Chapitre 7

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La brise brûlante de Zhéhar balayait le sable doré du désert alors que le soleil, impitoyable, lançait ses rayons comme des flèches enflammées. Au loin, les premières tentes des visiteurs et des nobles se dressaient déjà, formant une oasis éphémère pour ceux qui étaient venus assister à la course annuelle. Des chevaux splendides, au pelage brillant et aux sabots lourds, attendaient, attachés sous des ombrières improvisées. Mais l'attention n'était pas encore sur eux. Pas cette année.

Dans un vaste palais de pierre ocre, presque incrusté dans la montagne, le roi Zéphyr s'apprêtait. Ses gestes étaient précis, calculés, comme toujours. Il ajusta sa tunique sombre en soie légère, bordée d'or, et jeta un coup d'œil vers son armure, polie et imposante, qu'il avait l'habitude de porter pour les combats. Mais aujourd'hui, ce n'était pas une guerre qui l'attendait. Seulement la course. Un sourire fugace, aussi sec que le vent du désert, se dessina sur ses lèvres.

- Et dire qu'ils ne savent même pas que le roi va les détrôner dans une simple course..., murmura Rayan avec une lueur diabolique dans les yeux.

À côté de lui, Rayan, grand et large comme un rocher, observait son roi avec amusement. Le guerrier ajustait déjà ses protections, même si Zéphyr ne cessait de lui rappeler qu'il n'aurait pas besoin de son épée cette fois-ci.

- S'il te plaît, Rayan, épargne-moi la panoplie du héros aujourd'hui. C'est une course, pas un assaut sur des barbares.

Rayan ricana, sa voix grave résonnant comme une tempête lointaine.

- Ah, tu dis ça maintenant, mais on sait tous les deux que tu serais capable de les décapiter avec un seul coup d'étrier si l'envie te prenait. Il hocha la tête en direction de l'armure. D'ailleurs, si tu tiens vraiment à m'humilier aujourd'hui, au moins laisse-moi garder un peu de ma dignité. Je ne suis pas aussi gracieux que toi à cheval.

Zéphyr éclata d'un rire bref, sombre et distant.

- Si tu tombes, au moins cela divertira la foule. Ils ne sont pas venus pour te voir gagner, Rayan, tu es là pour le spectacle.

Le guerrier secoua la tête, son large sourire trahissant une affection certaine pour le cynisme de son roi. Mais cela lui faisait du bien également de le voir un peu détendu. Ceci était sûrement dû à la course dont il avait décidé d'honorer de part sa présence.

- Toujours aussi charmant. Je suis honoré de servir à tes côtés... et d'être ton bouffon apparemment.

Le roi enfila un masque de cuir noir, brodé de motifs serpentins qui accentuaient son allure mystérieuse et intimidante. Les rumeurs circulaient parmi les touristes; Zéphyr, l'énigmatique souverain de Zhéhar, ne participait jamais à ces événements publics. Mais cette année, il avait décidé de briser la tradition.

- Les visiteurs ne s'attendent pas à me voir chevaucher aujourd'hui, dit Zéphyr en fixant son reflet dans une plaque de métal poli. Ils viennent admirer les chevaux, les champions, sans savoir que le véritable prédateur sera parmi eux.

Rayan, maintenant prêt, saisit son casque d'une main lourde et le laissa tomber sur son crâne avec un grand fracas.

- Alors, faisons en sorte que leur surprise soit inoubliable. Mais si tu gagnes, promets-moi de ne pas trop fanfaronner. Ça devient lassant.

Zéphyr lui lança un regard perçant.

- Je te promets simplement que je ne serai pas clément, même avec toi.

Rayan éclata d'un rire sonore, se penchant pour saisir son épée avant de la laisser tomber avec un clin d'œil.

- Alors, que le désert soit notre témoin.

Dehors, le murmure de la foule s'amplifiait. Les chevaux hennissaient, impatients. Et le roi, accompagné de son fidèle guerrier, s'avança vers l'arène de sable, prêt à entrer dans la course, l'ombre d'un sourire cruel se dessinant sur ses lèvres.

*

Arianna plissait les yeux, ses cheveux blonds battus par le vent chaud du désert, alors qu'elle avançait péniblement, ses sandales s'enfonçant dans le sable brûlant. Elle s'était perdue deux fois en tentant de trouver le lieu de la fameuse course de chevaux. Les routes de Zhéhar, bien que magnifiques, étaient traîtresses pour les étrangers, serpentant entre dunes et montagnes rocailleuses. Son guide lui avait donné des indications vagues, et la jeune femme avait fini par se fier aux bruits lointains des foules et aux bannières colorées qu'elle apercevait dans le lointain.

Lorsqu'elle arriva enfin sur les lieux, Arianna s'arrêta net, le souffle coupé. Devant elle s'étendait une immense plaine sablonneuse, entourée de gradins improvisés, remplis de spectateurs. Tout autour, des tentes ornées de tissus chatoyants claquaient au vent. Le soleil éclatant illuminait la scène avec une intensité presque surnaturelle, donnant aux chevaux qui s'ébrouaient dans l'arène une allure mythique. Leurs pelages luisants, noirs, bruns, ou crème, semblaient absorber la lumière, les rendant irréels.

- C'est... magnifique, murmura Arianna pour elle-même, ses yeux écarquillés de stupéfaction. Elle n'avait jamais vu un tel spectacle de toute sa vie. Le contraste entre la rudesse du désert et la somptuosité de l'événement la laissa sans voix. Partout où elle posait les yeux, la richesse et la noblesse se mêlaient à l'audace de ceux qui venaient défier les éléments.

Arianna reprit son souffle et se glissa parmi les autres visiteurs, des gens de toutes les nations, venus assister à la course légendaire. Elle se sentait minuscule dans cette mer de visages fascinés, elle-même absorbée par l'effervescence autour d'elle. Des nobles vêtus de soieries colorées parlaient d'un ton excité en observant les préparatifs. Certains s'étaient déjà installés sur les gradins, prêts à admirer le spectacle, tandis que d'autres débattaient de quel cavalier ou cheval remporterait la course.

Elle se faufila parmi eux, trouvant finalement un coin d'où elle pourrait voir la piste. Son regard balaya l'arène une nouvelle fois, cherchant à distinguer les cavaliers. Il y avait des murmures autour d'elle , des rumeurs qui enflaient. Elle entendit des mots comme « roi », « Zéphyr » et « inattendu », mais ne comprit pas immédiatement ce qu'ils signifiaient. Un homme à côté d'elle, richement habillé, discutait avec sa compagne, l'air éberlué.

- Il est vraiment là, cette fois. Zéphyr. Personne ne s'y attendait.

Arianna fronça les sourcils. Le roi de Zhéhar? Le célèbre et mystérieux Zéphyr participait à la course? Elle avait entendu parler de lui, bien sûr, mais jamais elle n'aurait pensé le voir. Encore moins le voir courir avec les autres cavaliers. L'idée seule la fit frissonner d'excitation. Elle se hissa sur la pointe des pieds, essayant d'apercevoir celui dont tout le monde parlait.

Puis, elle le vit. En bas, près des écuries, un homme se tenait droit, sa silhouette noble et imposante même à distance. Son masque noir, aux motifs serpentins, captait la lumière comme un prédateur guettant sa proie. À ses côtés, un autre homme, grand et massif, riait et ajustait sa monture avec une décontraction presque provocante. C'était sans aucun doute Rayan, le légendaire guerrier du roi. Elle en avait également entendu parler lors de ses récents balades nocturnes.

Arianna sentit son cœur battre plus fort. Zéphyr, roi de Zhéhar, cavalier parmi les autres, mais aussi bien au-dessus d'eux par son aura glaciale. Elle se surprit à sourire. Ce désert, cette course, tout cela avait une beauté brute, presque sauvage, qui lui donnait l'impression d'être dans un conte ancestral.

Elle s'asseyait parmi les spectateurs, son excitation grandissant à chaque minute. Le silence s'était fait dans les gradins alors que les cavaliers s'alignaient pour le départ. Et au milieu d'eux, Zéphyr, le mystérieux roi, prêt à montrer au monde qu'il était plus qu'un simple monarque.

Sous les cieux du désert Où les histoires vivent. Découvrez maintenant