14. Miel et venin

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Amor et melle et felle fecundissimus est

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La clarté du matin, filtrant à travers la toile de la tente, tira doucement Augustin du royaume des songes. Étonnamment, son sommeil avait été paisible et réparateur, sans l'ombre d'un cauchemar ou d'une réminiscence du front - bien qu'après une nuit passée dans les bras de Rafael, son absence se faisait cruellement sentir. Sur sa jambe nue, le cataplasme de plantes préparé par la jeune Estrella s'était asséché, n'y laissant qu'une fine empreinte végétale.

Inspirant doucement par le nez, il rejeta le drap de laine usé qui lui avait servi de chaufferette, puis s'étira. En lui, un sentiment étrange semblait vouloir poindre ; loin de la nausée habituelle qui le saisissait au petit matin - liée entre autres à l'angoisse de voir Herr Karl et ses sourires débarquer - il se sentait... satisfait.

Il avait réussi.

Lui, Augustin Blanchard, le pleutre, l'avorton de la famille. Le freluquet, le faible, l'intello, l'homosexuel, la księżniczka.

Il avait accompli quelque chose, s'extirpant enfin de la longue torpeur qui l'avait frappé à son retour du front. Il était non seulement parvenu à traverser les montagnes pour conduire les enfants en sécurité, mais surtout, il avait surpassé sa peur. Sa peur panique qui muselait son courage depuis bien trop longtemps. Malgré la menace de l'envahisseur, malgré sa jambe, cette blessure devenue son bouclier... Il avait fait quelque chose qui le dépassait.

Fort de cette conclusion, il se décida à sortir de la tente, attrapant au passage le bâton de marche que sa gardienne avait soigneusement laissé à la portée de son bras. A l'extérieur, l'aube perlait sur le bassin savoyard, laissant le camp dans une douce lumière aux reflets de rose, bien trop douce pour ce qui se tramait sous son soleil pâlot.

Mort, Famine, Guerre, Conquête.

- Holà. Fit une voix sur sa droite, lui arrachant un sursaut.

Miguel se tenait là, une tasse en fonte fumante entre les mains, l'air plus détendu qu'il ne l'avait été la veille. Son visage aux traits saillants semblait plus doux, un sourire un peu bancal ourlant sa joue d'une jolie fossette très semblable à celle qu'arborait Rafael.

Il s'éclaircit la gorge, avant de baragouiner en français :

- On s'est vu hier. J'étais... hum... enfin j'avais très peur pour les enfants, pardon pour ça. Moi c'est Miguel. Vous avez sauvé mon petit frère, c'est ce qu'on a... hum. Ce qu'on m'a dit.

Augustin eut à son tour un timide sourire, échangeant enfin une poignée de main avec lui qui était... son beau-frère, ou un truc du genre.

- Enchanté, moi c'est Augustin. Il répondit de sa voix douce, essayant de garder une langue simple pour ne pas donner plus de complexité à l'échange. Je comprends votre méfiance. Merci pour Ishem et Sara.

L'homme hocha doucement la tête :

- Tu... Comment est Rafael ? Il demanda, un peu abruptement.

- Il va bien. Il récupère, mais sa blessure doit encore être surveillée. Je dois-

Augustin s'interrompit au milieu de sa phrase, troublé par l'intensité du regard que lui adressait son interlocuteur matinal ; car même s'il avait abandonné sa méfiance, l'espagnol continuait de le dévisager, comme s'il tentait de s'assurer qu'il ne les trahirait pas. Sans quitter son expression suspicieuse, il hocha brièvement la tête, reprenant la parole avant qu'Augustin ne puisse poursuive :

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Rebellis Fides (MxM)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant