Nulla certior custodia innocentia
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TOC TOC TOC
Le fracas d'un point furieux contre la porte du presbytère tira Augustin du royaume des songes. Avec un sursaut, il se redressa d'un bond, abandonnant ses cauchemars pour laisser ses pupilles sensibles se contracter sous la lumière matinale - son rideau était resté ouvert.
Se débarrassant de sa couette avec un geste hâtif, il constata avec horreur qu'il n'avait pas quitté la chemise qui l'avait accompagnée durant ses exactions nocturnes. Brunes, les tâches de sang qui la maculaient étaient autant de souvenirs de la nuit d'angoisse qui venait de pâlir sous le soleil.
— Docteur Blanchard ! Ici le Commandant Altenbach, je vous ordonne d'ouvrir immédiatement. Aboya une voix depuis le jardin. Pressante et rude, la prononciation de ses voyelles avait la couleur de la langue germanique.
Oh mon Dieu. Jura Augustin, ses yeux s'écarquillant de terreur en comprenant ce qui l'attendait devant la porte d'entrée.
Les mains secouées de tremblements incontrôlables, il arracha pratiquement les boutons de son vêtement souillé, le fourrant à la hâte sous son oreiller avant d'attraper son aube blanche abandonnée au sol. Il l'enfila du mieux qu'il le put, nouant à la hâte un cordon autour de sa taille pour se donner un semblant de contenance.
A la porte, les coups s'intensifièrent, marteau contre enclume ; les Allemands étaient pressés, comme toujours.
— J'arrive ! Il annonça, agrippant sa canne avant de pratiquement chuter au bas des escaliers, les cheveux en désordre et le souffle court.
Se traînant jusqu'à l'entrée, il maudit sa patte folle et la serrure grippée, forçant sur la clé jusqu'à ce que le battant ne pivote enfin, le laissant en nage, le cœur battant, et le regard étrangement coupable.
Sur le seuil du presbytère se dessinaient deux silhouettes menaçantes, vêtues d'un uniforme militaire. Un homme, grand et brun, arborant un regard sévère et un sourire qui n'annonçait pas de bonnes nouvelles ; à ses côtés, une femme blonde au visage osseux, les traits tirés par un chignon.
Tous deux exhibaient un brassard rouge au bras gauche, frappé d'une croix gammée.
— Docteur Blanchard ! Répéta l'homme qui s'était interposé dans l'entrée, son sourire s'élargissant pour révéler des dents blanches parfaitement alignées. J'ai cru que vous aviez l'intention de nous faire attendre toute la journée.
— Bonjour. Répondit simplement le jeune religieux, se composant un visage apaisé - de celui qu'il réservait à ses patients. Que puis-je pour vous, Herr Karl?
Pourtant malgré cet air calme, le sang battait douloureusement à ses tempes, son estomac se nouant alors que sa main se crispait imperceptiblement sur le petit manchon de bois de sa canne.
Ce sourire aux dents carnassières, il le connaissait parfaitement.
Le Commandant Karl Altenbach, aussi appelé Herr Karl, était celui qui avait pris le contrôle de son petit village savoyard au moment de la capitulation. C'était lui qui avait mis à sac les commerces et maisons de tous les résidents du village, presbytère et église comprise, s'assurant que nul communiste, juif ou résistant ne s'y cache.
Protégé par son statut de religieux, Augustin avait pu échapper - par chance - aux interrogatoires plus poussés qu'avait mené la garnison allemande au moment des arrestations qui avaient suivi. Mais depuis, Herr Karl n'avait cessé de le tourmenter, agrémentant ses semaines de visites surprises, saupoudrées de sourires qui le faisaient grincer des dents.
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Rebellis Fides (MxM)
RomanceFrance occupée, 1941. Médecin devenu prêtre pour dissimuler son homosexualité, une rencontre inattendue avec un résistant communiste risque de chambouler l'ordre établi... °•.ʚ♡ɞ •° Médecin retiré à la suite d'une blessure de guerre, Augustin n'a ja...