise dans l'horreur de la guerre.

Autour d'elle, les corps tombaient, les visages figés dans des rictus de douleur ou de rage. Elle voyait ses proches, ses amis, tomber sous les coups des humains, et elle entendait les cris de désespoir de ceux qu'elle aimait. La réalité de la bataille était une avalanche sensorielle : les éclats métalliques des épées, les cris des blessés, et le fracas des boucliers brisés.

Malgré son jeune âge, l’enfant savait qu'elle devait se cacher, se protéger de cette violence insensée. Elle se faufila sous un chariot renversé, son cœur battant la chamade, ses mains tremblantes serrées contre sa poitrine. De là, elle observait le tumulte avec une terreur muette, chaque instant semblant durer une éternité. Elle vit un elfe, un guerrier puissant, s'élancer avec une grâce létale, fauchant les ennemis comme des blés sous la faux. Mais même lui, invincible en apparence, tomba finalement sous le poids du nombre, percé de toutes parts par des lances humaines.

L'esprit de cette jeune âme était assailli par des questions sans réponse : pourquoi cette guerre ? Pourquoi cette haine implacable entre les elfes et les humains ? Mais les questions se perdirent rapidement dans le brouillard de la survie. Pour l'instant, tout ce qui importait était de rester cachée, de rester vivante.

La bataille continuait, implacable, chaque camp refusant de céder du terrain. Le sol était jonché de corps, et le rouge du sang contrastait violemment avec le vert de la forêt. Les oiseaux, autrefois chants harmonieux de ce havre de paix, étaient silencieux, fuyant ce chaos infernal.

Et ainsi, au milieu de la tourmente, une jeune elfe nommée Linuki se retrouva spectatrice d'une guerre qui allait marquer à jamais son existence, une guerre où l'innocence ne trouvait pas sa place, et où chaque seconde pouvait être la dernière.

Elle restait immobile sous le chariot, ses pensées tourbillonnant comme une tempête dans son esprit. La bataille continuait de faire rage autour d'elle, et elle sentait les vibrations des combats jusque dans le sol. Des éclats de voix, des ordres aboyés, des hurlements de douleur se mêlaient en une cacophonie assourdissante.

À travers les interstices du chariot, elle aperçut un groupe d'humains s'approcher, leurs visages marqués par la fatigue et la détermination. Ils avançaient méthodiquement, cherchant les survivants parmi les elfes tombés. Linuki se recroquevilla encore plus, retenant son souffle, espérant passer inaperçue.
Soudain, un bruit sourd retentit près d'elle. Une masse sombre s'effondra lourdement à quelques mètres de sa cachette. C'était un jeune elfe, à peine plus âgé qu'elle, dont les yeux grands ouverts fixaient désormais le ciel sans le voir. La vue de ce visage familier, figé dans la mort, fit monter en elle une vague de terreur et de tristesse.

Le temps semblait s'étirer, chaque seconde se muant en une éternité d'angoisse. Puis, au moment où elle pensait que son cœur allait lâcher, un cri perça l'air : un signal de retrait. Les humains se regroupaient, préparant leur repli, laissant derrière eux un champ de bataille jonché de corps.

Linuki sentit une lueur d'espoir s'allumer en elle. Peut-être allait-elle s'en sortir vivante. Peut-être pourrait-elle retrouver sa famille, si elle survivait à cette nuit infernale. Rassemblant son courage, elle se glissa hors de sa cachette, chaque mouvement mesuré et silencieux.
Elle se dirigea vers la lisière de la forêt, ses pieds nus ne faisant aucun bruit sur le sol jonché de feuilles mortes. Les arbres, témoins silencieux du carnage, semblaient la protéger de leurs ombres bienveillantes. Elle avançait prudemment, ses sens en alerte maximale, le cœur battant à tout rompre.

Les bruits de la bataille s'atténuaient progressivement à mesure qu'elle s'enfonçait dans la forêt. Les chants des oiseaux reprenaient timidement, et le murmure du vent dans les arbres semblait lui offrir une lueur de réconfort. Mais Linuki ne ralentit pas, consciente que le danger pouvait surgir à tout moment.
Soudain, un craquement retentit derrière elle. Elle se retourna brusquement, ses yeux écarquillés scrutant les ténèbres. Une silhouette massive se détacha des ombres : un soldat humain, ses yeux brillants de malveillance. Linuki sentit la panique l'envahir, mais elle se força à ne pas crier. Elle se mit à courir de toutes ses forces, ses jambes maigres mais agiles la portant rapidement à travers les arbres.

Le soldat la poursuivait, ses pas lourds résonnant comme des coups de marteau. Linuki zigzaguait entre les troncs, sautant par-dessus les racines et les rochers, son souffle court et rapide. Elle pouvait presque sentir la main du soldat se refermer sur elle, mais elle continua à courir, portée par un instinct de survie primitif.

Elle aperçut une clairière devant elle, baignée de la lumière de la lune. Elle s'y précipita, espérant trouver un refuge ou une cachette. Mais alors qu'elle atteignait le centre de la clairière, une douleur intense éclata à l'arrière de sa tête. Le monde tourna autour d'elle, et elle s'effondra au sol, assommée par un coup brutal.

La dernière chose qu'elle vit avant que l'obscurité ne l'engloutisse fut le visage impitoyable du soldat, un sourire cruel aux lèvres. Puis tout devint noir et rouge, et Linuki sombra dans l'inconscience, emportée par les ténèbres de la forêt.

Chronique D'Avaloria : LinukiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant