Black Roses- Terminé

Chapitre 26.2

Lyra (suite)

Attends...Quoi ?!

Mes yeux s'écarquillent, ma mâchoire se détend. Je ne peux pas en croire mes oreilles.

— Tu m'avais promis que si je faisais ce que tu voulais, je serais rémunéré, ajoute-t-il.

Mon frère se tourne vers moi avec une moue satisfaite.

— Qu'est-ce qu'il y a, petite sœur, ça te surprend ? À ton avis, comment ça se fait qu'on t'ait retrouvée si vite ?

Il n'a pas pu. Pas Kyle, il est trop gentil.

— Non, c'est impossible ! m'écrié-je, sous le coup de la surprise.

— Vraiment ? rétorque mon frère tandis que le doute s'insinue en moi. La famille de Kyle est fauchée. Il avait besoin d'argent et, moi, comme un bon samaritain, je lui ai offert un job.

— C'est vrai ? questionné-je mon ami, la voix cassée par un sanglot.

Je me remémore toutes les fois où il m'a offert son aide pour payer mes études alors qu'il n'en avait apparemment pas les moyens.

— Je n'avais pas le choix, se justifie-t-il. J'allais être expulsé de l'université si je ne payais pas mes frais de scolarité et...

— Donc tu t'es joué de moi ? Tout ça, dis-je en désignant l'espace entre nous, notre amitié, ce n'était que du vent ?

— Non, bien sûr que non ! objecte-t-il. Je t'apprécie vraiment...

— Si c'était le cas, tu n'aurais pas pactisé avec le diable. Je te faisais confiance et tu m'as trahie ! hurlé-je, les larmes dévalant désormais mes joues.

Je n'arrive pas à y croire. Je nage en plein cauchemar. Mon frère m'a tout pris. Ma sécurité, ma dignité, mon amie la plus chère, et maintenant Kyle. Je pensais qu'il ne pourrait plus m'atteindre, que j'étais déjà complètement brisée, pourtant il vient de me retirer un nouveau morceau de mon cœur.

— Grâce à mes experts en informatique, j'ai obtenu ton numéro de téléphone, reprend Ryan. Je me suis bien amusé à t'envoyer quelques textos, mais ce n'était que pour tâter le terrain. Ensuite, la photo sur le site internet de l'université était la preuve dont j'avais besoin pour relier officiellement Elizabeth Parker à Lyra Adams. Franchement, utiliser le nom de famille de maman, c'était beaucoup trop facile...

Je voudrais qu'il arrête de parler maintenant, mais je n'arrive pas à prononcer le moindre mot. Statufiée, je suis abasourdie par ses révélations. Sans intervention de ma part, il continue :

— J'avais déjà envoyé une équipe sur place pour enquêter à ton sujet. Kyle ne s'est pas méfié longtemps quand ils lui ont expliqué que ton frère chéri te cherchait. Il a donc été facile de te localiser. Ton ami leur a confié que tu travaillais dans un bar et je n'ai pas pu m'empêcher de les envoyer à tes trousses. Quand tu lui as avoué avoir un frère qui te pourchassait, il a voulu tout arrêter, mais comme il est facile d'acheter les gens... Bref, j'ai découvert qu'il avait des soucis financiers et on a passé un accord. Il a accepté d'être ma taupe en échange d'une généreuse somme d'argent.

J'ai la tête qui tourne. Ses mots me frappent tel un coup de poing en plein visage. Kyle, mon meilleur ami joyeux et rieur, le premier homme à qui j'ai su accorder ma confiance après l'incident...

— Je te faisais confiance, répété-je en le fusillant du regard.

— C'est faux, rétorque-t-il d'une voix amer. Tu ne m'as jamais rien dit sur ton passé et sur ta famille. Tu as refusé de m'en parler alors que tu as eu de multiples chances de le faire en deux ans, puis tu as rencontré Jake et tu t'es confiée à lui sans même le connaître vraiment.

— Alors, quoi ? Tu as fait ça par jalousie ? m'indigné-je.

— Pas du tout. J'ai fait ce que tout le monde aurait fait à ma place : j'ai assuré mon avenir. Qu'ils lui refassent le portrait, ce n'était qu'un bonus.

Je détourne les yeux, incapable de le regarder plus longtemps. Il me répugne. Pendant tout ce temps, c'était lui qui communiquait des informations à mon frère à propos de mon lieu de travail, de mon domicile et de mes amis. C'est à cause de lui que j'ai failli perdre la seule personne qui compte réellement pour moi. C'est sa faute si j'en suis là, tout est sa faute...

C'est là que je percute, que son implication dans cette affaire prend tout son sens et que les pièces s'assemblent dans ma tête.

— C'est pour ça que tu ne voulais pas que j'aille voir la police ? Ça te laissait le temps d'aviser mon frangin ?

— Il m'a seulement dit que tu avais quelque chose en ta possession qu'il devait à tout prix récupérer. J'ai fait le lien avec la clé USB quand tu m'en as parlé.

— Mais... intervient mon frère, tu as refusé de lui dire où elle était cachée. J'ai donc dû être créatif.

— Les bleus, la vidéo, tout était faux ? demandé-je.

— Il a pris quelques coups, il fallait bien rendre le tout réel. Il était seulement complice au lieu d'être prisonnier.

Mon frère hausse les épaules nonchalamment, comme si tout était normal, tandis que mon monde s'écroule. Il part en fumée, balayant mes derniers espoirs en l'humanité sur son passage.

J'ai une pensée pour Jake. Lui, il était réel. C'est une composante que mon frère n'avait pas prévue, un pion de trop sur l'échiquier. Il a su être la lumière de mes ténèbres. Il m'a fait rire, pleurer aussi, mais surtout il m'a montré que l'amour, le vrai, existe. Jake m'a prouvé qu'il reste encore de bonnes personnes en ce monde et que même si j'ai vécu des choses atroces, mon passé ne me définit pas. Il m'a fait comprendre qu'il saurait m'attendre, indépendamment du temps que ça prendra. 

Même si mon frère aimerait sans doute que je regrette d'être partie, ce n'est pas le cas. Je ne pourrai jamais regretter ma fuite parce qu'elle m'a menée jusqu'à Jake. Sans mon passé, je n'aurais pas de futur à ses côtés. Désormais, je n'ai plus seulement l'espoir, j'ai aussi l'amour et c'est déjà plus que bien des gens. Alors, je choisis de ne pas me laisser abattre et de relever la tête.