Lemon Tree

Chapitre 16: Juriel

Je m'apprêtais à partir pour un week-end tranquille avec Georginio, un de mes plus vieux amis. Nous avions prévu ce voyage depuis des mois, un moment de pause dans nos vies un peu trop chargées. La destination ? Une petite ville nichée au cœur des montagnes, loin de tout, où seuls les murmures du vent dans les arbres et le clapotis des ruisseaux nous tiendraient compagnie.

Alors que nous roulions sur ces routes sinueuses et que les montagnes se dessinaient à l'horizon, mon téléphone vibra. C'était un message de Juriel, un ancien camarade de lycée.

"Ça fait longtemps... Comment vas-tu, belle inconnue ?"

Juriel et moi avions toujours eu cette connexion spéciale. À l'époque, nous étions jeunes, un peu maladroits, hésitants. Il y avait une forme de flirt permanent entre nous, mais ni l'un ni l'autre n'avait franchi le pas. Les circonstances n'avaient jamais été favorables : un rendez-vous manqué ici, une conversation interrompue là. Et puis la vie avait suivi son cours, comme elle le fait souvent, nous emportant dans des directions différentes.

Un sourire étira mes lèvres. C'était typiquement lui, ce ton léger, un peu taquin, comme s'il n'y avait jamais eu d'années entre nous. Mon esprit s'évada brièvement, ramenant avec lui des souvenirs d'une époque où tout semblait plus simple.

Le soir, alors que Georginio et moi étions installés près du feu, nos tasses de thé fumantes entre les mains, je ne pouvais m'empêcher de penser à Juriel . Le message que j'avais reçu un peu plus tôt résonnait en moi, et bien que j'essayais de me concentrer sur la conversation avec Georginio, mon esprit s'évadait sans cesse vers ces années passées, et vers ce "et si" qui flottait dans l'air depuis si longtemps.

Je répondis à Juriel bien plus tard, lorsque la nuit avait complètement enveloppé la montagne et que Georginio s'était endormi. Mon pouce hésita un instant sur le clavier avant que je ne tape :

"Je vais bien. Ça fait effectivement longtemps... Que deviens-tu ?"

La réponse ne tarda pas. Juriel me raconta qu'il vivait désormais à l'autre bout du pays, qu'il avait un travail qu'il aimait bien mais qui le tenait trop occupé. Il me demanda ce que j'étais devenue, si j'avais réalisé mes rêves d'autrefois. Chaque message échangé semblait raviver une flamme que je croyais éteinte.

Les heures passèrent. L'écran de mon téléphone était devenu le seul éclairage dans l'obscurité de la tente. Et à chaque message, je ressentais cette familiarité qui nous liait autrefois, comme si le temps n'avait pas eu d'emprise sur nous.

Au bout d'un moment, Juriel se risqua à une question plus personnelle.

"Tu te souviens, à l'époque, on aurait peut-être dû se voir en dehors des cours... Qu'est-ce qui nous retenait ?"

Je souris doucement devant mon écran. Il n'avait pas changé. Cette manière de dire les choses sans vraiment les dire.

"Peut-être qu'on n'était pas prêts à l'époque," lui répondis-je.

"Et aujourd'hui ?" Je restai un moment sans bouger, hésitant sur ma réponse.

Le voyage avec Georginio touchait à sa fin. Nous avions passé de bons moments ensemble, mais dans un coin de ma tête, Juriel était constamment présent. Chaque message échangé avec lui réveillait en moi des émotions que je pensais oubliées.

Sur le chemin du retour, mon téléphone vibra de nouveau.

"Et si on se voyait, pour rattraper le temps perdu ?"

Je sentis une vague de nervosité et d'excitation me submerger. Nous nous étions échangés des messages presque tous les jours depuis notre première reprise de contact. Chaque conversation semblait rallumer cette étincelle entre nous, mais la perspective de le revoir en personne me rendait soudainement nerveuse. Tant de temps était passé, et pourtant... la connexion était là, toujours aussi forte, voire plus intense qu'avant.