Chapitre 4: Cahira. •

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- Bande d'incapables!! Ce n'est pas comme ça que vous deviendrez de grands combattants! Mettez-y du coeur putain!!
- Mais Cahira, il est cinq heures du matin...
- Pas de gros mot!
- Je m'en contre fiche de l'heure! Allez, bande de fainéants!
- Hé, Cahira, va baiser, ça va te rendre moins aigrie!
- Vos gueules et courrez! J'en ai marre de vous, je ne suis pas là parce que je vous aime bien, loin de là!
- Cours avec nous, clocharde!
- C'est qui que t'appelles une clocharde, sale merde??
Prise de fausse colère, je me mis à courir derrière mon élève, qui s'enfuit en criant à l'aide. Les autres élèves se mirent à rire, et intérieurement, je me retenais de faire de même. Je courais vite, bien plus vite que mon élève.
- Fais gaffe, elle te rattrape! cria une élève en riant.
Je me laissai moi aussi aller à cet amusement, un rire sortit de ma gorge, ma poitrine gonflait d'euphorie, je les détestais, mes élèves, mais qu'est-ce que je les adorais. Je me rapprochais d'Elias, qui manquait de souffle à force de courir et de rire. Une fois assez proche, je lui sautai dessus, le rire battant au rythme de mon cœur. Je le plaquai au sol sous les rires et applaudissements des autres élèves. Il se débattit sous mon corps, la gaieté aux lèvres, la joie au cœur, le sable se levant, se soulevant sous notre bataille effrénée. En ce matin de printemps, la joie résonnait, le bonheur rayonnait, les soucis oubliés, la tristesse délaissée, le temps d'un instant, qui aurait dû se figer, pétrifiant ces aiguilles, qui sans lasse, ne cessaient de tourner. Ce tic-tac infernal, froid, glacé, avait gelé mon cœur, mon souffle chaud, formant un nuage dans cette étendue glacée qu'était ma vie. Je riais. Un sourire habitait mon visage, de la sueur coulait sur mon front, j'aimais cette sensation, j'aimais cette joie, cette bonne humeur, mais le soir dans l'obscurité, jamais mon cœur ne battait aussi vite. Jamais mon âme n'était joie, elle était glacée, brûlée, scarifiée. On dit que les yeux sont les miroirs de l'âme. Les miens sont morts. Mais dans cet instant, si fugace, tellement court et pourtant si bon, ils vivaient. Ils vivaient et je me sentais vivante. Dans le gris de la solitude, jamais ces sentiments ne me portaient compagnie. Ces visages, rayonnants, éclairés par le soleil brûlant, scintillaient de sueur.
- Aller Elias!! cria Foral.
Elias était coincé sous moi et se débattait. Mais c'était vain, il le savait, je le savais, ils le savaient tous. Il avait perdu, comme toutes les dernières fois. Je me levai, ricanant.
- La prochaine fois! me promit Elias en souriant.
Je lui saisis la main qu'il me tendait, l'adrénaline courant librement dans mes veines, cette sensation euphorique ne s'effaçait pas, mais je sais qu'elle me quittera bien assez tôt.
- T'en es incapable, minus. Je suis imbattable et tu le sais!
Il rit de bon cœur alors que je me tournai vers les autres.
- Bon, c'est pas tout ça, mais vous avez un entraînement à poursuivre! Donc, ramassez vos petits culs du sable et faites moi vos tours! Ensuite, choisissez un partenaire et on commence avec le combat rapproché sans armes!
Je les regardai se lever en grognant, l'euphorie était retombée, seul le souvenir de ce moment pouvait battre les aiguilles inarrêtables, inébranlables, sans pitié qui faisaient tourner et avancer le temps, qui n'est que sans pitié, surtout envers des êtres comme moi, ébranlés par le temps, par ce tic-tac infini, qui ne fait que briser des âmes. Le bruit familier de la course sur le sable de l'arène commença à résonner dans le silence matinal. Une petite brise fraîche venait ébouriffer mes plumes. Si je ne portais pas de pull, j'aurais eu froid en ce matin de printemps. Mes élèves avaient rangé leurs ailes pour courir, course qui s'effectuait sous mes yeux attentifs. Elle dura une bonne heure, chacun courant à leur rythme. Ma seule condition est de ne jamais s'arrêter, ce qu'ils respectaient à chaque fois et qui avait le don de me rendre fière, même si je ne l'avouerais jamais à mes élèves. Tous les dix tours, ils buvaient, sans toutefois s'arrêter une seule fois. Après cette heure de course, ils purent prendre trente minutes de pause en gardant leur muscles actifs en s'étirant et enchaînant de petits exercices musculaires. Après cette pause, ils commencèrent les combats à mains nues, avec un mélange de plusieurs arts martiaux, utilisés comme bon leur semblaient. J'observais et analysais minutieusement chacuns de leurs gestes, les corrigeant si besoin. Ils s'amélioraient un peu plus chaque jour, étant plus précis, plus forts, se rapprochant de plus en plus du niveau à atteindre pour prétendre au rôle de combattant de l'Armée à part entière. Un peu plus tard, la classe des plus jeunes pris en charge par Floralie s'était posée dans les gradins, attendant un moment calme pour pouvoir fouler le sol sablonneux de l'arène. Leur arrivée ne voulait dire qu'une chose, dont mes élèves avaient conscience. Ils arrêtèrent de se battre, se précipitant vers le mur qui soutenait les gradins. Sur ce mur étaient posées des armes, mais pas n'importe quelles armes. Ces armes n'étaient qu'autre que des objets de tous les jours. Les enfants descendirent dans l'arène avec Floralie. Mes élèves prirent le premier objet qui leur passait sous la main, se battant parfois pour obtenir l'arme convoitée. Les plus jeunes s'étaient mis à courir, et lorsqu'ils auront fini, ma classe sera terminée. Mon amie me fit un signe de la main, depuis le sable, avec un petit sourire, gestes que je lui rendis depuis les gradins.

War of the lost CorbelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant