Chapitre 19

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Pdv de Nathan

Le chahut laissé par la dernière entrevue avec l'équipe Marketing  a mis ma tête en vrac, alors que je me dirige vers mon bureau, loin de tout ce brouhaha. La Réunion a été un franc succès. Les idées de campagnes publicitaires sont intéressantes, l'équipe est plus que motivée. Que demander de plus ! Pourtant je ne me sens pas très bien, un peu comme si on martelait mon cerveau à coup de batte de baseball.

Je ferme un instant les yeux, espérant que ce simple geste suffise à calmer la tempête qui fait rage en moi. Mais rien à faire. Je suis pris d'une migraine que rien ne semble pouvoir calmer. Le malaise grandit inexorablement, chaque pas devenant plus lourd que le précédent. Je passe devant le bureau de mon Assistante qui m'interpelle, mais c'est à peine si je la calcule.

- Pas maintenant, Samantha, je parviens à articuler en espérant qu'elle comprenne et me laisse tranquille.

Là, maintenant, j'ai besoin d'être seul face à cette pression qui semble vouloir m'engloutir. La porte claque derrière moi, et avec, l'impression de manquer d'air. Je défais ma cravate d'un geste brusque et plaque mes mains de de part et d'autre du bureau en quête d'un point d'ancrage. Cette réunion était interminable ! Nécessaire, certes, mais tout de même interminable. Je retire ensuite ma veste, comme si m'en défaire pouvait me débarrasser de cette migraine. Mais très vite ma vision se brouille, je n'arrive plus à respirer.

Ne cède pas ! 

J...Je dois garder le contrôle, m'accrocher à l'espoir que tout rentrera dans l'ordre, mais le sol se dérobe sous mes pieds. Je m'effondre, à bout de force. D'abord contre le bureau, puis contre le sol marbré. La pièce devient floue puis, plus rien. Ma respiration se fait lourde, presque sifflante, comme si l'air n'arrivait plus à mes poumons. Je suis là, impuissant, et incapable de bouger ou d'émettre le moindre son. C'est alors que la porte s'ouvre, et que des pas précipités se ruent dans ma direction. Des voix indistinctes me parviennent, c'est à peine si je distingue les talons qui claquent sur le sol. Puis, le visage de Guiliana se dessine au-dessus de moi. Elle essaye de me parler, mais je suis trop sonné pour répondre. Ses yeux s'emplissent de larmes, ses mains, hésitantes, tremblent en effleurant mon visage. J'aimerai pouvoir la rassurer, lui dire que ça va aller, que je vais me relever, mais aucun son ne sort de ma bouche.

Il n'y a pas plus insupportable que le sentiment d'impuissance. Moi qui pensais avoir repris le contrôle, il semblerait que je me sois menti à moi-même. Mon corps est à bout, épuisé par le manque de sommeil, les semaines chargées.

Guiliana finit par se ressaisir, avant de se ruer vers la porte entre-ouverte.  Sa voix résonne dans le couloir, amplifiée par le silence angoissant qui y règne. Quelques instants plus tard, elle réapparait, accompagnée de plusieurs autres personnes. Sa main serre fermement la mienne, tandis que l'autre tient son téléphone. Elle parle vite, trop vite, mais je suis assez lucide pour comprendre qu'elle est en ligne avec les secours, à qui elle explique la situation de façon exagérée. Tout ce que je peux faire, c'est rester immobile, à écouter cette voix qui m'est si familière.

Moi qui ai toujours voulu la protéger, c'est elle qui veille à présent sur moi. Ironique, n'est-ce pas !

En dehors de l'agression, je n'ai jamais vécu d'évènement semblable à celui-ci. Il n'est pas question de fatigue passagère, ou de stress. C'est quelque chose de plus insidieux, un mal qui remonte à des lustres, et qui se manifeste aujourd'hui pour me rappeler les signaux que j'ai volontairement ignoré. A commencer par l'agression dans ce même bureau...Puis il y a eu l'enlèvement de Guiliana, et la peur viscérale de la perdre elle, et un ami chère à mes yeux...Jim. Ça n'a pas été une partie de plaisir de voir mon meilleur ami sombrer, perdre pied, et finalement démission. 

Depuis lors, l'avenir de Royal Diamond repose sur mes bras. De la plus petite décision, à la plus grande responsabilité. Je travaille d'arrache-pied pour tenir ce business à flot, et les conséquences de ce mode de vie à cent à l'heure commence à me rattraper. Les nuits blanches, les migraines incessantes, cette sensation de vide font partie de mon quotidien. Je me suis toujours dit que je pouvais tenir, que je devais tenir, mais aujourd'hui mon corps dit stop.

La présence de Guiliana me rassure, malgré tout je me sens seul, terriblement seul. J'ai tout sacrifié, tant donné pour cette entreprise que je commence à me demander si la course en valait la peine, si cet empire ne causera pas ma perte. Un homme ça ne pleure pas, mais le château s'est effondré. Je ne peux jouer la comédie. 

as maintenant, pas devant mes employés ! 

Je dois rester fort, montrer que je maîtrise la situation, mais à l'intérieur les mûrs s'effritent. Les souvenirs, les regrets, les peurs...Tout remonte à la surface, comme un torrent que rien ne peut stopper. Le temps semble s'étirer à l'infini. J'entends des murmures autour de moi, les mains de Guiliana tenter de m'apaiser. Mais rien n'y fait. Les sons s'éloignent, comme si je glissais peu à peu vers l'inconscience.

Qu'aurait pensé Jim s'il me voyait dans cet état ? Lui qui m'a mainte fois prévenu que ce moment finirait par arriver si je n'apprenais pas à déléguer. Mais je n'ai rien écouté, et à présent j'en paie le prix fort.

- Reste avec moi, Nathan.

La pression de sa main est la seule chose qui me maintient éveillé. 

Pourquoi se met-elle dans un tel état pour moi ? 

Je ne suis qu'un idiot, incapable de protéger qui que ce soit, y compris ma santé. Je ferme les yeux et tente de chasser les pensées qui m'empoisonnent l'esprit, mais elles sont là, omniprésentes, comme des ombres qui m'encerclent de toutes parts. La chaleur m'étouffe, ma tête me fait un mal de chien . Je n'ai plus la force de lutter. 

Une paix étrange m'envahit, comme si, enfin, je pouvais lâcher prise. Pour la première fois depuis longtemps, je me sens bien. En paix.

 En paix

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FOREVER YOURS II (en correction)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant