Le scaphandrier et l'ébéniste...

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Le scaphandrier a des chaussures lestées
Pour plonger.
T'as les chaussures lestées du scaphandrier.
Tu démînes une poudrière, une salière
Dans le fond de tes narines.
C'est les Abyssines, t'es si fatigué.
Tu rappes le monde et les fonds marins
Avec leurs cousins et leurs coussins,
Leurs oreillers rouges. Je vois qui tu es
Et je ne peux m'empêcher de repenser
À ces années où tout a explosé.
La flotte a explosé et tu n'as
Rien donné.
Combien d'années pour tout raconter ?
Les huîtres de Tamaris s'en rappellent,
Enfants de Saint-Jean,
Jusqu'à quand irez-vous ensemble ?
Mais dans la main,
Priez que tout remonte.
Ton combat contre les fous,
Les racistes, les fascistes,
Au fond, c'est un cyclone.
Je me réchauffe de ta fracture.
Les potes de l'Arsenal
Sur des chevaux
Entre Répu et Sémard,
Les travestis et les arsenaux
Applaudissaient, secouant
Les marins bien fringués.
C'était il y a longtemps,
Et je me rappelle
Du scaphandrier.
Mais c'est une histoire que
Tu m'as contée
De manière succincte.
Je suis de ta ville
Et je connaissais l'histoire
De Jo, le Tchécoslovaque,
Au nom imprononçable.
Mais c'est une autre chanson.
Il faisait des meubles
Quand j'étais gamin.
J'adorais l'odeur du sapin.
Il faisait des cercueils
Pour les soldats,
Et le soir, il dormait
En regardant les étoiles
Dans sa boîte en bois.
C'était beau quand il le racontait,
Mais en y repensant, il pleurait.
Lui aussi, il a assisté au
Sabordage.
Il a entendu,
En écho, la flotte s'éclater sur la rocaille
Du mont Faron.
Il voulait me donner un chalet
Le jour où Férré s'est barré.
L'un a entendu et s'est battu,
Et l'autre s'est battu.
Des années après,
Est descendu
Dans le fond de la Darse,
Remonté les vieilles carcasses,
Poséidon et Dumont d'Urville,
Curverville.
Tu te marres,
Cul vers ville.
Le scaphandrier et l'ébéniste...

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