AU-DELÀ DE TES OMBRES [terminé]

Épilogue

Épilogue

Huit mois plus tard – juin – summer break

— Concentre-toi, Hailey, c'est la dernière fois que je te montre.

Je suis en selle sur Cheyenne, le lasso en main. Jayden est à cheval derrière moi, son torse collé à mon dos, un de ses avant-bras ceignant mon ventre. Ce n'est pas lui qu'il cherche à stabiliser, mais mon corps d'apprentie cow-girl.

— Jackson !

La barrière s'ouvre et un veau noir, bien trop petit pour ma dextérité de manchot, bondit dans le corral sous les sifflements et les cris de Jackson. Le wrangler se paie ma tête depuis une bonne heure devant mes essais infructueux.

— Surveillez votre café, Jackson, le menacé-je. Il se pourrait que j'allège ma provision d'arsenic juste pour vous.

Ma victime explose de rire en grimpant sur les rondins de bois, tandis que Jayden lance notre monture au petit galop. Tout va bien trop vite. Je pourrais m'entraîner jusqu'à la fin des temps, il est quasiment impossible de faire mouche à tous les coups sur une cible mouvante. Déjà qu'il m'a fallu des mois, en m'entraînant tous les week-end, pour y parvenir sur un objet fixe.

Jayden est d'une patience exemplaire. Il n'a pas l'intention de capituler avant ma première victoire, même si elle est unique. C'est moi qui tiens les dix mètres de corde d'une main, la boucle en nylon rigide dans l'autre. Mon professeur se contente d'accompagner mes gestes, les doigts enroulés autour de mon poignet droit.

— Détends-toi, petite furie. Tout en souplesse le poignet. Tu sais si bien t'y prendre, susurre le diable à mon oreille.

J'oublie de rire, totalement concentrée sur la fuite en avant du petit veau. La corde tournoie au-dessus de nos têtes.

— Je ne t'aide pas, c'est toi qui lances. Dès que la boucle passe devant toi, tu restes dans l'axe et tu accompagnes ton geste jusqu'au bout. À trois. Un, deux...

Vitesse et mouvement. Je ne vois plus que le taurillon qui tourne autour du corral, complètement affolé, feinte sur le côté, reprend sa course. Le tout pour le tout. Trois ! Mon jeté franc atterrit pile sur la tête sans corne. J'assure et fixe ma corde au pommeau.

— Ouais !!! Je l'ai eu, je l'ai eu !!!

C'est à ce moment que je me rends compte que Jayden n'est plus derrière moi. L'abruti a vidé la selle en plein galop. Il se tient à côté de Jackson, un pied sur la barrière, tout sourire.

— Je t'avais dit que tu y arriverais, me félicite-t-il, une pointe de fierté dans la voix.

Je pousse Cheyenne jusqu'à lui en enroulant ma corde, dès que Jackson a libéré ma prise.

— On dit qu'en récompense j'ai gagné une balade avec l'homme de ma vie ?

Les iris noirs qui couvaient mon approche avec tendresse se noient sous une vague d'amour pur. Le moins qu'on puisse dire c'est que je connais toutes ses faiblesses et les mots qui lui font rendre les armes.

— À condition que tu me rendes mon cheval, tente-t-il de plaider pour masquer son émotion.

— Pas de négociation possible. Trouve-en un autre.

Summer break vient à peine de débuter. Mon cœur déborde de bonheur à l'idée des nombreuses semaines qu'il me reste à passer sur les terres du ranch. Auprès de l'homme que j'aime. Il a comblé mes week-end depuis l'automne et le moindre congé dans ma vie d'étudiante en art. De Thanksgiving aux vacances de Noël, lorsque la neige interdisait tout déplacement en voiture, jusqu'à spring break.