CHAPITRE 4

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« Françaises, Français. Vous avez eu ce jour à voter pour les élections européennes, en métropole, dans nos Outre-mer, comme à l'étranger. Le principal enseignement est clair : ce n'est pas un bon résultat pour les partis qui défendent l'Europe, dont celui de la majorité présidentielle. Les partis d'extrême droite qui, ces dernières années, se sont opposés à tant d'avancées permises par notre Europe, qu'il s'agisse de la relance économique, de la protection commune de nos frontières, du soutien à nos agriculteurs, du soutien à l'Ukraine, ces partis progressent partout sur le continent. En France, leurs représentants atteignent près de 40% des suffrages exprimés... »

Après le Conseil des ministre, nous nous sommes rendus dans la salle de conférence de l'Élysée afin que le président de la République fasse son discours. Il est en train d'annoncer la dissolution de l'Assemblée nationale.

Je suis anéanti, triste, déçu.

Je n'arrive pas à me concentrer correctement sur les mots prononcés par Macron. Tout un tas d'émotions négatives me traversent. Je n'ai plus les idées claires. Je m'y suis donné corps et âme pour ce poste, et voilà comment je suis remercié.

« ...C'est pourquoi, après avoir procédé aux consultations prévues à l'article 12 de notre Constitution, j'ai décidé de vous redonner le choix de notre avenir parlementaire par le vote. Je dissous donc ce soir l'Assemblée nationale. Je signerai dans quelques instants le décret de convocation des élections législatives qui se tiendront le 30 juin pour le premier tour et le 7 juillet pour le second. Cette décision est grave, lourde, mais c'est avant tout, un acte de confiance. Confiance en vous, mes chers compatriotes, en la capacité du peuple français à faire le choix le plus juste pour lui-même et pour les générations futures ; confiance en notre démocratie... »

En prenant la décision de dissoudre l'Assemblée, il remet tous les postes en jeu. Y compris le mien. Et vu la tournure des choses, il y a de grandes chances que je ne le récupère pas. Que vais-je devenir ? Être Premier ministre est l'honneur de ma vie. J'ai travaillé dur pour ça, et voilà qu'après 6 mois seulement, je suis contrains à remettre ma place en jeu. Rien ne pouvait m'arriver de pire. Rien.

« ...Je sais pouvoir compter sur vous pour aller massivement voter les 30 juin et 7 juillet prochains. La France a besoin d'une majorité claire pour agir dans la sérénité et la concorde. Être Français est toujours se hisser à la hauteur des temps quand il l'exige, connaître le prix du vote et le goût de la liberté, agir quelles que soient les circonstances en responsabilité. C'est, au fond, choisir d'écrire l'histoire plutôt que de la subir. C'est maintenant. Vive la République ! Vive la France ! » Son discours terminé, Emmanuel Macron sort de la pièce d'un pas rapide, je le suis.

J'ai besoin de réponses.

« Monsieur le Président ! Monsieur Macron » Je l'appelle d'un air essoufflé, après l'avoir suivi en courant. Il se retourne « Oui, Monsieur Attal ? » Il me fixe, attendant patiemment que je lui réponde. « Pourquoi vous avez fait ça ? Pourquoi vous m'avez fait ça ? » Dis-je d'un air désespéré, la voix tremblante.

J'ai les larmes aux yeux, j'ai envie de chialer.

« Suivez-moi, nous allons dans mon bureau discuter. » Je le suis sans broncher.

« Installez-vous. » Me dit-il en me montrant un siège. Je m'assois. Lui, il est adossé contre son bureau, face à moi, bras croisés. Il prend la parole. « Je n'ai pas vraiment eu le choix, vous savez monsieur Attal. En tant que démocratie, il n'y a rien de plus important que d'écouter les gens. » Il souffle un coup, fait une petite pause de quelques secondes. « Si je n'avais pas dissous l'Assemblée, on m'aurait dit que je n'écoute pas les Français. Et ça aurait été le cas, puisqu'ils ont voté à près de 50% pour les extrêmes. » Une larme roule le long de ma joue. Je l'essuie rapidement. « Mais pourquoi avoir fait ça maintenant, et pourquoi pas après les JO, par exemple ? Ce n'est vraiment pas le moment ! » Je demande, d'une voix tremblante. « Il n'y pas de bon moment pour ça. Et puis quoi ? On organise les JO comme ça, tout se passe bien, un d'un coup, je dissous l'Assemblée ? Ça n'a aucun sens ! Les gens vont penser que je deviens sénile. » Je n'ajoute rien, il n'a pas tort. « De toute manière, une motion de censure nous pendait clairement au nez. Ça allait arriver. J'ai donc préféré le faire maintenant, avant que ça n'arrive contre mon gré, dans un chaos complet. » M'explique-t-il.

LA FACE CACHÉEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant