CHAPITRE 6

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Plusieurs jours se sont écoulés depuis que nous nous sommes embrassés. Après notre baiser, l'ambiance était timide, légère, mais très agréable. Nous avons encore profité de la présence de l'autre pendant quelques minutes. Notre petite bulle a soudainement été interrompue lorsque d'un coup, Jordan s'est relevé et a prétendu devoir répondre à un appel important. J'ai tenté de lui demander ce qu'il se passait, et s'ils voulaient qu'on se revoie, mais il ne m'a pas répondu. Il a juste fui.

Depuis, nous ne nous sommes pas revu.

Je ne suis pas bête, je sais qu'il m'a menti. J'ai très bien vu, sur son téléphone, qu'il n'avait reçu aucun appel. Mais bon que voulez-vous ? Je ne peux le forcer à rien. Je ne comprends juste pas pourquoi il s'est confié à moi et m'a embrassé, tout ça pour s'échapper juste après. En tout cas, ça m'a blessé, je l'ai pris personnellement, je dois dire. J'ai donc fait le choix de ne pas le contacter.

D'ailleurs, lui non plus n'a pas essayé de me contacter, alors que c'est lui qui est parti comme un voleur. Je suppose qu'il regrette, et que c'était une erreur. Alors même si c'est dur, je garde la tête haute et me concentre sur la campagne électorale.

C'est peut-être mieux ainsi.

*

Le temps passe et le jour du premier tour des législatives approche à grands pas. Je n'ai plus eu une seule seconde à moi depuis mes quelques jours de repos. J'ai enchaîné les dossiers, les réunions, les entretiens privés avec Macron, les conseils, les interviews et les déplacements dans les quatre coins de la France. Je dois tout donner pour ne pas finir deuxième à nouveau.

En plus, plusieurs partis de gauche se sont unis pour former le Nouveau Front Populaire, afin de faire barrage à l'extrême droite. C'est magnifique, mais cela veut dire qu'ils cherchent aussi à avoir la majorité absolue à l'Assemblée.

Et ça, c'est moins magnifique.

Au début, cette alliance ne me faisait pas peur, mais je me suis vite aperçu qu'ils avaient gagné en popularité auprès des jeunes, surtout dans les grandes villes. C'est une très mauvaise chose pour moi.

La fatigue se fait ressentir, mais ce n'est pas le moment de lâcher. Un débat m'attend, demain soir. J'affronterai Jordan Bardella -évidemment il fallait que ça tombe sur lui-, pour le Rassemblement national, et Manuel Bompard, pour le Front populaire, justement.

En plus, à l'approche de ce débat, les édits sur Jordan et moi reviennent en force, les gens ont visiblement hâte d'avoir d'autres images à exploiter. Je vais essayer de ne pas leur faire ce plaisir, je ne peux pas me le permettre. Je vais devoir sortir ma meilleure poker face. Surtout que ce salaud de Bardella en joue. Il a posté plusieurs vidéos concernant les édits. Il sait comment se mettre les jeunes dans la poche, et ça m'énerve. Je ne suis pas à l'aise à l'idée de le revoir, mais je n'ai pas le choix. Je tire donc un maximum sur ma cigarette électronique, dès que je peux, pour m'aider à me détendre.

Spoiler : ça ne fonctionne pas bien.

*

J'ai les mains moites. Je stresse. Plus qu'une heure avant ce fichu débat.

Je suis déjà dans les locaux de la chaîne télévisée, dans ma loge, habillé et maquillé. Au vu de la transpiration qui ne cesse de s'échapper de mes pores, quelques retouches seront nécessaire. Je songe même à changer de chemise.

Je devrais pourtant me détendre. J'ai bossé dur sur mes sujets afin de ne faire aucun faux pas. La réunion avec mon conseiller, ainsi que la répétition de ce matin se sont bien passées. J'ai n'ai fait aucune erreur. Mais j'appréhende tout de même.

LA FACE CACHÉEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant