dsl pour le titre 🤪
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Gabriel soupira en s'asseyant sur un banc du jardin de Matignon. Les paupières closes, il bascula sa tête en arrière et profita de la chaleur réconfortante du soleil sur son visage. L'été était enfin arrivé, même à Paris. Pour Gabriel, cependant, ces premiers jours ensoleillés de juillet ne reflétaient pas vraiment le climat politique actuel dans lequel il avait l'impression de s'enliser. Il avait besoin de quelques minutes à lui, il n'avait pas arrêté ces derniers jours, encore. Il sentait le tiraillement des cernes sous ses yeux, le poids de la fatigue sur ses épaules, le brouillard dans sa tête.
De petits aboiements aigus le ramenèrent temporairement à la réalité. Volta revint en courant vers lui avec sa balle. Gabriel lutta avec elle quelques secondes avant de lui lancer à nouveau la balle en souriant tristement.
Le Premier Ministre s'était confortablement qualifié pour le second tour des élections législatives dans la dixième circonscription des Hauts-de-Seine, mais presque partout ailleurs dans le pays, les résultats du premier tour n'allaient pas en faveur du camp macroniste. Il ne lui restait probablement plus longtemps à profiter de cet endroit qu'il avait particulièrement investi.
Il avait l'impression que tout s'effondrait autour de lui en ce moment.
Sa place unique dans le monde politique, la notoriété de son parti, les alliances et les déchirures au sein même de celui-ci. Même dans sa vie privée, les choses semblaient se ternir. Jordan l'énervait de plus en plus.
Gabriel avait bien sûr appelé à faire barrage à l'extrême-droite et conséquemment, au désistement des candidats d'Ensemble pour la République en cas de triangulaire. C'était une décision qu'il aurait prise dans tous les cas, et ce peu importe le statut de sa relation avec le président du Rassemblement National - il s'était juré de ne pas mélanger sa vie professionnelle et sa vie privée. Jusqu'alors, deux images de Jordan avaient réussi à coexister dans sa tête, l'une à côté de l'autre. Amant-rival. Un oxymore dont les deux termes avaient fini par fusionner, alors que les frontières de ces deux images s'étaient brouillées dans son esprit.
Leur dernier débat, celui qu'ils avaient partagé avec Olivier Faure la semaine dernière, y avait en partie contribué. Ni le grand sourire de Jordan lors de leur poignée de main, ni le lapsus de ce dernier lorsqu'il avait failli l'appeler par son prénom en plein débat n'avaient suffi à apaiser la rancœur qui était montée en lui à l'égard du président du RN. Peut-être était-ce aussi à cause du malaise qu'il éprouvait à l'idée que son rival réussisse à prendre sa place à Matignon, mais Gabriel n'arrivait plus à excuser les idées nauséabondes que Jordan véhiculait dans ses paroles.
Alors qu'il avait eu l'occasion à la fin de ce débat d'offrir son témoignage sur l'homophobie qu'il avait vécue, qu'il vivait encore aujourd'hui, et sa volonté de protéger la communauté LGBT, Jordan avait lamentablement essayé de ramener le sujet sur l'insécurité. "Sujet-verbe-immigration", comme Gabriel avait pu résumer en réponse à ses paroles. Quand il avait avoué que c'était un sujet qui lui tenait à cœur, Jordan avait repris la célèbre phrase de Giscard d'Estaing en affirmant qu'il n'en avait pas le monopole.
Tout cela avait été de si mauvais goût que Gabriel en avait gardé après leur échange une amertume littérale, dans sa bouche, et figurée, qui persistait encore aujourd'hui.
Et son rival ne s'était pas arrêté là. Son instrumentalisation des édits était également de très mauvais goût, du point de vue de Gabriel. D'une part, elle dégoulinait d'hypocrisie ; Jordan semblait trouver ça un peu trop amusant pour quelqu'un qui n'assumait pas de coucher avec un homme. D'autre part, il n'avait même pas daigné le consulter au préalable, alors que Gabriel était tout aussi concerné que lui. Jordan s'était contenté de lui envoyer des messages comme si de rien était, messages auxquels Gabriel répondait désormais en demi-teinte.
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Un Fil (Bleu, Blanc) Rouge
FanficLes destins de Gabriel Attal et de Jordan Bardella se sont entrelacés trois fois. Trois rencontres fortuites. La première sous un soleil d'été, entraînés par la fougue de leur jeunesse et cédant à leurs désirs les plus purs. La deuxième au-dessus de...