Le Coeur sur Terre (Tome 1)

Chapitre 17 - Confiance

PDV de Nora

Je jette un coup d'œil autour de moi en entrant dans le bureau de Roan. Aujourd'hui, nous ne restons pas dans le petit salon accueillant que je connais à présent par cœur. Son bureau est un espace imposant, baigné d'une lumière froide émanant des hologrammes qui projettent des données complexes et mystérieuses. C'est la deuxième fois que je viens ici, et la pression de ses responsabilités m'écrase chaque fois un peu plus. Des piles de documents sont éparpillées comme des pièces d'un puzzle sans fin.

Pourtant, quand Roan m'accueille avec son sourire taquin, toute la tension s'évapore en un instant. Il me fait signe de m'approcher, et comme par réflexe, je m'invite sur ses genoux. Mon corps se cale naturellement contre le sien, comme s'il avait été taillé sur mesure pour moi. Mes doigts glissent doucement sur les tatouages familiers qui marquent sa peau, là où la lumière émane de lui, particulièrement dans ses moments de vulnérabilité.

Je prends une profonde inspiration pour savourer l'instant, mais quelque chose me retient.

— Dis, tu ne m'as pas encore expliqué pourquoi vous gardez ces marques, je lui fais remarquer d'une voix douce, mes doigts effleurant une ligne lumineuse.

Roan relève la tête, un sourire en coin. Mais au lieu de répondre immédiatement, il semble peser ses mots. Cette hésitation me frappe soudain. J'ai appris à lire chaque nuance dans ses gestes.

— Elles ne servent plus vraiment, non ? demandai-je, un brin perplexe.

— Eh bien... autrefois, quand mon peuple vivait encore à l'état sauvage, ces marques étaient essentielles à notre survie, commence-t-il en souriant doucement. Elles réagissaient aux émotions trop intenses comme la peur, et nous permettaient de nous camoufler dans les forêts bioluminescentes de notre planète. Un moyen d'échapper aux prédateurs.

Tu as vu les éclatinées, ces fruits qui brillent lorsqu'on les cueille. Mais il y a aussi les filaées.

Je fronce les sourcils, intriguée.

Filaées ?

Ce sont des arbustes. Leurs feuilles émettent de la lumière, visible surtout la nuit. On en utilise la sève comme peinture. Elle imite l'illumination de nos tatouages pendant 48 heures après la récolte.

Je reste fascinée, imaginant le spectacle que peuvent offrir ces plantes exotiques. Puis je me rappelle de ce qu'il a dit.

Et pourquoi les avez-vous encore, si vous n'en avez plus besoin ?

Roan passe une main dans mes cheveux, ses lèvres se levant dans un rictus.

On les garde comme un héritage. Chaque année, on célèbre ce don de nos ancêtres pendant trois jours et trois nuits. On active nos tatouages pour la fête. Il n'y a plus de barrière émotionnelle ou de contrôle. On est nous, dans notre quintessence de vie. C'est un lien avec notre passé, et une façon de ne jamais oublier qui nous étions. Le fait de les utiliser chaque année permet de ne pas perdre cette particularité.

Je croyais que ça pouvait vous mettre dans des situations très gênantes.

C'est le cas. Mais que veux-tu ? Nous sommes attachés à nos racines et traditions. Et sûrement à cet esprit de fête à s'enivrer pendant 3 jours et 3 nuits, il pouffe.

Je m'imagine la scène, un instant de fête, des corps lumineux dansant sous un ciel inconnu.

Ça doit être magnifique à voir, je murmure, mon esprit déjà loin, fasciné par ce qu'il vient de me décrire.

Un jour, tu le verras, répond-il avec un sourire tendre, tandis que ses doigts caressent doucement ma joue.

Ces mots sonnent comme une promesse qui laisse entrevoir une vie paisible sur sa planète, loin du danger qui plane au-dessus de nous et duquel il veut me tenir éloignée. Ces derniers jours ont été une bulle temporelle incroyable mais je n'oublie pas la raison de notre voyage, ni les aveux de Roan au sujet d'une menace. Cependant, je continue de profiter de ce qui m'est offert, le temps que ça durera.