9

17 2 2
                                    

« C'était irresponsable, imagine ce qu'elles auraient pu faire à nos invités ? » La voix de Dominik était étrangement calme, mais Ariadna connaissait ce ton trop bien. Il ne présageait rien de bon ; c'était la marque de sa colère froide, plus redoutable encore que les éclats de voix.

Les bras croisés, le regard fixe, Ariadna resta silencieuse. Elle en avait assez d'être constamment surveillée, réprimandée, corrigée pour le moindre de ses gestes. C'était comme vivre sous un joug invisible, où chacune de ses actions était pesée, mesurée, jugée. Elle avait abandonné l'idée de se défendre, de justifier ses choix ou de se battre pour être entendue. À quoi bon ? On ne l'écoutait pas vraiment. Elle avait pris la décision de ne plus argumenter, de ne plus chercher à se faire comprendre. S'ils voulaient la réprimander, qu'ils le fassent. Mais elle ne leur offrirait pas le plaisir de la voir réagir.

« Ariadna, regarde-moi lorsque je te parle. » Le ton de Dominik se fit plus ferme, tranchant à travers son mutisme.

Elle leva ses yeux verts vers lui, sans défiance, mais aussi sans crainte. Ce n'était pas une provocation, juste une réponse à sa demande, une obéissance silencieuse qui ne trahissait aucune émotion. Dans son regard se lisait une résignation contenue, une flamme qui refusait de s'éteindre, mais qui ne cherchait plus à se montrer.

« Tu as libéré dix panthères dans la cour ? Tu imagines un peu le carnage que ça aurait pu être ? » continua-t-il, son ton restant mesuré, mais la tension sous-jacente se faisant de plus en plus palpable.

Ariadna soutint son regard sans ciller. Elle n'avait pas l'intention de s'excuser, pas cette fois. Pour elle, il n'y avait eu aucun danger. Elle connaissait les panthères mieux que quiconque, bien mieux que son père qui, s'il avait possédé jadis une bête, n'avait jamais tissé ce lien particulier avec elles. Ces fauves lui obéissaient, répondaient à sa voix et à sa présence avec une loyauté instinctive. Ce n'était pas de l'imprudence, c'était une nécessité pour les panthères de retrouver, ne serait-ce que pour un bref instant, une liberté trop longtemps perdue. Mais comment pouvait-il comprendre cela, lui qui ne voyait en ces animaux que des symboles de pouvoir ou des instruments de peur ?

« Elles n'auraient rien fait, » finit-elle par murmurer, ses mots à peine audibles, comme une pensée qui s'échappe malgré elle.

« Rien fait ? » Dominik s'approcha, ses yeux scrutant ceux de sa fille, comme s'il cherchait à percer le mystère de son calme apparent. « Ce sont des prédateurs, Ariadna, pas des jouets. Le moindre faux mouvement, et... »

« Elles m'auraient écoutée, » le coupa-t-elle brusquement, avant de reprendre un ton plus posé. « Elles me connaissent, elles savent quand s'arrêter. »

Un silence pesant s'installa entre eux. Dominik laissa échapper un soupir, pas de frustration, mais presque de lassitude. « Ce n'est pas seulement une question de contrôle, » dit-il finalement, sa voix s'adoucissant à peine. « Ce que tu fais ne te concerne pas uniquement. Chaque acte que tu poses affecte notre famille, nos alliés. Ce que tu considères comme une liberté personnelle, les autres le voient comme un risque. »

Ariadna resta impassible, mais intérieurement, elle bouillonnait. Tout devait toujours être ramené à la famille, à ses devoirs, à ses responsabilités. Était-il si difficile de comprendre qu'elle aspirait, ne serait-ce qu'un moment, à s'affranchir de ces chaînes ? Même les panthères, avec leurs cages et leurs enclos, semblaient jouir de plus de liberté qu'elle.

« Je sais ce que tu vas dire, » poursuivit Dominik en voyant qu'elle ne répondait pas. « Que personne ne comprend. Que tu te sens prisonnière ici. Mais crois-moi, Ariadna, la liberté que tu recherches a un prix. Et il est souvent bien plus élevé que ce que tu es prête à payer. »

HOUSE ARGENT || HOUSE OF THE DRAGON Où les histoires vivent. Découvrez maintenant